Femme aide-maçon, elle tente graduellement de reconstruire sa vie tout en mettant à niveau celle de ses trois enfants. Victime de violence au foyer depuis des années, Nathalie (prénom modifié), âgée de 27 ans, a pris son courage à deux mains et a quitté son compagnon le 11 juillet.
Publicité
Elle vit actuellement avec ses enfants dans une maison transitoire où elle bénéficie d’un encadrement essentiel pour réinstaurer sa confiance. Cela lui permet d’avancer au quotidien vers un avenir meilleur. Le temps d’une rencontre, la jeune femme s’est confiée au Défi Plus.
Née à Eau-Coulée, Nathalie est la benjamine d’une fratrie de neuf enfants. Elle avait trois mois lorsque son père a quitté sa mère, une couturière. Ayant grandi sans père et sans avoir été capable de tisser un lien affectif avec sa mère, cette ancienne élève du collège Lorette de Curepipe affirme qu’elle se sentait inférieure à ses camarades de classe. Ce sentiment d’infériorité l’a conduite à abandonner ses études après le Grade 9. «Mes sœurs qui finançaient mes études, je n’avais pas souvent les choses que je voulais. C’est pourquoi j’ai décidé de travailler afin d’être financièrement indépendante. J’en ai parlé à ma mère qui a simplement répondu : Fer ceki to anvi, » relate Nathalie.
Nathalie a commencé à travailler vers l’âge de 13 ans. Dans un premier temps, elle a décroché un boulot de serveuse dans un restaurant à Curepipe. Elle a ensuite exercé le métier de barmaid durant un certain temps avant de travailler une nouvelle fois comme serveuse dans un restaurant à Moka. Elle a arrêté à l’âge de 18 ans, car elle a accouché de son premier enfant. « Mon compagnon d’alors était un représentant commercial. Cependant, je l’ai quitté quand mon fils est né et je suis allée m’installer seule dans une maison dans le Sud de l’île. Je ne voulais pas de lui, car j’avais appris qu’il était un coureur de jupons, » renchérit Nathalie. Cette dernière passe ainsi deux ans à la maison à s’occuper de son enfant grâce au soutien financier de ses sœurs.
Silence, ça cogne !
Peu de temps après, Nathalie décide de donner une nouvelle chance à l’amour en la personne de Mathias (prénom modifié), un ami d’un de ses cousins. Après deux mois, ils emménagent ensemble dans la maison de la maman de Mathias, située à Floréal. Ils y ont vécu durant approximativement six à sept mois.
Hélas, Mathias avait un penchant pour l’alcool et les conflits ont commencé. Nathalie décide de louer une maison, mais elle était loin de se douter qu’elle allait se retrouver seule à payer le loyer et subvenir aux besoins de ses enfants. « Je travaillais dans une épicerie à Moka. Je ne gagnais pas beaucoup d’argent, tandis que Mathias dépensait le sien dans l’alcool, » raconte Nathalie.
Elle passe ses journées au soleil pour ériger bâtiments et maisons
À la naissance de leur premier enfant en janvier 2017, la situation s’empire. Sous l’emprise de l’alcool quasiment quotidiennement, Mathias s’est mis à tabasser Nathalie, tout en l’abusant sexuellement. « Je subissais en silence. Puis, vu que la situation s’est dégradée, j’ai fait régulièrement des plaintes à la police. J’avais une ordonnance de protection contre lui, mais ce n’est pas pour autant qu’il n’a pas cessé de s’en prendre à moi. Comme il dépensait tout son argent pour s’acheter de l’alcool et qu’il n’assumait pas ses responsabilités, je devais subvenir seule aux besoins de la famille. Cependant, je suis restée avec lui, car je ne voulais pas que mon fils grandisse sans père, comme ce fut mon cas. En plusieurs occasions, j’ai essayé de sauver notre relation, en vain, » souligne Nathalie.
Acculée au pied du mur, elle quitte son bourreau.
Après avoir donné naissance à son troisième enfant à l’hôpital, Nathalie est revenue vivre chez la mère de Mathias le 9 juillet dernier. À sa sortie de l’hôpital, elle apprend que Mathias a ramené une autre femme dans la maison de son père. Quand Nathalie lui a demandé des explications, une vive dispute a éclaté. Encore une fois, comme à son habitude, Mathias était ivre. Il a poussé à de multiples reprises Nathalie tout en lui infligeant des coups sur tout le corps.
La tante de Mathias, venue au secours de Nathalie, n’a pu s’empêcher de retenir ses larmes devant la scène qui s’offrait à ses yeux. Suite aux coups de son compagnon, la cicatrice post-césarienne de Nathalie s’était rouverte.
Nathalie ayant appelé la police, mais en vain, elle s’est tournée vers une travailleuse sociale avec laquelle elle avait noué un lien dans le shelter où elle avait autrefois pris refuge. La travailleuse sociale l’a référée au personnel d’une ONG qui accueille temporairement les femmes victimes de violence domestique. Toutefois, ce n’est qu’au bout de deux jours que Nathalie a décidé de quitter son bourreau. Elle a entassé des vêtements et a pris ses trois enfants pour se réfugier à la maison transitoire gérée par l’ONG.
Sur place, le personnel a accueilli Nathalie et ses fils âgés de sept ans et de trois ans, ainsi que le bébé. Au fil des jours, Nathalie a confié son calvaire aux membres de l’équipe. Elle est désormais bien encadrée et petit à petit elle gagne en confiance. Six mois après la violente dispute qui l’a poussée à quitter Mathias, Nathalie est devenue une femme plus forte grâce à l’accompagnement proposé par l’ONG.
Des arguments en béton pour construire un lendemain meilleur
Aujourd’hui, Nathalie travaille en tant que femme aide-maçon, ce qui lui permet de gagner sa vie pour survivre, mais aussi pour faire des économies. Elle chérit le rêve d’avoir une maison à son nom, un lieu où elle pourra vivre en toute sécurité avec ses enfants et les voir grandir. « Sans ces personnes qui m’offrent un environnement sécurisé, je n’aurais jamais pu m’en sortir,» dit-elle.
Nathalie précise aussi qu’elle décroche du travail grâce au bouche-à-oreille et parfois sur les réseaux sociaux. « Je cherche ensuite d’autres personnes pour m’aider et, ensemble, nous honorons les contrats, » conclut cette femme qui passe désormais ses journées au soleil pour ériger bâtiments et maisons.
Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !