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Proposition de réforme : le «right to recall» comme levier de l’assainissement politique

Les électeurs peuvent actuellement porter au pouvoir une personne, mais n’ont aucun moyen de la révoquer si elle manque à ses engagements.

Le « right to recall », un concept visant à donner aux citoyens le pouvoir de destituer un député en cas de faute grave, fait l’objet de débats au sein de l’opposition parlementaire, à la suite d’une proposition émise par Rezistans ek Alternativ. 

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Une véritable avancée historique pour la démocratie à Maurice. C’est ainsi qu’Ashok Subron de Rezistans ek Alternativ (ReA), a présenté, en plusieurs occasions, la proposition de « right to recall ». Selon lui, ce droit aurait pour objectif d’assainir la politique mauricienne. 

Concrètement, ce concept permettrait aux citoyens mauriciens de destituer un député avant la fin de son mandat s’il manque à ses obligations. Ce qui n’est pas le cas actuellement. Cette mesure, selon ReA, offrirait une forme de contrôle continu sur les élus et garantirait qu’ils restent redevables envers leurs électeurs tout au long de leur mandat. Pour Ashok Subron, permettre au peuple de révoquer ses élus en cas de faute constituerait un véritable « progrès démocratique ».

Cette proposition, qui a reçu un accueil favorable de la part du Parti travailliste, du Mouvement militant mauricien et de Nouveaux Démocrates, ne date pas d’hier. Elle a été initialement évoquée en 2017 par le constitutionnaliste Milan Meetarbhan dans son ouvrage Constitutional Law of Mauritius. À la page 174, Milan Meetarbhan souligne que dans plusieurs pays, les citoyens ont le droit de demander la révocation de leurs députés. Il cite notamment l’exemple du Kenya, où l’article 104 de la Constitution permet aux électeurs de révoquer un député avant la fin de son mandat, à condition que le Parlement adopte une législation définissant clairement les motifs et les modalités de cette révocation.

En outre, Milan Meetarbhan mentionne d’autres exemples internationaux où des dispositifs similaires ont été mis en place. Par exemple, en Trinité-et-Tobago, la Commission nationale de réforme constitutionnelle a recommandé l’introduction d’un droit de révocation dans sa Constitution. Au Royaume-Uni, la Recall of MPs Act de 2015 a introduit une forme de révocation basée sur un processus de pétition populaire, qui est déclenché lorsqu’un député commet certaines infractions pénales. Cette loi a vu le jour à la suite d’un rapport publié en 2012 sur la réforme politique britannique. Ces exemples montrent que plusieurs pays démocratiques ont déjà intégré le « right to recall » dans leur cadre législatif, souvent dans le but d’améliorer la transparence et la responsabilité des élus.

Contacté par téléphone, Milan Meetarbhan rappelle qu’à Maurice, un député est élu pour un mandat de cinq ans. Il se demande toutefois si les citoyens ne devraient pas avoir la possibilité de demander la révocation d’un élu avant la fin de ce mandat. Pour Milan Meetarbhan, deux mécanismes pourraient être envisagés afin de permettre la destitution d’un député. La première option serait qu’un nombre déterminé d’électeurs pourrait signer une pétition demandant le départ anticipé de leur député. « Si ce seuil de signatures est atteint, une procédure de révocation serait alors automatiquement déclenchée. Cela offrirait une solution simple et accessible aux électeurs pour manifester leur mécontentement à l’égard de leur représentant », dit-il.

La seconde option serait d’envisager l’organisation d’un référendum ou d’une consultation populaire. « Dans ce scénario, un consensus plus large parmi les électeurs serait nécessaire pour déclencher le processus de révocation », affirme-t-il. Selon Milan Meetarbhan, un tel processus garantirait que la révocation d’un député soit le fruit d’une décision collective plus large, et non pas d’une minorité insatisfaite.

Cependant, d’autres questions demeurent, selon Milan Meetarbhan, quant à la mise en œuvre d’un tel mécanisme à Maurice. Par exemple, quel est le moment opportun pour engager une procédure de révocation ? « Doit-on attendre que le député ait effectué la moitié de son mandat, voire les deux tiers, avant de permettre aux citoyens de lancer cette procédure ? Enfin, une question cruciale reste à résoudre : dans l’hypothèse où un député est révoqué, aurait-il le droit de se présenter à nouveau à sa propre succession lors de l’élection partielle qui suivrait sa destitution ? »

Par ailleurs, Milan Meetarbhan attire l’attention sur une autre problématique : combien de temps une circonscription pourrait-elle rester sans député après le lancement du processus de destitution ? Il cite l’exemple de la circonscription n° 10 (Montagne-Blanche/Grande-Rivière-Sud-Est), où une démission a eu lieu en février, mais l’élection partielle n’a été fixée qu’en octobre, soit un délai très long. « Si le ‘right to recall’ venait à être adopté à Maurice, il serait impératif de confier à la Commission électorale, qui est une institution indépendante, la responsabilité de fixer rapidement des élections partielles pour éviter que les électeurs ne restent trop longtemps sans représentation parlementaire », fait-il part.

En donnant un tel pouvoir à la Commission électorale, cela permettrait d’éviter que les leaders de partis politiques n’utilisent les délais à des fins stratégiques. Pour Milan Meetarbhan, une réforme du « right to recall » serait une avancée démocratique majeure, mais elle doit être accompagnée de garde-fous rigoureux pour garantir que le processus ne soit pas détourné à des fins partisanes.

Pour l’avocat Penny Hack, le concept de « right to recall » n’a rien de nouveau et est déjà en vigueur dans plusieurs pays, notamment en Californie, où un gouverneur a été destitué à la suite de ce mécanisme. Il estime donc qu’il est tout à fait possible d’appliquer cette mesure à Maurice, mais cela nécessiterait un amendement à la Constitution. Cependant, bien qu’il reconnaisse que le « right to recall » pourrait effectivement contribuer à assainir la scène politique mauricienne, Penny Hack souligne que l’assainissement d’un pays ne se limite pas à l’introduction de nouvelles lois. Il précise que cela dépend aussi du bon fonctionnement des institutions.

À cet égard, Penny Hack prend l’exemple de la défunte Independent Commission Against Corruption (Icac) : « C’est une institution qui a échoué dans sa mission de lutte contre la fraude et la corruption. Le bilan de l’Icac a été quasiment inexistant en termes d’efficacité. Quant à la Financial Crimes Commission (FCC), qui a remplacé l’Icac, cette nouvelle institution a déjà pris un mauvais départ, laissant présager peu d’améliorations en matière de lutte contre la corruption à Maurice », soutient-il.

 

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