La poupée russe et le mauricien unis par la photo

À première vue, cela pourrait être un couple improbable. Mais c’était sans compter avec la magie du Net. Il a suffi d’un « like » sur une photo postée par le Mauricien Johnny Richardson pour que naisse son idylle avec la Russe Daria Nikolaychuk. À Phœnix, à l’étage de leur maison, le couple vit un peu à l’étroit, en attendant d’emménager ailleurs. Daria souhaite, elle, vivre à Floréal, mais Johnny lui rappelle le prix de ces terres. Depuis son arrivée à Maurice l’année dernière, la jeune Russe s’initie petit à petit aux réalités de l’île. Un fort accent, des yeux bleus et une coiffure en boucles... Daria est une vraie Slave, très nature. Cependant, elle est loin de toute naïveté que pourraient laisser penser ses grands éclats de rire. Avant d’atterrir à Maurice, elle a bourlingué à travers l’Europe, de Paris à Berlin, en passant par l’Allemagne, la Suisse et la Finlande. Sa décision de se marier et de venir à Maurice, loin du grand froid de St-Petersbourg, a été dûment réfléchie. « Mon père, qui est un militaire à la retraite, était un peu perplexe. Il ne connaît pas l’île Maurice et comme tous les parents, il ne voulait que le bonheur de sa fille unique », raconte Daria. C’est sa passion pour la photographie qui, un jour, lui a fait like l’image d’un tigre postée par Johnny. Ce dernier, qui avait débuté dans la pâtisserie, après ses études secondaires, avait rapidement trouvé sa véritable vocation dans la photographie. [blockquote]« Pendant trois ans, j’ai travaillé comme photographe à Casela, où j’immortalisais les touristes aux côtés des différents animaux du parc. Ensuite, je me suis lancé dans le secteur du tourisme. Cela a changé ma façon de travailler, car je cherche plus à montrer les émotions sur mes photos », explique Johnny.[/blockquote]

Un tigre de Casela

Comme d’habitude, il poste ses photos sur le net. Un jour, sur le site où il est abonné, il poste celle d’un tigre de Casela. Dans un bourg situé en Russie, une jeune fille répondant au nom de Daria clique like sur la photo. Ce sera l’amorce d’une complicité qui aboutira au flirt. « J’ai voulu en savoir un peu plus sur cette fille qui se prénommait Daria. Je lui ai demandé si elle était mannequin et elle m’a répondu qu’elle était photographe », explique le Mauricien. Dans la banlieue de St-Petersbourg, Daria, issue d’une famille de classe moyenne, s’est elle aussi informée sur l’île Maurice. « J’ai appris que c’était une île tropicale. Chez moi, personne ne connaissait l’île Maurice. on n’avait rien contre Johnny, mais on m’avait dit de bien réfléchir... surtout par rapport aux différences culturelles », raconte-t-elle. La conversation à travers Skype va durer environ quatre mois. En 2013, le Mauricien décide de mettre le cap sur la Russie, afin de démontrer à Daria qu’il ne plaisantait pas concernant ses sentiments pour elle. Pourquoi aller chercher l’âme sœur si loin ? « Parce que je n’ai jamais fait confiance aux Mauriciennes, confie Johnny. Elles m’ont toujours paru un peu superficielles. J’ai senti qu’avec Daria, c’était des sentiments purs. ça valait le coup que j’aille la voir », dit-il. Moscou baigne dans une chaleur estivale lorsqu’il y atterrit. Accueilli par Daria, Johnny ira habiter d’abord dans une chambre d’hôtel. Puis, la jeune Russe l’emmènera chez elle, d’abord par le train, puis dans la voiture conduite par une de ses amies. « Dans le train, on ne cessait de nous regarder, les yeux interrogateurs », se souvient Johnny. Dans sa localité, les voisins attendent la visite du Mauricien. C’était un événement. Lorsqu’elle frappe à sa porte, c’est Helena, sa mère toute souriante, qui les accueille.

La famille de Daria

« Il était un peu tard et on est passé directement à table », raconte Daria. Dans la soirée, un de ses deux frères, avocat de profession, sa femme et sa fille les rejoignent. Son père Alexandre viendra plus tard. Durant la conversion, c’est Daria qui se charge de traduire. « Ce séjour était nécessaire, raconte Johnny. La famille de Daria a compris que j’étais sérieux, que je n’étais pas venu jouer au touriste à Moscou ». Photographe freelance de profession, Daria, elle aussi, sait à ce moment-là que le Mauricien n’est pas le fruit d’une rencontre fortuite sur le net. Lorsque ce dernier rentre à Maurice, les deux jeunes gens se promettent de rester en contact. Comme Johnny avait voulu rassurer la famille de Daria sur ses intentions en se rendant en Russie, cette fois-ci, c’est la jeune femme qui fera le chemin inverse. Elle débarque à Maurice, à la fois pour se rendre compte de la vie de Johnny et pour y faire des photos. « Ici, j’ai mitraillé partout », dit-elle. Lorsqu’elle rentre chez elle, sa décision est prise. « Ma mère m’a dit : Fais ce que ton cœur te dit ». En septembre 2014, Daria revient à Maurice pour se marier avec Johnny. Le couple attendra encore un peu avant le mariage religieux et pour fonder une famille. « Il nous faut nous faire un nom dans le métier », affirme Johnny, qui a des contrats auprès des tour-opérateurs. « Ces dernières années, le nombre de touristes de l’est européen qui visitent Maurice est en hausse. Ce qui nous ouvre de nouvelles perspectives professionnelles », fait observer Daria. Depuis un an, la jeune Russe a été conquise par la cuisine mauricienne, ses currys de poule, rougaille, briani, mine frite.... « Il ne me manque que mes amies, ma famille et la neige », concède-t-elle.