Le trafic humain est un fléau qui prend de l’ampleur dans le monde et, dans une certaine mesure, notre pays n’en est pas immunisé. L’avocat Neil Pillay explique ce qu’est le trafic humain. Il souligne que ce mot regroupe plusieurs formes d’exploitation humaine. Notamment la prostitution, l’esclavage, le travail forcé, le trafic d’organes, la mendicité forcée, la gestation pour autrui. Pour lui, il existe des législations pour combattre ce fléau avec des peines sévères.
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Qu’est-ce que le trafic humain ?
On appelle ce fléau, communément, le trafic humain dans la presse, mais en termes juridiques, on parlera plutôt de la traite des êtres humains. La traite des êtres humains consiste ou plutôt regroupe plusieurs formes d'exploitations d'êtres humains. Les plus courantes sont la prostitution, l’esclavage et le travail forcé. Mais on peut aussi y inclure, entre autres, le trafic d’organes, la gestation pour autrui ou la mendicité forcée.
Il existe diverses définitions de ce qu’est la traite d'êtres humains. Je pense que l’article 3 du Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité organisée – le Protocole de Palerme – qui vise à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, contient une définition correcte et plutôt complémentaire. Ainsi, dans ce Protocole, l'expression « traite des êtres humains » désigne «le recrutement, le transport, le transfert, l’hébergement ou l’accueil de personnes, par la menace de recours ou le recours à la force ou à d’autres formes de contrainte, par enlèvement, fraude, tromperie, abus d’autorité ou d’une situation de vulnérabilité, ou par l’offre ou l’acceptation de paiements ou d’avantages » pour obtenir le consentement d’une personne ayant autorité sur une autre aux fins d’exploitation. L’exploitation comprend, au minimum, l’exploitation de la prostitution, d’autrui ou d’autres formes d’exploitation sexuelle, le travail ou les services forcés, l’esclavage ou les pratiques analogues à l’esclavage, la servitude ou le prélèvement d’organes.
Cependant, il est important de retenir que le consentement d’une victime de la traite des personnes à l’exploitation envisagée est indifférent lorsque l’un quelconque des moyens énoncés précédemment ait été utilisé. En d’autres mots, cela signifie que la traite est une activité interdite, qu'il y ait ou non consentement de la victime.
Nous avons aussi une définition, plus ou moins similaire, qui est présente dans nos lois à Maurice, notamment dans la « Combating of Trafficking in Persons Act 2009 ».
Que dit notre législation sur le trafic humain ?
Comme je le souligne dans votre question précédente, sous nos lois, nous avons le «Combating of Trafficking in Persons Act 2009 » qui est la loi-cadre sur la traite des êtres humains. Il y a aussi d’autres articles visant à protéger particulièrement les enfants de ce genre de trafic sous l’article 13A de la « Child Protection Act 1994 » qui a été amendée.
Sous l’article 2 de la «Combating of Trafficking in Persons Act 2009 », les termes «trafficking» et « exploitation» sont définis comme tel – trafficking means – (a) the recruitment, sale, supply, procurement, capture, removal, transportation, transfer, harbouring or receipt of a person – (i) by the use of threat, force, intimidation, coercion, abduction, fraud, deception, abuse of power or abuse of a position of vulnerability; or (ii) by the giving or receiving of payments or benefits to obtain the consent of a person having control or authority over another person; or (b) the adoption of a person facilitated or secured through illegal means, for the purpose of exploitation; exploitation includes – (a) all forms of slavery or practices similar to slavery, including forced marriage; (b) sexual exploitation; (c) forced labour; and (d) the illegal removal of body organs.
L’article 11 (1)(a) de la «Combating of Trafficking in Persons Act 2009 » établit le délit de trafic d’êtres humains ou de traite d’êtres humains. Cet article établit aussi le délit d’assistance à la traite d’êtres humains et il impose aussi un devoir pour les fournisseurs de services internet de rapporter à la police toute présence d’informations sur leur serveur relatif à la traite d’êtres humains.
Crucialement, il établit aussi un délit pour ceux qui profitent sciemment, que ce soit financièrement ou autrement, des services de victimes de traite des êtres humains ou ceux qui facilitent l’usage d’une victime de traite d’êtres humains.
Sous l’article 14 de cette loi, toute personne reconnue coupable d’un délit sous l’article 11 encourt une peine de servitude pénale ne dépassant pas quinze ans, selon la discrétion du magistrat.
Les lois peuvent être changées et moulées, selon les circonstances
Qu’en est-il du trafic des migrants ?
Le terme migrant signifie une expatriation volontaire pour des raisons économiques. Cependant, un migrant pourrait se retrouver vite en situation d’exploitation et être victime de la traite d’êtres humains. Dans ce cas, le consentement initial de la victime n’est pas une excuse. Ainsi, l’article 11(1) (b) de la « Combating of Trafficking in Persons Act 2009 » stipule que nul ne pourra invoquer comme défense au délit de traite d’êtres humains que la victime de ce genre de trafic, ou qu’une personne ayant le contrôle ou l’autorité sur une victime mineure de ce genre de trafic, a elle-même consenti à entreprendre l’acte constituant le trafic ou l’exploitation, comme définit sous nos lois.
Est-ce que l’exploitation d’un enfant diffère du trafic humain ?
Le principe reste le même. Cependant, comme je l’ai déjà souligné plus tôt, suite l’amendement apporté en 2008 à la « Child Protection Protection Act 1994 », l’article 13A de cette loi stipule que toute personne qui, intentionnellement et illégalement, recrute, transporte, transfère, abrite ou reçoit un enfant a des fins d’exploitation, commettra un délit et s’il est jugé coupable, pourra se voir infliger une peine de servitude pénale ne dépassant pas trente ans.
Nos lois sont-elles assez dissuasives pour combattre ce fléau ?
Je pense que oui. Mais n’oublions pas que les lois peuvent être changées et moulées, selon les circonstances et les normes de notre société, par le législateur dans toute sa sagesse.
Comment peut-on lutter contre le trafic humain et l’exploitation d’enfants ?
Nous nous devons d’être vigilants aux signes qui pourraient s’apparenter à l’exploitation ou la traite d’êtres humains. Des heures de travail inhumaines, l’âge des personnes, le genre de travail accompli par rapport à l’âge et le salaire reçu, les conditions d’hébergement, la liberté relative de la personne, les conditions de travail de ces gens et aussi le droit à la parole de ces gens sont parmi des considérations à examiner afin de déterminer s’il y a trafic d’êtres humains ou exploitation d’êtres humains.
Comment est-ce que les proches des victimes, ou les victimes elles-mêmes, peuvent-ils obtenir justice ?
Ils doivent saisir toute opportunité pour dénoncer leurs tortionnaires aux autorités qui se doivent de les secourir et les assister dans leurs démarches. Ces dernières devront aussi les assister à retrouver leur environnement habituel...
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