Didier Debellaire, COO de Chandler Asset Protection Ltd, une compagnie de gestion de patrimoine opérationnelle, depuis un an, donne son point de vue sur les défis du secteur financier dans un paysage en plein bouleversement.
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Dans quels domaines Chandler Asset Protection opère-t-il ?
|Nous sommes une société de gestion indépendante créée deux ans de cela, soit en septembre 2016. Nous avons une licence de GBL1 Company et une Unrestricted Advisory License émises par la FSC. Notre fonction primaire est de gérer les avoirs des clients. On gère leurs fonds et on fait des portefeuilles taillés sur mesure.
L’avantage que nous avons, c’est une société sœur, Chandler Investment Consultancy, à Dubaï. Nous avons un bureau de représentation à Genève et, il y a quelques semaines, nous avons soumis la paperasse pour obtenir une licence pour opérer sur le marché sud-africain. On est en mode attente. Nous sommes aussi accompagnés par de grandes banques. Nous avons un accord exclusif avec la Commerzbank, une banque allemande listée sur la bourse de Francfort. Nous avons déjà trois fonds auprès d’eux, ce sont les administrateurs. Nous sommes aussi en pourparlers avec d’autres banques pour offrir un plus grand éventail à nos clients.
Quel est le profil de votre clientèle ?
Notre base de clientèle comprend beaucoup d’Européens qui résident ici ou ont des structures à Maurice. Nous avons des expatriés qui sont basés au Moyen-Orient et aussi une bonne base dans l’océan Indien, au niveau de Madagascar et aussi l’Afrique du Sud.
Pourquoi avoir choisi Maurice comme base d’opération ?
C’est très simple : position géographique, stabilité politique et sociale et c’est un hub financier. En termes de réputation, Maurice est très apprécié, que ce soit en Europe, en Afrique, ou même au Moyen-Orient. En termes d’infrastructures, le niveau est très raisonnable. Nous sommes bilingues et la plupart de nos clients parlent l’anglais ou le français. Nous voulons également nous tourner vers l’Afrique et Maurice se trouve dans une position stratégique, proche de l’Afrique du Sud, de Madagascar à quelques heures de vol au maximum. Nous avons l’avantage d’être une boîte aux normes européennes.
Outre l’expansion vers le marché africain, quelles sont les avenues de développement pour une société comme la vôtre ?
Ces derniers temps, nous avons investi dans pas mal de projets. Nous avons récemment adopté le système ERP, qui contient tous les portefeuilles de nos clients dans une base de données informatisée. Nous sommes également MIFID compliant, à savoir que nous sommes aux normes européennes. On mise beaucoup sur la technologie et la qualité. On se professionnalise pour être plus efficaces à l’avenir. On n’hésite pas à investir.
Il y a des modèles sur lesquels nous pouvons apprendre quand il faut mettre des choses sur place.
Il y a eu pas mal de remous dans le secteur financier ces derniers temps. Quel est votre point de vue sur la situation ?
Le secteur financier, avant tout, est dynamique dans lequel on ne peut se reposer sur ses lauriers. Il faut se remettre en question à chaque fois. Il faut être à la fois proactif et réactif, vu que c’est un secteur dynamique. Il y a eu quelques inquiétudes dernièrement sur la manière d'opérer des compagnies de global business. Il y a eu quelques flous, mais le plus important c’est que Maurice a le potentiel de se transformer en une juridiction moderne et transparente, capable d’attirer les investissements étrangers.
Dans n’importe quel cas de figure, quand on veut progresser, il faut de la stabilité et, comparé aux voisins africains, nous en avons. Maurice est très demandé, très apprécié et la juridiction attire certaines des personnalités les plus riches. C’est là que les gestionnaires de patrimoines doivent frapper. Avec la conférence (Ndlr : de la semaine dernière sur le secteur financier), l’une des ambitions affichées est de doubler l’apport des services financiers dans l’économie. L’axe des banques privées et de la gestion du patrimoine a été identifié, mais il faut investir dans les infrastructures.
On parle beaucoup de Fintech, d’intelligence artificielle et de blockchain pour l’avenir du secteur. En quoi cela aidera concrètement ?
Avant d’y aller, il faut être prudent et s’assurer d’avoir le cadre légal approprié. On a tendance à faire de bonnes choses en termes de transparence et de bonne gouvernance. Il y a des modèles sur lesquels nous pouvons apprendre quand il faut mettre des choses sur place. Il y a peut-être un manque de talents à Maurice dans ce secteur. Il faudrait une formation. Actuellement nous sommes quand même en train de nous essouffler un peu. Il faut innover. Cela prendra son temps, vu qu’il faut former et que cela coûte. Mais cela paiera. À chaque fois il faut redynamiser, c’est cela le défi pour le secteur financier.
Le secteur a tout de même eu une mauvaise presse récemment avec les opinions négatives d’ESAAMLG et du SEBI. Quel en a été l’impact ?
Nous avons eu des questions de nos clients par rapport à ESAAMLG, mais l’important c’est que nous apprenons de nos erreurs. Le tout, c’est d’être plus vigilants et rigoureux en termes de 'compliance'. Plus vous innovez, plus vous avancez, plus vous êtes exposé à ce genre de choses. C’est tout à fait normal. Cela a un peu secoué le secteur, mais ce n’est pas une catastrophe non plus.
Quelles sont vos procédures de vérification à la Chandler Asset Protection ?
Nous avons trois niveaux de vérification. Il y a d’abord une vérification interne, puis nos activités opérationnelles de compliance et de comptabilité sont sous-louées à des management companies qui font leurs propres vérifications et troisièmement, là où nous déposons les avoirs du client, ils font également leurs vérifications.
Il y aura toujours des poissons qui passeront à travers le filet. Ce sont les risques du métier. C’est pour cela que quand on se développe commercialement, il faut chercher à réduire au maximum l’aspect risque. Ce qui est important aussi, c’est que le client a un rôle à jouer. Quand vous prenez une compagnie comme Sunkai qui offre des retours mirobolants de 15 % ou 20 %, vous devez vous poser des questions. Vous savez que certains de nos clients ont fait une due diligence sur nous ? Ils sont allés tout vérifier sur le site de la FSC. Le client doit se responsabiliser.
Y a-t-il eu des retombées concrètes suite à la conférence de deux jours sur l’évaluation des risques de blanchiment d’argent et de financement d’activités terroristes dans la juridiction mauricienne ?
Le maitre-mot, c’est d’être vigilants et rigoureux en termes de contrôle. Il faut se préparer. C’est dans la transparence qu’il faudrait investir pour la gestion de patrimoine. À chaque segment de trouver le bon mécanisme pour une structure plus claire. Et puis, je reviens à la formation… souvent, nous avons des gens qui sont doués académiquement mais pas dans la pratique. Il faut un bon amalgame de tout cela. Il faut miser sur la qualité du personnel. Plus vous formez vos gens, plus vous réduisez les risques. 100 % de réduction de risques cela n’existe pas, mais il faut se montrer vigilant. Même à l’étranger, il y a des cas.
Quel est le rôle du régulateur dans tout cela ?
Le régulateur va vous donner une licence. De temps en temps, il viendra faire ses vérifications. Maintenant, il faut voir si ces personnes qui font les vérifications ont les compétences. Je vous ai dit qu’à Maurice il y a beaucoup de gens qui sont compétents académiquement, mais sur le terrain, c’est tout à fait autre chose. Mais la société et le client ont aussi un rôle à jouer. En cas de doute, le client doit poser des questions.
Qu’en est-il des attentes autour du blueprint annoncé pour le secteur ?
Il faut attendre et voir ce qui se passe. Il y a un flou qui persiste autour de cela. Nous sommes en attente de certaines informations. Je crois qu’on sera fixé dans pas longtemps.
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