À les voir, on dirait l’un des couples les plus heureux au monde. Alors qu’en réalité, il se rencontre chaque jour seulement pour éprouver la tristesse de la séparation, quand Pascal doit quitter sa bien-aimée pour chercher un refuge dans la rue afin d’y passer la nuit. Des sans abris qui travaillent le jour et dorment dans la rue le soir, c’est bel et bien une réalité !
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Obtenir un logement devient de plus en plus dur. Et c’est avec beaucoup de peine que Rojeanne et son concubin Pascal ont décidé de témoigner à visage découvert de leur misère. Ils ont habité dans une dépendance à Grand-Baie pendant longtemps. Hélas, la propriétaire a décidé de vendre la maison et le couple a dû vider les lieux avec ses deux enfants.
Commence alors le périple : trouver une maison à louer ! « Les prix des maisons en location sont extrêmement élevés. De plus, on nous réclame un dépôt, parfois jusqu’à trois mois d’avance. Si on avait une telle somme, je pourrais vous dire que depuis longtemps, on aurait eu notre petit chez nous. » Rojeanne explique qu’elle a bien tenté de trouver un travail, « sauf que sans adresse fixe, on vous envoie balader ». Elle ne peut compter que sur une aide sociale de Rs 3 297. Cependant, elle ne baisse pas les bras et n’hésite pas à aller de maison en maison pour dénicher un petit travail au quotidien.
N’arrivant pas à trouver de maison à louer, la famille s’est retrouvée à la rue. « Afin que mes enfants ne passent pas la nuit dehors, j’ai supplié mon frère de les laisser dormir dans sa maison. C’est une maisonnette en tôle et en bois que la NEF a construit pour lui à Camp-Créole, Albion. Il la loue avec nous à Rs 2 000. Elle est dépourvue d’électricité. Sauf qu’elle est tellement petite qu’elle ne peut pas tous nous abriter. Donc, la priorité, c’est les enfants et je dors parfois avec eux. » Elle explique que son concubin doit, lui, passer la nuit dans la rue. « D’abord, parce que c’est plus près de son lieu de travail et qu’il n’a pas les moyens parfois de payer le trajet en autobus. Puis, parce que nous n’avons plus rien. »
Démarches infructueuses
Rojeanne explique que cela leur fend le cœur à tous deux de devoir se séparer pour que lui aille se réfugier dans un coin de la rue chaque soir. Elle craint aussi d’être chassée avec ses deux enfants et se demande ce qui adviendra d’eux. Elle explique avoir fait des démarches : « Je me suis rendue à la National Empowerment Foundation (NEF) depuis 2001 pour faire une demande de maison, mais les officiers m’ont dit que mon cas était à l’étude. Et depuis, je n’ai pas de réponse. »
Rojeanne dit être héritière d’un lopin de terre. Son père avait déjà évoqué son intention de partager le terrain à parts égales pour chaque enfant d’une fratrie de 5 frères et 2 sœurs, dont elle fait partie.
« Malheureusement, notre père est décédé avant même d’avoir partagé le terrain. Depuis, c’est l’un de mes frères qui contrôle tout. Il a, en sa possession, tous les papiers légaux et personne ne peut rien dire. La situation est compliquée. Je paye Rs 2 000 pour une maison qui se trouve sur notre propre terrain. De plus, je suis obligée de me faire toute petite et me plier à ses exigences, sinon il me mettra à la porte. Il a accepté de louer cette maison avec moi sous une condition : que mon concubin ne vienne pas vivre sous ce toit. »
Pascal, son concubin âgé de 54 ans, surmonte cette épreuve avec bravoure. Depuis plusieurs mois maintenant, il se retrouve à la rue. « Je travaille comme agent de sécurité et je préfère les shifts du soir, car cela m’arrange. Chaque matin, au lieu de me reposer, j’erre à gauche et à droite jusqu’à retourner sur mon lieu de travail à 17 heures », explique-t-il. Ainsi, il cherche chaque matin un lieu où prendre son bain.
Le couple est en quête d’une maison abordable pour y vivre en toute tranquillité. « Nous essayons de nous voir le plus souvent possible, mais c’est vraiment très dur », affirme-t-il.
Comme eux, bien des personnes se retrouvent du jour au lendemain SDF. On les croise dans la rue, on les voit au bureau, sans s’imaginer qu’elles passeront la nuit dehors.
La NEF peut-elle intervenir ?
Selon CliffordVellien, de la National Empowerment Foundation (NEF), l’organisme livre des maisons en béton de 50 mètres carrés avec deux chambres et un salon, incluant une cuisine, une salle de bains et des toilettes au coût variant de Rs 900 000 à 1 M de roupies. Les bénéficiaires paient seulement 25 % du coût, soit Rs 250 000 pour l’obtention de la maison. La note restante est réglée par le gouvernement. Il n’y a pas de dépôt et le montant à payer est étalé sur plusieurs mensualités, dépendant de l’âge de la personne. Les bénéficiaires doivent être enregistrés sous la Social Register Mauritius (SRM) et posséder un terrain en bonne et due forme à leur nom et pas seulement un droit de construction. Si la personne possède un terrain à bail du gouvernement, la NEF intervient aussi. Pour ceux ne possédant pas de terrain, il y a aussi un plan.
Le Communication Manager de la NEF explique qu’il y a un accord avec la NHDC. « Nous obtenons 10 % des maisons construites par la NHDC et ceux inscrits à la NEF en bénéficient. Dans le dernier budget, il est fait mention que 6 000 maisons seront construites par la NHDC et 10 % d’entre elles reviendront à la National Empowerment Fund (NEF), soit 600 unités. Dans chaque district, plusieurs officiers de la NEF œuvrent sur le terrain pour considèrer la demande de la personne et ils l’inscrivent ensuite sur notre liste. De plus, nos officiers informent les gens des plans dont ils peuvent bénéficier auprès de la NEF », assure-t-il.
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