Me Neelam Ramsaran-Jogeea: «Un testament est important pour protéger les bénéficiaires»

Tout le monde est libre de disposer, comme il l’entend, de ses biens. Cependant, la liberté de le faire à titre gratuit est restreinte par la loi en faveur des héritiers en ligne directe, notamment les enfants. Me Neelam Ramsaran-Jogeea nous explique l’importance de rédiger un testament.

On peut disposer de ses biens à titre gratuit par donation entre vifs ou par testament. C’est quoi un testament ?
Le testament est un acte par lequel le testateur exprime ses dernières volontés quant à la disposition de ses biens à sa mort. Il existe trois types de testaments.

(i) Le testament olographe : un document entièrement écrit, daté et signé de la main du testateur et n’est soumis à autre formalité.

(ii) Le testament mystique ou secret : le testateur ou autre personne désignée sur ses instructions écrit le testament qui est dûment signé et remis dans une enveloppe scellée au notaire de son choix en présence de quatre témoins qui doivent être des citoyens mauriciens à part entière et qui jouissent de leurs droits civils.

(iii) Le testament authentique : il est, lui, dicté par le testateur chez le notaire qui l’établit en sa présence et celle de deux témoins ou en présence de deux notaires et deux témoins. À la suite, le testateur et les témoins doivent y apposer leurs signatures et le notaire le lire au testateur.

Qu’en est-il d’une donation ?
La donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de ses biens en faveur du donataire qui l’accepte. Tous actes de donation de biens immobiliers doivent passer devant le notaire sous forme d’un contrat. Il est important que la donation soit acceptée par le donataire.

L’acceptation peut se faire ultérieurement, mais la donation n’aura d’effet à l’égard du donateur qu’après lui avoir été notifiée. Il faut aussi ressortir qu’il existe des exceptions à la règle de l’irrévocabilité de la donation. La donation peut être révoquée par le donateur pour cause d’inexécution des conditions sous lesquelles elle aura été faite. Le donateur peut aussi la révoquer pour cause d’ingratitude.

Par exemple, lorsque le donataire a attenté à la vie du donateur, lorsque le donataire s’est rendu coupable envers le donateur de barbaries, de délits et même lorsque le donataire lui refuse des aliments. Si la donation a été faite par une personne sans enfant, elle peut être révoquée, si un enfant légitime ou légitimé lui survient.

«La donation peut être révoquée (…) pour cause d’inexécution des conditions sous lesquelles elle aura été faite. Le donateur peut aussi la révoquer pour cause d’ingratitude.»

Quelle est alors la différence entre un testament et une donation ?
La différence capitale entre les deux est qu’une donation produit immédiatement ses effets, alors que le testament ne produit effet qu’au décès du testateur. Aussi, un testateur peut révoquer ou modifier son testament à tout moment avant sa mort, tandis qu’un donateur ne peut révoquer sa donation, sauf dans des cas précis (les exceptions sont mentionnées ci-dessus).

Est-ce que les deux (un testament et une donation) ont force de loi ?
Certainement. Les principales dispositions de droit sur le testament et la donation sont inscrites dans le Code civil mauricien, le Code de procédure civile et la Succession and Wills Act.

Quelles sont les conditions exigées pour un testament et une donation ?
Le testateur ou le donateur doit d’abord être propriétaire du bien en question (meuble et immeuble) pour faire un testament ou une donation valide. En outre, il doit être âgé de plus de 18 ans et mentalement capable. Une personne de moins de 18 ans peut aussi faire un testament ou une donation, si elle est civilement mariée entre 16 et 18 ans.

Comment se fait la répartition du don entre héritiers ?
En ce qui concerne le don, le testateur ou le donateur doit le faire dans les limites de la portion réservée (la quotité disponible). Une partie de la succession d’un défunt est réservée aux enfants, mais pas pour le conjoint survivant, et aucune donation ou testament ne peut empiéter sur ce droit. Toutefois, le conjoint survivant a un droit réservé d’usufruit sur la résidence principale du couple.

La quotité disponible est la suivante : si la personne décédée laisse un enfant, celui-ci obtient la moitié de la succession. Dans le cas de deux enfants, le partage des biens est de 2/3 de la succession. En ce qui concerne, trois enfants ou plus, la réserve est de 3/4. La quotité disponible est divisée à parts égales entre les enfants du défunt. La partie non réservée peut être accordée à tout autre personne, par exemple, à un enfant, à un voisin, à une institution de bienfaisance ou religieuse.

Est-il important de rédiger un testament ?
Oui, pour protéger un ou plusieurs bénéficiaires ou pour accélérer le processus d’homologation.

Peut-on contester un testament ou une donation ?
Oui, les deux peuvent être contestés si le don excède de la quotité disponible. La contestation peut se faire par une action en Cour suprême afin de procéder à une réduction en valeur de l’excédent.