
Amandine avait serré la main du pape François le 9 septembre 2019, qui était en visite à Maurice. Elle avait alors 18 ans. Aujourd’hui âgée de 23 ans, la jeune femme atteinte d’autisme pleure la disparition de celui qu’elle appelait affectueusement son « pape à moi ».
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21 avril 2025. Lundi de Pâques. C’est un de ces jours où l’on devrait célébrer la résurrection et s’accrocher à la lumière malgré la grisaille intérieure. Mais ce lundi-là, une tristesse immense a envahi Amandine. Elle venait d’apprendre que le pape François n’est plus.
Elle est autiste. Mais elle parle, rit, chante, danse, virevolte et surtout, ressent les émotions avec une intensité particulière. L’annonce du décès du souverain pontife a fait vaciller toute une lumière en elle. Il n’incarnait pas simplement un chef religieux à ses yeux. Il était son « pape à moi », comme elle le surnommait affectueusement.
Celui qu’elle avait contemplé et qui, lors d’une journée mémorable de septembre 2019 au caveau du Père Laval, l’avait regardée droit dans les yeux en lui murmurant, dans sa langue maternelle, qu’il l’aimait. « Elle ne cesse d’en parler », confie sa grand-mère Marie-Claude, la voix nouée par l’émotion. C’est elle qui l’avait accompagnée ce jour-là au caveau du Bienheureux Père Laval, à Sainte-Croix. Cette date du
9 septembre 2019 demeure gravée telle une cicatrice lumineuse dans leurs cœurs.
« Nous avions nos cartes d’accès et sommes arrivées vers 9 heures », se remémore-t-elle. « Des policiers nous ont escortées jusqu’à l’église où l’on nous a offert à boire et à manger. Puis, à 14 heures, le Saint-Père est apparu, au caveau. Après s’être recueilli, il s’est dirigé vers les malades. »
Ce jour-là, Amandine n’était pas une simple observatrice, mais une privilégiée. Elle faisait partie des personnes que le pape a pris le temps de saluer, de bénir et de toucher. « Il lui a serré la main. Il a dit qu’il l’aimait. Et il lui a remis un chapelet. Un chapelet qu’elle garde précieusement depuis. C’est son trésor », dit Marie-Claude. Une larme perle alors sur sa joue ; le souvenir est doux mais poignant.
Âme pure
À cette époque, Amandine, qui avait 18 ans, fréquentait déjà l’APEIM, un établissement spécialisé pour les jeunes en situation de handicap. « Elle est très débrouillarde. Elle aime bien l’école. Elle fait tout toute seule : elle mange, elle parle et elle s’habille. C’est une bonne fille », souligne sa grand-mère.
La voix de Marie-Claude vibre d’une fierté authentique et sans artifice. « Ses enseignants disent que lorsqu’elle n’est pas là, il manque quelque chose. Elle met l’ambiance. Elle chante et danse. Elle fait rire les autres », raconte la grand-mère.
Mais aujourd’hui, la joie a cédé la place au chagrin. Depuis l’annonce du décès du souverain pontife, la jeune femme est en état de veille. Samedi, elle a suivi attentivement les images de la cérémonie des funérailles du pape à la télévision, parfois les yeux embués.
Si elle ne saisit peut-être pas tous les aspects de la situation, ses émotions, elles, sont bien réelles. Au fond d’elle-même, elle sait qu’une personne chère à son cœur s’en est allée et que le monde est un peu moins doux.
Précieux chapelet
« Grâce à ma petite-fille autiste, j’ai pu vivre un moment unique », confie Marie-Claude. Elle aussi garde ce jour comme un joyau dans sa mémoire. « L’instant le plus marquant a été son arrivée. Le pape qui marchait vers nous, lentement, entouré de gardes, mais si humain. Si proche. J’ai serré sa main. Moi, une grand-mère de Vacoas. Grâce à elle. Grâce à Amandine. Ce jour-là, j’ai vu ma petite-fille heureuse comme jamais. Et moi aussi. Le pape a regardé Amandine. Il l’a vue. C’est comme s’il nous avait dit : ‘Vous comptez’. Ce jour-là, on a existé un peu plus fort », souligne Marie-Claude.
La vie d’Amandine se compose de gestes simples et de routines rassurantes, rythmée par la musique qu’elle affectionne. « Actuellement en congé pour les vacances scolaires, elle a hâte de reprendre l’école. Elle s’ennuie », dit Marie-Claude.
La jeune femme vit auprès de sa mère, une femme discrète, courageuse et résiliente. Comme tant d’autres mères mauriciennes, elle affronte sans plainte les défis quotidiens que représente l’éducation d’un enfant différent. C’est avec elle qu’Amandine partage ses peines et ses joies, ses silences comme ses rires.
La disparition du pape est un deuil particulier pour la jeune femme. « Elle répète inlassablement : ‘Pape mort, pape mort’. Mais elle garde précieusement son chapelet, le contemple, le tient fermement dans ses mains. C’est comme si elle essayait de préserver un fragment de sa présence à jamais. »

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