Peu importe l’identité du prochain président des États-Unis, cette élection devrait avoir un impact sur Maurice. C’est l’avis de plusieurs observateurs qui avouent toutefois leurs appréhensions face à une éventuelle administration Trump.
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Quel impact Hillary Clinton ou Donald Trump pourrait avoir sur Maurice en cas de victoire à l’élection présidentielle américaine ? Les analystes et observateurs mauriciens sont unanimes : une victoire de Donald Trump serait synonyme d’ennuis, de manière directe ou indirecte. Impact monétaire, remise en cause des accords commerciaux, ralentissement de l’investissement mondial et incertitude généralisée... Autant de scénarii qui donneraient des sueurs froides à l’économie mauricienne.
Donald Trump tient un discours protectionniste. Il ne cache pas son aversion pour les accords commerciaux passés avec d’autres pays. Ce qui inquiète Milan Meetarbhan, ancien ambassadeur de Maurice aux Nations unies : « Je crois que s’il y a une remise en cause des accords commerciaux, une administration Trump pourrait remettre en cause tous les accords établis avec les pays en voie de développement, y compris Maurice. »
Doit-on craindre que l’African Growth and Opportunity Act (Agoa), principal accord commercial liant le continent africain aux États-Unis, soit également remis en cause ? Pas forcément, estime Rajiv Servansingh, consultant en investissements en Afrique. « En général, la position de Trump, c’est de fermer les frontières et punir les entreprises américaines qui investissent à l’étranger, reconnaît notre interlocuteur. Cela aurait un effet sur l’investissement en Afrique et à Maurice mais je ne crois pas qu’il touchera à l’Agoa. De manière générale, néanmoins, il y a plus de risques avec Trump. »
«Tous les moyens sont bons»
L’économiste Éric Ng est moins optimiste sur cette question. « En 2015, il y a eu une extension de l’accord jusqu’en 2025. Rien n’empêcherait une administration Trump de trouver une raison pour remettre cet accord en question. N’oublions pas que Madagascar avait déjà été évincé de l’Agoa pour non-respect des droits de l’homme. Le rapport du département d’État américain n’est guère flatteur pour Maurice dans ce domaine. En diplomatie, tous les moyens sont bons », prévient l’économiste.
« Le plus gros danger en cas de victoire Trump serait son impact sur le dollar, ajoute-t-il. Avec une victoire de Hillary Clinton, il est possible que la roupie se déprécie face au dollar. Inversement, avec Trump, la valeur du dollar chuterait. » L’impact sur les exportations mauriciennes, notamment textiles, pourrait être conséquent. « Le secteur est déjà sous la menace du Brexit. Si demain le dollar se dépréciait brutalement, ce serait encore plus grave », estime Éric Ng.
Rajiv Servansingh souligne, pour sa part, l’impact de l’élection présidentielle américaine sur l’investissement. Outre une politique punitive envers les entreprises américaines, il estime que l’effet psychologique serait aussi important. « Que ce soit l’un ou l’autre, l’effet psychologique sera immédiat sur l’économie mondiale. Tous les analystes prévoient une période d’instabilité en cas de victoire de Trump. Ils craignent un ralentissement de l’investissement et les bourses du monde entier en seront affectées. Cela risque d’aggraver les problèmes économiques. L’arrivée de Clinton est extrêmement souhaitable… »
Pour l’économiste Pramode Jaddoo, les deux candidats ont peu évoqué leur politique extérieure. « Il est donc difficile d’anticiper les répercussions des résultats de l’élection américaine. Néanmoins, ni pour l’un ni pour l’autre, il ne sera bon de changer de politique étrangère. Maurice a conclu des accords sur le long terme comme l’Agoa. Les États-Unis et Maurice ont de bonnes relations, je ne crois pas que le nouveau président des États-Unis changera tout ça. Quant à Donald Trump, je pense qu’il dit des choses dont il ne réalise pas les implications. Il propose des mesures radicales, mais cela restera sûrement des promesses électorales comme Barack Obama en a fait. Donald Trump joue au showman pour gagner des votes. Je ne pense pas qu’une fois au pouvoir, il se risquera à des changements radicaux. »
Rupture Radicale
L’expert financier Ajay Gujadhur, directeur d’AG Asset Management, se veut tout aussi rassurant quant à une victoire de Donald Trump. « La marge de manœuvre du milliardaire sera limitée par le Congrès. Ce qui est probable, c’est que l’élection d’Hillary Clinton apporte peu de changements à Maurice. Une victoire de Donald Trump pourrait affecter les accords commerciaux, bien que le Congrès ait son mot à dire. Si Trump taxe les produits importés de Chine, cela aura des répercussions et entraînera une récession mondiale qui affectera Maurice », estime-t-il.
« Nos exportations risquent d’être affectées par l’élection américaine », estime Lilowtee Rajmun, directrice de la Mauritius Export Association. « Hillary Clinton est en faveur de l’Agoa et du commerce extérieur. Si elle est élue, ce sera une bonne chose pour Maurice avec une continuité, voire un renforcement des relations commerciales avec l’Afrique. En cas de victoire de Donald Trump, il y a des incertitudes concernant le commerce extérieur. Il a menacé de mettre fin aux accords commerciaux et même de taxer les produits chinois. S’il lui est tout de même difficile d’aller en ce sens, car le Congrès dispose de beaucoup de pouvoir, il peut influencer les choses. Il risque d’avoir des impacts négatifs sur les renouvellements et les nouveaux accords commerciaux. S’il est élu, nous n’anticipons pas de baisses de nos exportations vers les États-Unis à court terme, mais il y aura une incertitude sur le moyen terme », confie Lilowtee Rajmun.
De manière plus globale, Milan Meetarbhan rappelle l’impact que devraient avoir les deux candidats sur la politique étrangère : « Trump a fait plusieurs annonces, laissant entrevoir une rupture radicale en matière de politique étrangère, notamment vis-à-vis de ses alliés de l’Otan. Quant à Clinton, si on peut s’attendre à une continuation de la politique étrangère américaine, elle pourrait se démarquer sur certains dossiers, comme sur la Syrie. Elle est plus interventionniste qu’Obama et au Moyen-Orient, Clinton est connue pour être très proche d’Israël. »
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