Ce samedi, on pourrait être fixé sur le sort des cinq Mauriciens, portés manquants en Arabie saoudite après la bousculade fatale du 24 septembre. La délégation mauricienne visitera un dernier hôpital en vue de retrouver Halima Nujurally, Swaley Janoo, son épouse Mehzabeen Janoo et ses deux sœurs Saida Janoo, et Zainobee Kaudeer, née Janoo.
Muslim Kaudeer (76 ans) garde toujours l’espoir que son épouse, Zainobee Kaudir (63 ans), sera retrouvée saine et sauve, en compagnie de trois autres proches disparus. « Ils sont partis ensemble et retourneront ensemble », espère-t-il. Avant d’admettre que le suspense devient stressant : « Il n’est pas facile de vivre dans cette attente. C’est un long suspense angoissant. Nous avons perdu l’appétit et passons des nuits blanches. J’arrive difficilement à fermer l’œil », confie cet ancien chauffeur de la CNT. Souffrant de troubles cardiaques, il explique que son épouse, une couturière, a économisé sou par sou pour accomplir le grand pèlerinage à La Mecque.
Le couple Muslim et Zainobee Kandir a quatre enfants : trois filles et un garçon et des petits-enfants. Alors qu’il réside à Rose-Belle, Muslim vit chez sa fille Mashuda, à Grand-Bois, depuis que sa femme est partie pour La Mecque. « La dernière fois que j’ai parlé à maman, c’était dans la soirée du 21 septembre. Elle avait parlé à mon père, mes deux enfants et moi. Elle m’avait dit qu’elle n’appellerait pas durant son séjour à Mina. Je souhaite de tout cœur qu’ils soient tous vivants », confie Mashuda.
Sakinah Janoo: « Nous sommes très bouleversés »
Sakinah Janoo, 59 ans, est peinée par la disparition de sa belle-sœur Saida Janoo, qui habite à l’étage de sa maison. « Depuis cette bousculade, notre vie a basculé. Nous vivons dans une attente pénible. À tel point qu’un proche a voulu se rendre en Arabie saoudite pour participer aux recherches. Ce n’est pas une mince affaire, de le faire en solo », dit-elle. Son neveu Jameer (17 ans) qui habite chez Saida pour que Sakinah ne se sente pas seule, dit vivre un véritable calvaire. « Li kuma dir mo mama. Mo bien trist. Mo espéré ki li rent la kaz vit », dit-il. Swaley Abdool Janoo, 63 ans, ex-employé de la DWC, et son épouse Zabeen Janoo, 57 ans, employée dans l’administration de la compagnie CNT, habitent Chemin-Grenier. Le couple a deux enfants âgés d’une trentaine d’années. L’un est établi en Belgique. Depuis, l’annonce de ce drame, il a fait le déplacement à Maurice. Swaley a trois sœurs : Saida, 54 ans, Israbee Beehary, 71 ans, et Zainabee Kaudir, 63 ans, habitant de Rose-Belle.Nizam Janoo: « Nous ne dormons plus »
«Nous ne dormons plus depuis que nos proches sont portés manquants. Nous ne faisons qu’attendre. Nous ne pouvons plus manger. Nous vivons dans une angoisse extrême. » C’est en ces termes que Nizam Janoo, frère de Swaley Janoo porté manquant en Arabie saoudite, décrit l’état d’esprit des membres de sa famille. Face à la presse, Nizam Janoo explique qu’il s’attendait pas à un tel drame. Mais la famille se console en se disant que c’est la volonté du Créateur. « C’est Lui qui en a décidé ainsi. Cependant, nous souhaitons savoir ce qui est arrivé à nos proches. Sont-ils dans un hôpital ou sont-ils des ‘shahid’ ? » Les familles Janoo et Kaudeer lancent un appel aux Mauriciens. « Je vous demande de prier pour nos quatre proches qui sont toujours introuvables. Ce sont vos prières qui pourront nous aider », soutiennent-ils. Par ailleurs, Nizam Janoo indique qu’il reçoit régulièrement des nouvelles de sa sœur Israbee Beeharry. « Elle est non seulement blessée, mais aussi traumatisée. Elle avait perdu la parole pendant environ une heure. Raison pour laquelle, nous n’arrivons pas à lui poser trop de questions sur ce qui s’est exactement produit. Elle a dû marcher sur plusieurs cadavres. Elle rentre au pays le samedi 10 octobre. Nous allons l’attendre pour en savoir plus. » Nizam Janoo ajoute qu’après la bousculade, ils ont en vain tenté de joindre Swaley Janoo et de Zainobi Kaudeer au téléphone, mais personne n’a répondu. « Tout dernièrement quand nous avons appelé sur le cellulaire de ma sœur Zainobi Kaudeer, quelqu’un a répondu mais parlait une langue que nous ne comprenions pas. Il se peut qu’il ait ramassé le téléphone portable », souligne Nizam Janoo.Shaffiy Nujurally: « C’est une situation difficile »
Cet habitant de Plaine-Verte est toujours sans nouvelles de sa mère Halima Nujurally (62 ans) depuis le tragédie survenue à Mina. Son frère Nissar Nujurally (27 ans) a, lui, eu plus de chance. Alors qu’il était porté manquant, il a finalement été retrouvé au lendemain du drame, soit vendredi soir. « Je lui ai brièvement parlé au téléphone jeudi. Il se trouve à son hôtel à Madina. Il est très faible. C’est à peine s’il arrive à parler. De plus, il dit ne plus se souvenir de ce qui s’est passé lors de la bousculade meurtrière », indique notre intervenant. Shaffiy Nujurally dit attendre jusqu’à vendredi soir pour avoir des nouvelles de sa mère. « J’attends une réponse positive de la délégation mauricienne en Arabie saoudite qui multiplie les recherches. C’est une situation difficile. Fode mo zwen mo mama pu mo kapav revinn normal … », souligne-t-il.Fareed Jaunboccus de la Hajj Mission: « Le nombre de morts peut dépasser les 3 000 »
À ce jour, le bilan officiel de morts à Mina est de 769. Certaines prévisions officieuses indiquent qu’il pourrait dépasser les 3 000 victimes. C’est ce qu’a annoncé vendredi à la presse, Fareed Jaunboccus, membre de la Hajj Mission, qui est rentré au pays, mardi.
« Avant mon retour, les membres de la Hadj Mission avaient vérifié 1 227 photos de personnes décédées le 24 septembre. Aucun Mauricien figure sur ces photos. Il reste six camions frigorifiés contenant des cadavres qui n’ont pas encore été identifiés. Ce qui fait que le nombre de morts pourra dépasser les 3 000, selon des prévisions sur place », explique Fareed Jaunboccus.
L’espoir que les cinq Mauriciens soient toujours vivants subsiste, selon lui, car sur les 20 hôpitaux qui ont accueilli les blessés, il en reste un à visiter. Ce samedi, les membres de la Hajj Mission se rendront à Taif pour la dernière vérification. Dans un premier temps, les autorités saoudiennes misaient sur les empreintes digitales pour identifier les victimes. Elles auront désormais recours à des tests ADN pour les identifier.
« Nous entreprendrons tout ce qui est nécessaire pour faire parvenir aux autorités saoudiennes l’ADN d’un proche de Mehzabeen Janoo, l’épouse de Swaley Janoo. Quant à ce dernier et ses deux sœurs portées manquantes, l’ADN de leur sœur Israbee Beeharry, qui se trouve en Arabie saoudite, sera utilisé pour les identifier s’ils se trouvent parmi les victimes », poursuit Fareed Jaunboccus.
[panel contents="La bousculade à Mina qui a fait plus d’un millier de morts et plusieurs centaines de blessés serait-elle l’œuvre de terroristes ? C’est l’énigme que tenteront d’élucider les autorités saoudiennes. Selon Fareed Jaunboccus, les autorités saoudiennes n’écarteraient pas la thèse d’un attentat terroriste. Un comité d’enquête, sur ordre du roi Salman, a d’ailleurs été institué pour faire la lumière sur ce drame. Pour appuyer leurs dires, trois raisons ont été avancées par les autorités saoudiennes. Primo, les Iraniens qui figurent parmi le plus grand nombre de victimes ne devaient pas, selon le gouvernement arabe, se trouver dans la ruelle où le drame s’est produit (ndlr. rue 204). Secundo, alors que les autorités saoudiennes commençaient à peine avec l’exercice d’identification des pèlerins décédés, le gouvernement iranien avait, d’ores et déjà, annoncé plusieurs centaines de victimes parmi ses compatriotes venus accomplir le Hajj. Tertio, les Iraniens auraient emprunté une voie à sens unique. « Ce faisant, chaque pèlerin est devenu un suspect aux yeux de l’Arabie saoudite, ce qui a compliqué quelque peu les procédures avant qu’un corps puisse être inhumé. En effet, une fois identifié, il y a un exercice de contre-vérification, des tonnes de paperasse doivent être remplies avant que l’autorisation ne soit donnée pour que le corps puisse être enterré », indique Fareed Jaunboccus." label="Les raisons… " style="info" custom_class=""]
Fareed Jaunboccus souligne que les membres de la Hajj Mission travaille sans relâche. « Depuis la bousculade de Mina, nous dormons à peine quatre heures par jour. Nous arpentons les rues, les hôpitaux et les morgues à la recherche des Mauriciens initialement disparus. Ils faisaient partie d’un groupe de pèlerins qui ont faussé compagnie à notre délégation. D’après notre enquête, ce sont des pèlerins sous la charge de plusieurs organisateurs. Malheureusement, pour la Muslim Youth Federation, ce sont ses pèlerins qui ont été pris dans la bousculade », fait-il ressortir.
La position adoptée par la Hajj Mission est la suivante : « Until proven otherwise, the missing are still considered to be alive and we should spare no effort to locate them ». « Nous avons bien fait comprendre à tous les opérateurs qu’il ne s’agissait pas du problème d’un opérateur en particulier, mais de tous les Mauriciens présents. Il fallait la coopération de tous pour être vraiment efficace dans nos recherches. C’est ainsi que nous avons commencé, aidés des autres opérateurs, la tournée des hôpitaux et des morgues pour retrouver les 15 Mauriciens manquants. Leur nombre est redescendu à 5, après que les 10 autres ont été retrouvés. Nous répétons l’exercice tous les jours », poursuit-il.
Les Peerboccus rapatriés demain
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Les deux membres de la famille Peerboccus de Vallée-Pitot seront rapatriés dimanche. C’est à bord du vol d’Emirates Airline qu’Ally (41 ans) et sa mère Jamila (75 ans) regagneront Maurice. Tous deux étaient portés manquants à la suite de la bousculade survenue à Mina.
Ce n’est que le lendemain après-midi, que mère et fils ont été retrouvés. Si Ally Peerboccus était sain et sauf, sa mère, en revanche, souffre de multiples fractures aux côtes. « D’où notre décision de les rapatrier afin que la mère puisse bénéficier des traitements nécessaires au plus vite. Ils quittent Jeddah samedi et arriveront à Maurice dimanche, en transitant par Dubayy », explique Anwar Figue, membre de la Muslim Youth Federation (MYF).
Deux autres Mauriciens sont hospitalisés en Arabie saoudite. Il s’agit de (Mme) Maudarboccus qui se trouve à l’hôpital King Faisal à Riyadh et dont l’état de santé est préoccupant. Amjah Aumeerally (65 ans) est l’autre Mauricien hospitalisé. Il devrait incessamment quitter l’hôpital King Abdulaziz.
Showkutally Soodhun a aussi annoncé qu’une série de mesures a été prise pour accueillir les pèlerins à l’aéroport. « J’ai demandé à la police de ne pas causer de contrariété aux hadjis lorsqu’ils fouleront le sol mauricien. Nous avons aussi pris les dispositions nécessaires pour détecter tout cas de forte fièvre et si nécessaire, une équipe médicale sera en stand-by. Elle prodiguera les soins nécessaires à ceux qui en auront besoin et transportera les plus malades à l’hôpital Jawarharlal Nehru, où une salle leur sera dédiée. Pour ceux qui sont affectés moralement, ils bénéficieront d’un soutien psychologique », a conclu le Premier ministre suppléant.
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Samioullah Lauthan: « Les autorités saoudiennes prennent le relais »
Avant de prendre l’avion pour Médine en Arabie saoudite vendredi soir, les membres de la Hajj Mission ont tenté une dernière fois de retrouver les cinq pèlerins mauriciens portés manquants à La Mecque. Ainsi, à partir du samedi 3 octobre, ce sont les autorités saoudiennes qui prendront le relais, affirme Samioullah Lauthan, responsable de la délégation mauricienne et président du Centre culturel islamique (CCI). « Nous sommes dans un état de choc. Mais il y a une solidarité entre les organisateurs et les pèlerins. La ferveur religieuse a repris le dessus. Quand on le voit dans une perspective islamique, il est considéré comme un honneur de mourir dans la Terre sainte. C’est le sentiment qui prédomine », a affirmé Samioullah Lauthan sur Radio Plus.Soodhun souhaite se rendre en Arabie saoudite
Le ministre Showkutally Soodhun prévoit de mettre le cap sur l’Arabie saoudite lundi, au cas où les Mauriciens portés manquants ne seraient toujours pas retrouvés. Il a déjà fait part de son intention à l’ambassadeur de l’Arabie saoudite basé en Afrique du Sud. Une requête a aussi été présentée pour que Showkutally Soodhun puisse rencontrer les ministres du Hajj et de la Santé de l’Arabie saoudite ainsi que le responsable de la Muassassa, organisme responsable de l’organisation du pèlerinage avec Samioullah Lauthan, président du Centre culturel islamique. « Je sais qu’il y a pas mal de restrictions, mais j’espère sincèrement que mon statut de ministre apportera un plus dans les recherches et permettra de faire bouger les choses. Nous prenons cela très au sérieux », a souligné Samioullah Lauthan.Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !