Le salut de la presse passe par un modèle économique viable pour le contenu en ligne. Pour cela, Laurent Joffrin estime que la presse doit convaincre ses lecteurs de payer pour des articles en ligne.
Pourquoi trouve-t-on normal de payer pour son pain chez le boulanger, mais rechigne-t-on à payer pour de l’information en ligne? Cette normalisation du tout-gratuit serait le principal défi de la presse pour les années à venir. C’est la réflexion faite par Laurent Joffrin, directeur du quotidien français ‘Libération’. Il animait une conférence à l’intention des journalistes mauriciens, mardi, à l’hôtel Hennessy Park, à Ébène, sur invitation du Media Trust. À l’heure où l’information en ligne circule partout gratuitement, la presse se doit de refaire l’éducation de son lectorat, pour l’amener à payer pour le contenu digital, estime le conférencier.
« Nous sommes à l’âge d’or de l’information. On n’a jamais été aussi bien informé. Les médias se portent bien », a déclaré Laurent Joffrin au début de son intervention. Un discours qui aurait pu induire en erreur sur la situation réelle de la presse, car le directeur de Libération précise toute de suite après : « Mais les bases matérielles sont en train de se dérober. » La presse, dit-il, si elle produit encore de la qualité, fait face à un crise économique plutôt que technologique. « Il y a un coupable dans toute cette affaire : c’est la gratuité », conclut-il.
Laurent Joffrin explique, en substance, que le lectorat pour le journal imprimé baisse alors que le contenu web prend son essor et que la logique voudrait que la presse en ligne monétise ce phénomène grâce à la publicité. Mais cela peine à décoller. C’est la faute aux géants comme Google ou Facebook, choix plus logiques pour les annonceurs. Ce qui ne laisse qu’une option aux journaux pour rentabiliser leur contenu en ligne : demander aux lecteurs de payer.
« On est devant un défi commun : à terme, il faut faire payer notre activité de journaliste. Toute la presse française en est venue à la même conclusion », affirme Laurent Joffrin. ‘Le Monde’, suivant le modèle du ‘New York Times’, a instauré un paywall sur son site, un système qui limite le nombre d’articles qui peut être consulté gratuitement en ligne. C’est un modèle similaire que Libération devrait suivre à l’avenir : «Nous avons trois à quatre millions de visiteurs uniques par mois. Parmi, 150 000 personnes se connectent tous les jours. On va essayer de les reconquérir. »
Parmi ces 150 000 lecteurs, ‘Libération’ espère convaincre au moins 50 000 de payer pour avoir un accès illimité à son site. «Ça va être long. À mon avis, il y en a pour dix ans », prévient toutefois le directeur de Libération.
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