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Sécurité maritime: la garde côtière nationale en eaux troubles

Le MV Benita a lancé un appel de détresse dans la nuit du jeudi 16 au vendredi 17 juin
Y a-t-il des failles dans le fonctionnement de la National Coast Guard (NCG) ? C’est la question d’actualité depuis le naufrage du MV Benita au Bouchon, la NCG ayant mis six heures pour réagir. Pourquoi la National Coast Guard (NCG) n’a-t-elle pas lancé les opérations immédiatement après l’appel de détresse du MV Benita, dans la nuit du jeudi 16 juin au vendredi 17 juin ? C’est six heures après qu’elle a réagi. Si les versions contradictoires du capitaine du navire et de la NCG viennent davantage brouiller les pistes, certaines sources approchées par Le Défi Plus sont moins convaincantes. Le mauvais temps et l’heure tardive sont avancés comme explications. Des éclaircissements qui ne sont pas justifiés, selon d’autres experts que nous avons contactés. Le fait que le MV Benita ait disparu des radars ou qu’il ait dévié de la trajectoire qu’il était censé emprunter aurait dû suffire à déclencher les opérations. « En l’absence de communication, on ignorait quelle était leur intention », explique une source de la NCG quant aux six heures qui se sont écoulées entre l’appel de détresse et l’intervention des officiers. Selon elle, le MV Benita aurait fini par échouer sur les récifs vu qu’il était proche de nos côtes. Conclusion : la NCG n’aurait pas pu intervenir à temps de toute façon. Notre source préfère s’interroger sur le manque de réactivité du capitaine. « Il est vrai qu’il n’y avait plus d’électricité à bord, mais il y avait d’autres moyens de réagier, comme utiliser des fusées de détresse, par exemple. » Ce qui, selon notre source, aurait facilité la localisation du navire, d’autant que son Automatic Identification System (AIS), permettant de le localiser sur les radars du poste de la NCG de Souillac, avait été désactivé.

« On aurait pu mieux faire »

La désactivation du système ne justifierait-elle pas une sortie de la NCG ? « Normalement, on essaie d’entrer en contact avec le navire dans ce genre de situations. Mais on ignorait où se trouvait exactement le navire. Il était donc préférable d’attendre que la communication soit rétablie », explique notre source. Elle souligne que la région du Bouchon est une zone où il est difficile de naviguer, ce qui aurait incité la NCG à faire preuve de prudence. « La mer était mauvaise ce soir-là en plus. »
Une source des autorités portuaires, qui a souhaité garder l’anonymat, rejette ces arguments. « On aurait pu mieux faire. Ces explications ne tiennent pas la route. Un radar peut détecter tout ce qui est sur l’eau, même si l’AIS est désactivé. » Notre source estime qu’avec ses radars, qui couvrent tout le littoral du pays, la NCG aurait dû être en mesure de déterminer qu’il y avait un problème et qu’elle devait intervenir. Un ancien membre du conseil d’administration de la Mauritius Ports Authority (MPA), contacté par Le Défi Plus, montre, toutefois, du doigt la capitainerie et les autorités portuaires. « En 2008, le port s’est doté d’un nouveau radar capable d’indiquer la position des navires en temps réel, vu qu’il y a toujours une personne qui scrute les écrans. » Cette personne, poursuit notre source, aurait dû constater que le MV Benita avait dévié de sa trajectoire. Elle précise qu’il aurait dû y avoir une réaction immédiate au moment où l’AIS a été désactivé.

Collision mortelle dans le port: octobre 2014

Le vendredi 31 octobre 2014, un incident se produit dans zone portuaire. Il coûte la vie à deux membres de la NCG, qui se noient près du Quai D. Un remorqueur de la Mauritius Ports Authority était entré en collision avec le Heavy Duty Boat, aux alentours de 23 heures. Le timonier du remorqueur avait déclaré qu’il n’avait pu éviter la collision avec le navire de la NCG, qui serait soudainement apparu devant lui.

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Shekur Suntah, directeur de la MPA, nie toute responsabilité dans l’affaire. « Le port est uniquement responsable de la zone portuaire qui s’étend d’Albion à Baie-du-Tombeau. Ce qui représente à peu près trois milles marins. Au-delà, c’est sous la responsabilité de la NCG. » Que se passe-t-il si le radar du port détecte un incident dans une zone qui ne tombe pas sous sa juridiction ? « Nous avons une ligne de communication directe avec la NCG et nous pouvons les prévenir sur-le-champ », explique le capitaine Benoît Barbeau, Port Master.  
 

Qui surveille quoi ?

La National Coast Guard (NCG) est équipée de cinq Coastal Surveillance Radar Systems (CSRS) qui, comme leur nom l’indique, servent à surveiller la côte jusqu’à 12 milles marins. Un radar de ce type se trouve aux postes de la NCG de Souillac, d’Albion, de Pointe-du-Diable, de Grand-Gaube et du Morne. Quatre à cinq officiers sont présents dans chaque poste durant la nuit. Si des sorties en mer sont nécessaires, ce sont, en général, environ trois d’entre eux qui s’y attellent. Les informations recueillies à travers ces cinq radars sont centralisées au quartier général de la NCG, à Port-Louis. Depuis 2008, le port est doté d’un radar Automatic Identification System pour contrôler le trafic de navires dans sa zone. Toutefois, la juridiction des autorités portuaires s’étend uniquement d’Albion à Baie-du-Tombeau. « Avec le radar, on peut voir jusqu’à l’île Ronde et Le Morne. Mais on ne peut rien voir de l’autre côté de l’île » , explique le capitaine Benoît Barbeau. La capitainerie est donc en mesure de surveiller toute la côte ouest.  Au port, la surveillance des écrans radar se fait aussi sur une base permanente. Plusieurs équipes se relaient pour qu’il y ait toujours quelqu’un qui garde un œil sur les écrans. Outre la surveillance radar, la NCG effectue des patrouilles régulières en mer. Toutefois, les officiers choisissent certaines zones en particulier, surtout celles où le trafic est plus important. En l’occurrence, dans le Nord du pays, à Rivière-Noire et à Grande-Rivière-Sud-Est.  Nos sources affirment que la NCG dépend entièrement de renseignements de la police pour intercepter les bateaux participant à des trafics de drogue.  
 

Les navires à problèmes de ces dernières années

[row custom_class=""][/row] Cemrem: août 2009 Ce cargo panaméen, en provenance de Taïwan, s’est retrouvé bloqué à Port-Louis durant six mois, à la suite d’un contentieux entre ses armateurs et leurs partenaires en affaires. Après un mois, le navire a commencé à prendre l’eau, ce qui faisait craindre une catastrophe écologique, le navire transportant au moins 320 tonnes de fioul. Il acheminait aussi 15 000 tonnes de marchandises. MV Angel 1: août 2011 Il s’agit d’un navire panaméen, qui s’est empalé sur les récifs de Poudre-d’Or, à 2,7 milles marins, il y a cinq ans. Il transportait 32 000 tonnes de riz à destination de la Côte d’Ivoire. Le navire y est resté pendant trois mois. Dans ce cas précis, notre source de la NCG explique que l’intervention a été prompte. « Il y avait un moteur en panne et le navire avait dérivé. Nous avions essayé de décanter la situation, mais sans succès », raconte cette source.
 

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