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Roupie : une nouvelle politique monétaire pour s’attaquer au problème

La nomination d’un nouveau gouverneur de la Banque de Maurice s’inscrit dans la stratégie qui vise à redonner de la valeur à la roupie.

La valorisation de la roupie figure parmi les priorités du nouveau gouvernement dirigé par Navin Ramgoolam. D’ailleurs, l’économiste Rajeev Hasnah, sur Radio Plus en février avait affirmé que 85 % de l’inflation est due à la dépréciation de la roupie. Le nouveau Premier ministre a écarté Harvesh Seegoolam de la direction de la Banque de Maurice. Toutefois, le redressement du pouvoir d’achat repose-t-il uniquement sur le renforcement de la roupie ?

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Le Premier ministre Navin Ramgoolam a dénoncé les choix économiques de son prédécesseur. Il a expliqué la décision de remplacer Harvesh Kumar Seegoolam par Rama Sithanen à la tête de la Banque de Maurice (BoM). « Mo pa kompran kifer la Banque de Maurice ti pe depresie roupi. Akoz sa monn nom nouvo gouverner Rama Sithanen », a-t-il avancé. Sa déclaration reflète son mécontentement face à une politique monétaire qu’il qualifie de nuisible. Elle a provoqué une dépréciation accélérée de la roupie après les élections générales.

Dans une interview accordée au Défi Plus après sa nomination, Rama Sithanen souligne d’ailleurs que « nous devons tout faire pour arrêter la dépréciation de la roupie, qui provoque l’inflation et la baisse du pouvoir d’achat de nos concitoyens ». 

Selon Navin Ramgoolam, cette dévaluation était délibérée, visant à maintenir artificiellement à flot les finances publiques au détriment du pouvoir d’achat des Mauriciens. 

Les conséquences d’une roupie dévaluée

Pour l’économiste Takesh Luckho, la stratégie économique du gouvernement précédent reposait sur une dépréciation volontaire de la roupie, permettant ainsi de maximiser les recettes fiscales. « C’est en raison de cette dépréciation voulue de la roupie que nous avons atteint des revenus records de Rs 146 milliards », explique Takesh Luckho. Si cette approche a temporairement renfloué les caisses de l’État, elle a aussi affaibli la capacité d’achat des ménages et contribué à l’augmentation des coûts des importations, notamment alimentaires.

Cette situation, couplée à une inflation persistante, a accru les frustrations parmi les citoyens. Navin Ramgoolam, conscient de ces pressions, semble vouloir rompre avec ces pratiques. Il aligne ses actions sur les promesses électorales de l’Alliance du Changement : la stabilisation de la roupie et la hausse du pouvoir d’achat.

Nouvelle politique monétaire

La désignation de Rama Sithanen en tant que gouverneur de la Banque de Maurice est perçue comme un choix stratégique. Pour Takesh Luckho, le remplacement du gouverneur de la Banque de Maurice était capital. Car le programme que l’Alliance du Changement veut mettre en place est diamétralement opposé à la politique économique prônée par Pravind Kumar Jugnauth et son gouvernement lors des cinq dernières années.

Rama Sithanen, qui a déjà occupé le poste de ministre des Finances, a ainsi pour mission de donner un nouveau dynamisme à la roupie. « Le nouveau gouverneur va apporter une nouvelle philosophie monétaire en redonnant de la valeur à la roupie », soutient Takesh Luckho. Cependant, cette tâche ne sera pas aisée, en raison des pressions externes. Par exemple, il y a la récente montée en valeur du dollar américain à la suite de l’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis.

Stratégie économique repensée

Comme le souligne Amit Bakhirta, fondateur d’Anneau dans un entretien accordé au Supplément Économie du 12 novembre dernier : « La monnaie d’un pays est le premier et principal indicateur de sa prospérité socio-économique. » Une monnaie plus forte implique une maîtrise raisonnable de l’inflation importée, en moyenne, sur le cycle macroéconomique à long terme. « Ce qui signifie que le pouvoir d’achat soit raisonnablement bien protégé, que les investissements des investisseurs nationaux et étrangers génèrent véritablement des rendements positifs (ajustés de l’inflation et des conversions de devises) et que les dirigeants soient exemplaires et dignes de confiance », ajoute-t-il. Amit Bakhirta affirmait déjà en mars 2023 dans le Défi Quotidien que « la roupie a perdu 76 % de sa valeur face au dollar depuis 2002 ».

Pour redonner de la valeur à la roupie, il sera essentiel de renforcer les réserves de devises étrangères. Selon Takesh Luckho, cela passe par une diversification des sources de revenus, incluant la relance des arrivées touristiques et l’attraction d’investissements étrangers. 

De plus, Takesh Luckho considère la baisse des prix des carburants comme un levier immédiat pour soulager les ménages. Cependant, il souligne que cette baisse devra être accompagnée de mécanismes clairs pour s’assurer qu’elle se reflète dans les prix des biens et services de consommation courante.

Mauritius Investment Corporation

La réforme de la Mauritius Investment Corporation (MIC) figure également parmi les priorités. Pour Takesh Luckho, la MIC, souvent critiquée pour son manque de transparence, doit être entièrement séparée de la Banque de Maurice. « Je pense que dans l’optique où Maurice pourrait être appelé à recevoir de nouveaux revenus, notamment liés à la location de Diego Garcia, la MIC pourrait jouer un rôle clé pour gérer ces fonds de manière optimale », avance Takesh Luckho. Il plaide pour une révision en profondeur du rôle de cet organisme, afin qu’il devienne un outil de développement économique durable. Au lieu d’être un simple mécanisme de soutien financier.

 

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