L’éducation est un outil puissant d’ingénierie sociale. Elle détermine dans une large mesure le modèle de société que nous voulons créer. L’éducation peut soit libérer les gens, soit les rendre serviles.
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Les véritables objectifs des administrateurs de l’éducation sont souvent dissimulés derrière la façade d’une pléthore d’objectifs reluisants, bien intentionnés et attrayants, tels que : un accès égal à l’éducation, éducation gratuite pour tous, une éducation de niveau mondial pour tous les enfants, aucun enfant ne doit être laissé pour compte, l’égalité de chances dans l’éducation…
De tels slogans ne sont qu’un camouflage et cachent très efficacement les véritables intentions. Les parents sont plus souvent amenés à croire aux avantages illusoires qui leur sont miroités.
L’éducation est un processus qui dure la vie entière. L’enfant commence à apprendre dès sa naissance. Il est exposé à l’atmosphère, aux sensations de chaleur et de froid, aux sons, aux goûts et aux visuels. L’enfant apprend et s’adapte aux nouvelles situations sans aucune aide extérieure. Il est né avec la capacité d’apprendre, de comprendre et d’assimiler. La quantité et la qualité de connaissances et de compétences, qu’elles soient cognitives ou affectives, qu’il acquiert sont en fonction de la quantité et de la qualité de phénomènes de vie auxquels il est exposé. Le développement de l’intelligence dépend, en majeure partie, de la quantité de stimuli auxquels l’enfant est exposé. Le processus d’apprentissage s’améliore et devient plus efficace dans un environnement doté d’événements, d’interactions et d’activités diverses.
Dans une société équitable, chaque enfant a la possibilité de grandir et d’apprendre dans un environnement éducatif donnant des chances égales à tous. Cela exige nécessairement le même niveau d’infrastructures dans toutes les écoles, ainsi qu’un personnel hautement qualifié et formé à chaque niveau de l’enseignement, à commencer par l’enseignement préscolaire.
Des éducateurs qualifiés et engagés au niveau du préscolaire sont une condition sine qua non pour que l’éducation soit équitable et efficace.
Un programme scolaire peut être orienté ou produit. Un programme axé sur les produits ressemble beaucoup à une unité de fabrication, dans laquelle chaque entrée est transformée en sortie souhaitable ou indésirable.
La sortie souhaitable monte facilement l’échelle sociale et économique et les résultats indésirables (la majorité incidemment) forment le rejet. Ce concept d’éducation procède par élimination et exclusion.
Programme
Un programme d’éducation peut soit (i) considérer l’apprentissage comme un produit pour lequel des examens de fin de cycle sont déterminants, ou bien (ii) mettre l’accent sur les processus et en même temps valoriser les compétences et les connaissances acquises à différentes étapes de la vie scolaire de l’enfant. Dans cette dernière approche, l’apprenant est reconnu pour les différents types de compétences acquises lors de la scolarité. Le système repose essentiellement sur un mode d’évaluation continue, plutôt que sur un examen final, qui a lieu à la fin de treize ans de scolarité.
Modus operandi
Le programme du système scolaire local n’a jamais été énoncé publiquement. Nous avons été vaguement sensibilisés à une formation généraliste jusqu’à l’âge de treize ans. Pour les quatre années restantes, tous les étudiants suivent un programme défini par l’université de Cambridge. Les objectifs d’apprentissage et les résultats escomptés des élèves sont énoncés dans le manuel de Cambridge et non par l’autorité éducative mauricienne.
Un des objectifs très implicites et bien connus est d’éliminer les élèves à différents stades du système scolaire. La discrimination commence au préscolaire, sous la forme de bonnes écoles dotées d’infrastructures de qualité supérieure et d’éducateurs qualifiés bien rémunérés, par rapport aux écoles de niveau médiocre ayant des éducateurs peu payés et formés de manière rudimentaire.
L’élimination se poursuit par le modèle d’évaluation prescrit : échecs au CPE/AFPC, échec au Cambridge School Certificate, élimination des élèves ayant obtenu moins de quatre crédits et coup final au Higher School Certificate. 65 % des élèves sont éliminés. Le résultat est 35 % d’efficacité pour les milliards dépensés. Ajoutons à cela les dépenses liées aux leçons particulières et les dépenses encourues pour les manuels et autres matériels scolaires.
Une République doit nécessairement concevoir son propre programme scolaire. Celui-ci doit énoncer publiquement ses objectifs et les méthodes pour les atteindre. L’objectif primordial devrait être de fournir une éducation équitable menant à une société dépourvue d’inégalité, de discrimination, de préjugés, de corruption et de malversations.
Les établissements, du préscolaire au tertiaire, doivent être d’un excellent niveau ; les enseignants doivent posséder une maîtrise en pédagogie et être traités sur un pied d’égalité, avec une échelle de rémunération unique.
Les écoles doivent avoir l’autonomie pour créer leurs programmes. Le mode de suivi des écoles devrait relever d’un organisme indépendant, doté d’un personnel qualifié et expérimenté, habilité à sanctionner les écoles et les enseignants.
Évaluation
Le présent système d’évaluation est archaïque, obsolète et totalement à l’écart des attentes des citoyens de la République. Les décideurs ne doivent pas se cacher derrière le voile de la croissance économique et de l’existence illusoire d’une population riche.
Il est inconcevable de laisser tomber un étudiant après treize ans de scolarité, avec un système d’examen extrêmement préjudiciable. Un examen ne peut être le but de l’éducation.
L’éducation doit aller au-delà des examens. Un système scolaire doit promouvoir toutes les qualités inhérentes à un enfant. Jusqu’à présent, l’accent a été mis sur une des facultés de l’enfant, à savoir la mémoire, et la notion d’intelligences multiples a été complètement négligée. Un examen de deux à trois heures ne peut pas décider de l’avenir d’un étudiant.
Le système d’évaluation a besoin d’une refonte. Il doit exister un système d’évaluation continue fiable et standard, qui prenne en compte tous les aspects de la croissance de l’enfant au sein du système. Les éducateurs ont généralement plus d’autonomie pour mener de telles évaluations.
Il va sans dire que les éducateurs doivent faire preuve d’intégrité et de normes morales élevées. Les syndicats auront pour rôle de préserver la qualité et l’efficacité de leurs membres. Le système d’évaluation évaluera et corrigera en permanence l’acquisition d’un ensemble de compétences, à savoir physiques, artistiques, intellectuelles, affectives, sociales, citoyennes, créatives, oratoires et de résolution de problèmes.
Un aspect important du moyen d’enseignement et d’évaluation doit être abordé de manière urgente : la langue utilisée pour l’enseignement et l’examen. Les sciences humaines, les sciences, les mathématiques et les matières commerciales, ainsi que techniques, peuvent être apprises dans toutes les langues.
Cette langue ne doit pas nécessairement être l’anglais. Ce doit être la langue que l’enfant comprend le mieux. Dans le système d’examen actuel conçu par Cambridge, un enfant passe simultanément deux tests : s’il prend un examen en mathématiques, il est d’abord examiné en anglais, puis en mathématiques. Si sa maîtrise de l’anglais est faible, il échoue automatiquement en mathématiques, même s’il maîtrise bien les mathématiques. Il en va de même pour les autres matières.
Il est temps que nous réfléchissions à faire de l’anglais une langue seconde. Cela ne diminuerait aucunement la maîtrise de la langue par les Mauriciens, ni l’accès aux emplois dans d’autres pays. Il est également grand temps de nous débarrasser du complexe créole et de proclamer notre fierté d’être des Mauriciens.
Nous devrions d’abord nous préoccuper des besoins des étudiants pour grandir en tant qu’êtres humains, quel que soit leur langage. Et ne pas utiliser des emplois hypothétiques à l’étranger comme excuse.
Nous éduquons et formons nos enfants à se prendre en charge et à prendre soin des personnes âgées, grâce à un système de retraite. Si tous ceux qui subissent ce système d’élimination actuel partent à l’étranger, qu’adviendra-t-il du système d’intelligence collective, d’économie et de retraite ?
Ramparsad Mungar
(de la Managers of Private Secondary Schools Union)
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