Il se fait rare le temps où la lecture était un passe-temps pour les jeunes. Les romans et autres œuvres d’auteurs semblent de moins en moins attirer leur attention.
Publicité
Aldo Amic-Léon, enseignant dans un établissement secondaire, explique que la signification de la lecture a considérablement évolué. « Les jeunes ont accès à beaucoup plus de textes, mais ce n’est pas pour autant qu’ils lisent plus. En fait, ils lisent plus sur les réseaux sociaux où l’on retrouve des textes courts, alors que s’asseoir et lire un livre d’une seule traite est une tout autre histoire. Pourtant, ils disposent de beaucoup de temps libre », dit l’enseignant.
Il ajoute qu’il y a plusieurs tentatives pour faire les jeunes reprendre goût à la lecture, comme la bibliothèque scolaire ou encore le Book Nest qui permet l’échange de livres par région, « mais cela n’aboutit à rien dans certains cas ». « De plus, de nos jours, certains livres sont inaccessibles étant hors de prix. Dans le cursus scolaire, il y a très peu de livres contemporains. C’est pourquoi les jeunes ne s’identifient pas aux livres sélectionnés et c’est un vrai handicap pour les élèves », dit Aldo Amic-Léon.
Selon un libraire des hautes Plaines Wilhems, les librairies ont toujours du succès. « Il y a une forte croissance lors des rentrées scolaires, mais durant les examens, les jeunes fréquentent très rarement la librairie, certainement à cause de leurs révisions », explique le responsable.
Duel
Eddy Sadien, travailleur social Revoir le système au pré-primaire
Quelle place occupe la lecture de nos jours ?
De nos jours, les gens ne sont pas intéressés par la lecture et cela s’applique non seulement aux jeunes, mais à plusieurs tranches d’âges. Dans le passé, avec l’aide des amis, nous avions mis en place une bibliothèque à Tranquebar à la disposition des jeunes. Mais les jeunes ont tendance à délaisser la lecture. Auparavant, il y avait également des caravanes de la lecture, mais avec le temps, la tendance a évolué. Selon moi, l’évolution du système est vouée à éclater un jour.
Est-ce que la révolution numérique est en train de réduire le temps que les jeunes auraient pu consacrer à la lecture ?
Oui, cette révolution numérique n’est, selon moi, pas utilisée à bon escient, un exemple serait la pornographie. Les jeunes ne l’utilisent pas comme il le faut pour se développer et se cultiver. Pour ma part, cette révolution est apparue soudainement. En moins de dix ans, l’évolution technologique s’est emparée de tous. Très tôt, les enfants disposent d’un téléphone portable, alors qu’au même âge, dans le passé, ils s’attardaient sur des livres ou des bandes dessinées.
Que peut-on faire pour redonner aux jeunes le goût à la lecture ?
Il faudrait revoir le système d’enseignement dès le pré-primaire et encourager les enfants à lire. Il faudrait aussi revoir la formation des enseignants. La situation risque de ne pas s’améliorer sans une bonne formation des professeurs.
Stéphane Rock, enseignant : La solution vient des parents
Quelle place occupe la lecture de nos jours ?
Les jeunes ne lisent presque plus, parce que, désormais, ils ont accès aux informations plus facilement que dans le passé. De plus, avec les jeux vidéo et les réseaux sociaux, le temps qui était jadis accordé à la lecture, est dorénavant réduit. Auparavant, il n’y avait pas beaucoup de divertissement, comme c’est le cas aujourd’hui. La télévision, par exemple, où les images tournent 24/24, a pris la place de la lecture. Celle-ci requiert du temps et les jeunes n’ont plus cette patience.
Est-ce que la révolution numérique est en train de réduire le temps de lecture ?
Définitivement. Les jeunes sont dérangés toutes les secondes par leur smartphone. Il y a tellement de gadgets technologiques que les jeunes n’ont plus le temps. Auparavant, les gens lisaient des livres pour ensuite regarder les films, maintenant c’est l’inverse. De ma propre expérience, les élèves qui lisent sont plus performants en classe. Selon moi, la lecture met en avant la capacité d’argumenter et développe l’imagination.
Que peut-on faire pour redonner aux jeunes le goût à la lecture ?
Je pense que la solution vient des parents. Ces derniers doivent inciter leur enfant à la lecture, mais dans le monde d’aujourd’hui, ils n’ont pas le temps avec le travail et leurs occupations. N’oublions pas que l’enfant a tendance à copier ses aînés. Il faut un changement de comportement chez les adultes.
Les avantages et les désavantages de la lecture numérique
Quincy Balisson
« L’avantage lorsqu’on s’adonne à la lecture numérique, c’est qu’on peut y avoir accès n’importe où et n’importe quand, il faut uniquement un accès à Internet », affirme Quincy Balisson. Il est d’avis que la lecture numérique permet de transporter une bonne centaine de livres, voire plus, sans encombrement. « Nous contribuons aussi indirectement à l’écologie puisque nous évitons l’utilisation du papier. Cependant, la lecture numérique a aussi des désavantages. Le lecteur, par exemple, pourrait faire face à des soucis de santé sur le long terme, étant fixé sur son écran », dit-il. Selon le jeune homme, un autre désavantage est la disponibilité des livres. « Tous les livres ne sont pas disponibles en ligne et cela n’offre pas le même plaisir qu’un livre traditionnel. Christian Bobin compare le livre à un mort qui nous tend les bras en disant ‘ne me laisse pas là, emmène-moi…’ ».
Alicia Bapamah
« Les livres en ligne ne sont pas encombrants, vu que la lecture se fait sur un téléphone ou d’autres appareils digitaux. De plus, c’est plus pratique à transporter lors des voyages. Par contre, dans certains cas, les livres en ligne sont des ouvrages d’amateurs et il n’est pas rare de rencontrer des fautes d’orthographe et de grammaire. La langue utilisée est parfois informelle. Chercher un bon livre prend du temps », explique Alicia Bapamah.
L’Institut Français de Maurice propose une inscription à Culturethèque
Anaëlle Juste Tanner explique qu’il y a quelques années, l’Institut Français de Maurice (IFM) proposait aux abonnés de la médiathèque une inscription à Bibliobox. Désormais, il s’agit de la bibliothèque numérique Culturethèque (www.culturetheque.com). « Culturethèque propose un nombre de documents très divers pour les adultes et les jeunes, avec des articles de presse, livres et vidéos documentaires tels que ‘C’est pas sorcier’ et ‘Il était une fois l’homme’», explique la chargée de mission à l’IFM. Les romans, bandes dessinées, contes et autres documents bilingues pour l’apprentissage du français sont aussi disponibles. Elle ajoute qu’au cours du mois de novembre, le mois des cultures numériques, l’IFM propose des ateliers à destination des enfants. « Les enfants pourront programmer leurs propres histoires interactives et créer un livre numérique », précise Anaëlle Juste Tanner.
Bibliothèques en ligne
Google Book Search et Europeana sont deux des plus grandes bibliothèques en ligne les plus connues. L’UNESCO, pour sa part, a lancé sa bibliothèque numérique mondiale en 2009. Le but est de permettre à un plus grand nombre d’internautes d’accéder gratuitement aux grandes bibliothèques internationales. Considérée comme une continuité de l’apprentissage des écoliers, cette plateforme a aussi pour but de fournir du matériel aux élèves et aux éducateurs, ainsi qu’au grand public. Cette bibliothèque offre une possibilité de navigation en plusieurs langues, comme l’anglais, le chinois, l’espagnol, le portugais et le français, entre autres.
OPINIONS
Dwayne :
« Je préfère les livres traditionnels parce qu’ils sont plus mystiques à mon goût. J’aime bien l’idée ‘old fashion’ et malgré les livres en ligne, je favorise la lecture traditionnelle. Le fait de manipuler un livre est une autre sensation. Il n’y aura pas de ‘pop-up’ comme lorsqu’on lit en ligne. C’est irritant à mon avis. »
Sharonne Laurent-Emilie :
« Je lis en ligne, parce que cela fait moins de désordre, surtout lorsqu’on termine un livre, on ne sait plus quoi faire avec. En ligne je peux me permettre de lire 25 à 30 livres par mois. Par contre, je me vois mal acheter autant de livres, cela fera un gros trou dans mon budget. »
Fabrice Sookna :
« De nos jours, c’est comme une corvée de porter des livres partout avec nous. Je préfère télécharger le livre sur mon téléphone, ce qui est plus pratique.Je peux le lire n’importe où. Il en est de même pour les journaux. Tout est en ligne et en instantané, il est alors plus facile d’avoir accès aux informations et suivre l’actualité. Il m’arrive rarement d’acheter un journal, à moins d’y avoir vu quelque chose de vraiment intéressant.»
Estelle Thandaven :
« Je préfère de loin le livre traditionnel même si cela me donne un côté vieux jeu. Dès que je reçois un livre ou que j’en achète un, c’est toujours un plaisir de le feuilleter, le toucher, d’admirer la couverture ou encore d’apprécier l’odeur qu’elle dégage, qu’il soit neuf ou ancien. Le fait même de prendre son temps dans une librairie à trouver ‘LE’ livre est une expérience inouïe. Dans ma famille, nous sommes tous fans de lecture et lorsque nous déposons le livre dans la bibliothèque familiale, il devient un objet de curiosité ou même le sujet de conversation. En outre, le livre traditionnel nous permet de nous relaxer et de nous déconnecter de nos écrans. Malgré le coût, le sacrifice en vaut la peine. »
Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !