Le 187e anniversaire de l’arrivée des travailleurs engagés est célébré en ce 2 novembre. L’occasion d’évoquer l’Indentured Labour Route Project. Ce dernier nécessite une importante ressource financière et un engagement à long terme de différents gouvernements. Une base de données locale et internationale est en préparation. Des outils pédagogiques seront aussi développés. L’objectif est de mieux connaître le système de l’engagisme.
Reconstruire l’histoire et retrouver les liens sont les objectifs de l’Indentured Labour Route Project (ILRP). Ce projet d’envergure mobilise plus d’une dizaine de pays ayant connu le système de l’engagisme. Il regroupe plusieurs projets, notamment la création d’une base de données. Le but est d’échanger les archives et permettre aux descendants des travailleurs engagés d'en savoir plus sur leur origine.
Une enveloppe de plus d’un million de roupies a été attribuée pour développer cette base de données. Elle constitue un des projets de l’ILRP. C’est ce qu’a indiqué Avinash Teeluck, ministre des Arts et du Patrimoine culturel, au Défi Quotidien. C’était lors de la deuxième réunion de l’« International Scientific Committee » (ISC). Elle a eu lieu le lundi 25 janvier dernier à l’Université de Maurice, à Réduit. L’ISC a pour but de mettre en œuvre l’ILRP.
Dr Vijayalakshmi Teelock, 65 ans, est la vice-présidente de l’ISC. « Le gouvernement mauricien a pris les devants pour offrir une enveloppe pour le concept et le design de cette base de données internationale. Mais cette contribution seule ne suffit pas. Chaque pays doit apporter son soutien pour faire avancer le projet. Il est prévu qu’il soit prêt sur une base pilote en 2024 », dit l’historienne. Les pays participants sont : Inde, Trinidad, les îles Fidji, Guyana et Suriname, entre autres.
Cette base de données hébergera des documents relatifs à la migration des travailleurs engagés. Notamment les photos, la liste des arrivées des bateaux et des immigrants avec leurs noms et leur village d’origine. « Certains villages ont changé de nom ou n’existent plus. Mon grand-père, par exemple, était originaire du village Bruraree, aujourd’hui connu comme Barari dans le district Sawan en Inde. Certains patronymes ne s’écrivent plus de la même façon », dit-elle.
Maurice travaille aussi sa base de données pour la relier à la principale plateforme. Certains pays disposent déjà de la leur, dont la Hollande. Il faut également prendre en considération la langue dans laquelle les archives sont disponibles. « Cette plateforme permettra aux descendants de retracer leurs origines », dit Dr Vijayalakshmi Teelock. Des archivistes donneront aussi un coup de main sur cette base de données.
Un autre projet est la présence de l’ILRP sur les réseaux sociaux, notamment pour cibler les jeunes. « Parfois, les jeunes ne connaissent pas l’histoire de leurs ancêtres. Il nous faut développer des outils pédagogiques pour susciter cette curiosité et équiper les enseignants afin qu’ils puissent parler de l’histoire de l’engagisme », dit-elle.
Historique de L’ILRP
L’historienne explique que l’idée de l’ILRP date des années 1990. Elle est alors professeure d’histoire au Mahatma Gandhi Institute. Un réseau de professionnels a commencé à échanger sur cette idée. Ensuite, l’Aapravasi Ghat Trust Fund (AGTF) a vu le jour pour se concentrer sur l’histoire de l’engagisme. Le 12 juillet 2006, il devient le premier site mauricien classé patrimoine mondial par l’UNESCO. « Le World Heritage Committee avait formulé des recommandations quand le site a été inscrit. L’une d’elles était de procéder à une comparaison entre les différents pays ayant accueilli les travailleurs engagés », se souvient Dr Vijayalakshmi Teelock. Une archéologue mauricienne a été envoyée sur certains sites, notamment aux Caraïbes pour collecter des informations.
L’AGTF a pris l’initiative de réunir les chercheurs autour du monde pour travailler sur le dossier de l’ILRP. Les chercheurs ont, par la suite, discuté lors d’un colloque en 2011. Le document a été présenté à l’UNESCO qui a décidé d’apporter son soutien à l' ILRP en 2014. Quatre ans plus tard, la première réunion du ISC a eu lieu. « Les parties prenantes se sont rencontrées à Maurice pour la toute première fois. Les chercheurs étrangers ont indiqué qu’ils n’ont pas le soutien des institutions. C’est alors qu’un comité, composé des ministères de tutelle ou les institutions de plusieurs pays, a été mis en place. Le ministère des Arts et du Patrimoine culturel représente notre pays », ajoute notre interlocutrice.
Premier comité interministériel
Le premier comité interministériel, dont le secrétariat est basé à l’AGTF, a eu lieu sur la plateforme Zoom le vendredi 16 juillet 2021. Marie Levens ministre de l’Éducation, de la Science et de la Culture du Suriname, ainsi que Prahlad Singh Patel, ministre indien de la Culture, entre autres, ont assisté au comité.
Notons que l’ISC se réunit une fois l’an. Il repose sur trois sous-comités : Pacifique, Atlantique et Océan indien. Satyendra Peerthum est historien au AGTF et Acting Secretary pour ILRP. Il indique que le comité de l’Océan indien s’est réuni virtuellement du 5 au 7 août pour échanger des idées. Des avancements sont prévus pour 2022. « Un site web sur l’ILRP sera créé et lié à celui de l’AGTF. Il y aura aussi la création de la base de données pour Maurice. La publication d’un magazine et des recherches également au programme. Maurice a ouvert la voie. On espère que les autres vont suivre », dit-il.
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