En ce 12 mars, nous célébrons le 51e anniversaire de l’indépendance de Maurice. Une célébration nationale qui ne laisse pas indifférents les jeunes et les enfants. Voici comment leur propre définition de ce qu’est le mauricianisme…
En ce jour férié, Neekilesh, âgé de 12 ans, passera sa journée à la maison. Il suivra les célébrations nationales à la télé. La veille avec ses amis, ils ont eu une belle fête à l’école. « Depuis une semaine, nous préparons les festivités à l’école. Nous avons fait les répétitions pour chanter l’hymne national. Notre enseignante a beaucoup parlé de mauricianisme et de l’importance de respecter les autres, même ceux qui ne partagent pas la même culture et qui ne sont pas de la même religion que nous. Nous avons aussi parlé de tout ce qui est unique à Maurice et de ce que nous produisons dans notre pays. Comme le mauricianisme, nous sommes uniques, un peuple unique… »
Pour Farad Hossen, 17 ans, le mauricianisme n’est malheureusement qu’une façade pour ne pas s’attaquer aux réels problèmes de la société. « C’est trop facile de dire que nous sommes Mauriciens avant tout, alors que cela ne se reflète pas assez, que ce soit de la part de nos politiciens que de la part des jeunes. Il n’y a qu’à voir les différents posts sur les réseaux sociaux pour comprendre que le geste ne se joint pas à la parole. C’est bien de parler de mauricianisme, mais dans la pratique, c’est une autre histoire. »
Vivre-ensemble
Il ajoute qu’il serait important que cela fasse partie de notre cursus scolaire dès notre plus jeune âge et de manière plus concrète. « Vous allez me dire que cela se fait déjà mais ce qui se fait c’est surtout l’histoire de Maurice. On ne parle pas beaucoup de mauricianisme et du vivre-ensemble mauricien. »
Kimberly Lee, 11 ans : « Fière d’être Mauricienne »
Née de père mauricien et de mère philippine, Kimberly Lee parle aussi bien le français, l’anglais que le kreol. Elle se dit fière d’être Mauricienne. « Je pense que nous avons un beau pays. Je suis fière et j’ai de la chance d’être Mauricienne. J’ai des amis de toutes communautés. Cela me permet d’apprendre la culture et la religion des autres. Je trouve que notre pays est unique et que c’est pour cette raison que les étrangers l’aiment beaucoup. En ce jour de fête, je voudrais dire à tout le monde de ne pas manquer d’afficher le drapeau de Maurice pour célébrer tous ensemble cet anniversaire. »
Questions à… Prisheela Yusha Mottee, ambassadrice de la Paix et présidente de Raise Brave Girls
Que comprenez-vous par le terme « mauricianisme » ?
C’est une façon de vivre où se mêlent cultures et religions. Cela fait la beauté de l’île où nous avons pu mélanger non seulement la culture mais aussi la religion. Cela se voit à chaque célébration nationale lorsque les Mauriciens n’hésitent pas à participer aux fêtes religieuses et culturelles des autres habitants de l’île. D’après mon analyse, le mauricianisme consiste à partager sans distinction de race, de couleur et de sexe.
Comment promouvoir le mauricianisme ?
Le pays et toutes les parties prenantes font déjà un travail louable pour promouvoir le mauricianisme en promouvant une culture de l’inclusion à tous les niveaux de la société. Cependant, nous devons tenir compte du fait que notre tissu social doit être renforcé. Nous ne devons pas oublier nos racines et le parcours que nous avons réalisé jusqu’ici. Nous devons en tirer des leçons pour nous aider à renforcer l’unité.
Quel est le rôle des jeunes dans la promotion du mauricianisme ?
Les jeunes doivent jouer le rôle d’ambassadeur de Maurice et promouvoir la paix à tous les niveaux. Ainsi, toutes les parties prenantes à travers une association d’ONG font un travail impressionnant pour regrouper tous les jeunes et promouvoir l’unité.
Opinions
Angie Bigaignon : « Certaines complexités religieuses brisent le mauricianisme »
« Avant tout, je trouve que certaines complexités religieuses brisent le mauricianisme. Pour moi, être Mauricien c’est respecter les rituels et les traditions de l’autre, peu importe sa communauté car nous avons tous une histoire commune. Hélas beaucoup de gens se revendiquent Mauriciens uniquement pour la Fête de l’indépendance. On oublie souvent que nous sommes vraiment chanceux de vivre sur une si belle île. Cela fait du bien d’être chez soi, dans sa terre patrie. Comment promouvoir le mauricianisme ? Il faut commencer par ne plus avoir honte de s’exprimer en kreol. Au contraire, nou bizin fier nou langaz ki nou servi toulezour. »
Amélie Chetty : « Nous sommes Mauriciens avant tout… »
Pour Amélie Chetty, qui fréquente Beau Plan SSS, il est important de dire que nous sommes Mauriciens avant tout, avant même de parler de notre religion. « Que nous soyons hindous, musulmans, chrétiens ou tamouls, nous devons reconnaître que nous sommes tous Mauriciens. Il est de notre devoir de prôner le mauricianisme et de contribuer à éliminer le communalisme. Pour cela, nous ne pouvons pas seulement compter sur les politiciens pour une réforme du système électoral. Nous devons nous aussi, chacun d’entre nous, y mettre du nôtre. Nous, les jeunes d’aujourd’hui, sommes les adultes de demain. Nous sommes les politiciens du futur. Nous pouvons nous aussi faire la différence. Cela commence par de petits gestes au quotidien. »
Elle ajoute que le communalisme a été créé par les hommes et nous pouvons l’éradiquer. « Cela dépend aussi des valeurs familiales qui nous ont été transmises. L’éducation commence à la maison. Malheureusement le racisme et le communalisme aussi. Il est important que les parents puissent nous donner le bon exemple. De plus, à l’école, les classes de valeurs humaines sont importantes. » Elle espère que les jeunes réfléchiront à l’île Maurice de demain et à leur rôle pour construire une nation arc-en-ciel.
Juan Prosper : « Des citoyens sont privés de leurs droits civiques »
«À la question de savoir quelle était la meilleure Constitution, Solon répondit aux Grecs : ‘Dites-moi d’abord pour quel peuple et à quelle époque ?’ Héritage du système westministérien, notre régime parlementaire a permis, pendant près de 50 ans, de doter notre pays d’un gouvernement stable et ce nonobstant les jeux des alliances, les cassures et les remakes’ Aujourd’hui, nous avons une réelle défiance que ce soit au niveau local et au niveau mondial à l’égard de la classe dirigeante », avance Juan Prosper, un jeune Mauricien qui vient de prêter serment au Barreau de Paris. Il estime qu’on devrait revoir notre système électoral dans son ensemble et ne pas se laisser empoisonner par les groupes socioculturels.
Juan Prosper se pose également des questions sur le redécoupage des circonscriptions : « Rien ne justifie la grande différence entre la circonscription no 3 avec 23 112 électeurs et la circonscription no 4 qui en compte 62 524. Une solution serait de passer par la désignation d’un député par circonscription, ce qui permettrait en sus de cela de rapprocher l’élu de ces électeurs en créant des circonscriptions d’environ 15 000 électeurs. Ce redécoupage pourrait se faire sans augmenter le nombre de députés. La question de la proportionnelle à petite dose n’aurait plus sa raison d’être dès que le seuil des électeurs aurait été abaissé. Au regard du tripartisme en vigueur à Maurice, il n’est pas certain que le scrutin proportionnel intégral soit la meilleure solution car il priverait l’électeur de toute possibilité d’arbitrer sur les alliances qui pourraient s’effectuer après les élections dans les coulisses. »
Selon Juan Prosper, le scrutin majoritaire à deux tours permet aux électeurs de valider ou non les consignes des dirigeants. Ce qui, dit-il, évite les scénarios que nous avons récemment vécus en Europe avec les alliances contre-nature en Italie entre le Mouvement 5 Etoiles et La Ligue du Nord ou encore en Espagne avec les libéraux Ciudadanos qui ont fait le choix de s’allier au parti d’extrême droite Vox.
« Afin de garantir la vraie légitimité de nos députés, il conviendrait bien entendu de supprimer le système du First-Past-The-Post au profit d’un vrai scrutin majoritaire à deux tours garantissant que le député élu le soit effectivement avec le soutien de plus de la moitié des votants. En parallèle, nous pouvons aussi envisager le maintien d’un scrutin de liste probablement à la proportionnelle dans le cadre d’une vraie circonscription pour les Outer Islands (comprenant Rodrigues, Agalega, Tromelin et bien entendu les Chagos) et d’une circonscription des Mauriciens de l’étranger », poursuit-il. Sur ce point, estime Juan Prosper, il est insoutenable que des citoyens, en raison de leur absence du territoire, soient privés de leurs droits civiques sans y avoir expressément renoncé alors qu’ils participent à l’économie et au rayonnement international de notre pays. »
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