
Face à un système éducatif élitiste et un marché du travail en décalage, le ministre Reza Uteem appelle à un changement de mentalité. Entre « brain drain » et pénurie de compétences, l’urgence est de revaloriser les filières professionnelles et d’adapter les rémunérations aux attentes des jeunes diplômés.
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Le ministre du Travail intervenait dans l’émission « Au Cœur de l’Info » animée par Jane Lutchmaya sur Radio Plus, mercredi. Elle a aussi reçu l’économiste Vinaye Ancharaz, avec une intervention téléphonique d’Adilla Mosafeer de Talent Lab.
L’émission analysait le rapport d’Axys sur l’inadéquation entre notre système éducatif et les besoins du marché, la pénurie de main-d’œuvre, l’exode des cerveaux et la nécessité de recourir à une main-d’œuvre étrangère.
Dénonçant l’élitisme du système éducatif mauricien, Reza Uteem souligne l’importance de reconnaître que tous les enfants n’ont pas les mêmes dispositions académiques. Il préconise de « valoriser les métiers qui peuvent profiter à ceux qui ne peuvent suivre la filière académique » et insiste sur la nécessité pour les centres de formation d’offrir « des cours adaptés aux demandes du marché ».
Concernant la fuite des cerveaux, Reza Uteem revient sur la politique des salaires. Conscient de l’augmentation des coûts pour les employeurs, il les exhorte à « faire un effort pour retenir nos jeunes en leur offrant des avantages attractifs, car ils sont prêts à travailler, mais pas pour un salaire de misère, et surtout, ils veulent préserver du temps pour leur vie sociale ».
Sans un Reservation Wage satisfaisant, un jeune préfère rester au chômage sous le toit de ses parents, dit Vinaye Ancharaz. Il définit le Reservation Wage comme le niveau de rémunération minimal qu’un jeune diplômé d’études supérieures estime mériter.
« Les employeurs doivent consentir à des efforts en adaptant les salaires selon les compétences et qualifications de cette catégorie de jeunes, sinon ils partiront. »
Il souligne que l’inadéquation entre formation et emploi représente un défi majeur. L’économiste recommande une orientation vers des secteurs porteurs, notamment les services à valeur ajoutée. « Sans cela, nous resterons dépendants de la main-d’œuvre étrangère en raison de cette inadéquation », prévient-il, ajoutant qu’il est grand temps de faire évoluer notre culture : « Cette obsession pour les emplois gouvernementaux ou parapublics doit être abandonnée. »
Pour Adilla Mosafeer de Talent Lab, « le temps des mesures électoralistes est révolu. Il nous faut désormais une stratégie claire et réfléchie, adaptée aux besoins réels du pays ». Si nous ne sommes pas capables de retenir les talents, met-elle en garde, « l’exode des cerveaux se poursuivra inexorablement ».
Reeaz Chuttoo : « Les travailleurs étrangers ne sont pas nos adversaires »
Selon le syndicaliste Reeaz Chuttoo de la CTSP, « les travailleurs étrangers ne sont pas nos adversaires, il est impératif de ne pas les exploiter. Pourquoi ne pas les autoriser à venir avec leur famille ? Ainsi, nos devises resteraient dans le pays et leur bien-être serait assuré ». Il observe que les parents mauriciens aspirent invariablement à ce que leurs enfants poursuivent des études supérieures. « Ces jeunes refusent certains emplois jugés mal rémunérés. Le paradoxe est frappant : nous comptons 40 000 chômeurs, majoritairement des jeunes, tandis que 48 000 travailleurs étrangers sont employés sur notre sol. »

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