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Le soutien affiché jeudi à Washington par Donald Trump en faveur d’une rétrocession des Chagos à Maurice, suite à sa rencontre avec le Premier ministre britannique, sir Keir Starmer, marque un tournant majeur dans ce dossier géopolitique complexe. D’autant plus que l’on disait l’administration Trump contre un deal entre Britanniques et Mauriciens sur ce dossier. Plus rien ne semble empêcher le retour de l’archipel sous souveraineté mauricienne, d’autant plus que le Royaume-Uni et Maurice ont déjà préparé un accord. Si Olivier Bancoult exhorte à l’unité face aux dissensions internes, Jean Claude de l’Estrac analyse les raisons stratégiques qui ont poussé Washington à revoir sa position.
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Olivier Bancoult exhorte à l’unité des Chagossiens face aux divisions internes
Dans un message publié sur sa page Facebook, Olivier Bancoult, leader du Groupe Réfugiés Chagos, a adressé une mise en garde à ceux qui appellent à se ranger du côté britannique, tout en appelant à l’unité des Chagossiens face aux tensions internes.
« Tu prétends connaître l'injustice qu'ont subie tes parents et tes grands-parents. Mais tu n'étais pas d'accord pour que la justice corrige cette injustice », écrit-il. Au niveau de la communauté chagossienne, certains, surtout ceux qui ont émigré au Royaume-Uni, ont adopté une position qui ne soutenait pas les démarches engagées pour un retour de l’archipel sous souveraineté mauricienne.
Olivier Bancoult reproche également à ceux-ci d’avoir cru que Donald Trump empêcherait tout progrès dans ce dossier. « Qu'as-tu fait pour empêcher cela d’arriver ? Tu t'es rangé aux côtés des députés (ndlr, britanniques) qui n'ont PAS trouvé de solution pour corriger l'injustice envers ta propre famille », poursuit-il.
Olivier Bancoult se félicite de la reconnaissance progressive des droits des Chagossiens, affirmant que « vérité a finalement triomphé ». Il insiste sur l’importance de la solidarité et met en garde contre les dissensions internes : « Quand on creuse un trou pour son camarade, on finit par y tomber soi-même. »
Il rappelle également l’importance de la fraternité entre Chagossiens, indépendamment des divergences d’opinions. « Chagossien n'est PAS l'ennemi d'un autre Chagossien. Tu peux avoir une opinion différente, mais nous sommes tous frères et sœurs. »
Enfin, le leader du Groupe Réfugiés Chagos souligne la nécessité de respecter les générations précédentes, rappelant que sans les natifs chagossiens, leurs descendants n’existeraient pas. « Le respect est une valeur essentielle. Je te le répète : personne ne connaît mieux la souffrance que les Chagossiens qui sont nés et ont été déportés des Chagos. »
Rétrocession des Chagos - Jean Claude de l’Estrac : « Je ne suis pas totalement surpris de la position adoptée par Donald Trump »
L’ancien rédacteur en chef de L’express et historien, Jean Claude de l’Estrac, se dit peu étonné par la position adoptée jeudi par Donald Trump concernant l’archipel des Chagos à l’issue de sa rencontre avec sir Keir Starmer, Premier ministre britannique, à Washington, et surtout le Premier ministre indien, Narendra Modi, à la mi-février.
« Je ne suis pas totalement surpris de la position adoptée par Donald Trump sur la question des Chagos », affirme Jean Claude de l’Estrac. Il rappelle que lors de sa dernière prise de parole publique sur le sujet, il a écarté la justification avancée par les États-Unis pour refuser la rétrocession de l’archipel à Maurice. « Le dernier obstacle évoqué par les Américains, à savoir le risque d’une influence chinoise sur Maurice, était en réalité stupide et faux. Parce que, comme chacun sait, si Maurice est sous une influence étrangère quelconque, c’est celle de l’Inde. Et l’Inde est un partenaire stratégique des Américains dans notre région », souligne-t-il.
Jean Claude de l’Estrac estime que la récente visite du Premier ministre indien, Narendra Modi, à Washington a joué un rôle déterminant dans le changement d’attitude de Donald Trump. « Je suis persuadé que les assurances données par Modi à Trump ont incité le président américain à donner son accord à un deal qui garantit l’existence de la base américaine de Diego pour au moins 100 ans », avance-t-il.
Les États-Unis, soucieux de contenir l’influence chinoise dans l’océan Indien, auraient ainsi trouvé un compromis leur permettant de préserver leur présence militaire stratégique sur Diego Garcia, tout en facilitant la rétrocession de l’archipel à Maurice sous certaines conditions.
Jean Claude de l’Estrac met en avant les prochaines étapes cruciales de ce processus. « La prochaine étape, c’est d’abord le traité par rapport à la rétrocession des Chagos lui-même », explique-t-il. Il rappelle que l’approbation du Parlement britannique sera nécessaire, un passage obligé dans la mise en œuvre de cet accord.
Au-delà de la question de la souveraineté, des aspects financiers devront également être négociés. « J’espère que, contrairement à l’accord sur Agalega, on rendra public le deal pour qu’on sache de quoi il s’agit, car on est censé avoir notre souveraineté sur Diego », insiste-t-il.
Toutefois, des interrogations demeurent quant aux modalités pratiques de cette souveraineté. « Comment ça va fonctionner ? Qu’est-ce que cela veut dire, souveraineté sur Diego Garcia ? » se demande Jean Claude de l’Estrac, pointant les défis à venir pour Maurice.
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