Répondant à notre enquête d’opinion, un consultant en investissement lâche ces propos : « There is too much focus on political and drug related matters these days. » On a presque oublié le budget national présenté il y a un mois, tant il est éclipsé par le déballage devant la commission d’enquête sur la drogue. De plus, une élection partielle va distraire le peuple pour le garder, comme la diplomatie mauricienne, inconscient des grands enjeux économiques du pays.
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On serait rassuré si au moins le Premier ministre réfléchissait aussi comme ministre des finances. Mais il traîne tellement de casseroles politiques qu’il doit agir davantage comme chef de parti. Et s’il croit qu’il suffit de pérorer devant Business Mauritius afin d’afficher un intérêt pour l’économie, il se trompe. Qu’il écoute plutôt les commentaires des analystes recueillis dans ce baromètre.
Ce n’est pas avec enthousiasme mais avec pessimisme que les personnes interrogées abordent l’année financière 2017-2018. D’emblée, elles observent « a government which is struggling with governance » et qui montre un « bilan faible » à mi-mandat. Certes, un match de foot se joue sur 90 minutes, mais les spectateurs désertent déjà le stade, car les joueurs pètent les plombs.
Faute d’avoir du spectacle, tel le cri des Romains, les Mauriciens demandent du pain. Mais ils se sentent insultés par la baisse de dix sous l’unité. Ils reçoivent d’ailleurs un coup de massue avec la résurgence de l’inflation (6,4% sur un an à juin 2017). Si l’on combine cela avec d’autres indicateurs, dit un analyste, « it is alarming. The level of productivity is not going up. On the employment side, we are not getting the skilled people with the ability, will and enthusiasm to deliver. And the low fertility rate of the country may hamper the development plans. »
On comprend que la cherté de la vie décourage les femmes à concevoir. Or moins d’enfants aujourd’hui signifie moins d’actifs demain, et ils porteront plus lourdement le fardeau de la dette publique. C’est pourquoi, suggère un économiste, « the evolution of the public sector debt would need to be appraised, especially after making allowance for the threat that lower-than-expected growth could affect fiscal dynamics and the eventual impact, albeit partly, of the line of credit received from India ».
Seule la croissance économique peut donc soutenir la hausse de l’endettement. Le problème, fait ressortir un gestionnaire de fonds, c’est que « there is too much reliance on the construction sector to drive growth, and this raises the question of quality of growth. Concerns remain on debt financing, direction of rupee, high excess liquidity and ultra-low interest rates. In addition, the traditional delays in implementing projects will certainly weigh on growth. »
Ainsi, la grande majorité des sondés s’attendent que l’investissement privé progresse en 2017 à un taux inférieur aux 2,8% prévus par les autorités. Les chiffres sectoriels sont encore moins flatteurs, notamment dans le secteur tertiaire appelé à tirer l’économie vers le haut. La comptabilité nationale indique une décroissance de la formation brute de capital fixe deux années consécutives dans l’information et la communication (-5,4% en 2016 et -10,7% en 2017), dans les services financiers (-3,3% et -24,7%) et dans les activités professionnelles (-36,0% et -8,2%). Du reste, ces trois secteurs n’ont pas attiré d’investissement direct étranger durant le premier trimestre de 2017.
C’est par le développement des services que Maurice se transformera en économie à revenu élevé. Mais les politiques du gouvernement sont trop changeantes pour être crédibles. Il crée un ministère des services financiers mais coupe ensuite son bras opérationnel qu’est la Financial Services Promotion Agency. Il lance une stratégie nationale d’exportation mais ferme la seule organisation qui s’y concentre, Enterprise Mauritius. Il veut plus de résultats de la part du Board of Investment mais le noie dans une grosse bureaucratie qui confond promotion et réflexion, l’Economic Development Board. Le succès de cette dernière initiative, pour citer un économiste, « will be closely dependent on the adherence to clear mandates, objectives and targets; on adequate technical and human resourcing; on the leeway provided to members to recommend economic solutions that are sufficiently pertinent and ambitious to tackle impending challenges; and on the ability of the board to exert a meaningful influence on the decisions of the authorities ».
Mais la décision de signer la Convention multilatérale de l’OCDE témoigne de la surdité des décideurs face aux opérateurs. Maurice se tire une balle dans le pied en sortant de la concurrence fiscale alors que la Grande Bretagne envisage d’y entrer. On voit mal comment l’île réalisera sa stratégie d’exportation de services en Afrique sans les traités de non double imposition fiscale. Il faudra espérer, selon un analyste, que « other factors such as higher value added services, rule of law and ease of doing business will be the competitive edge. There must be a deep structural change in the society with longer working hours, flexible visa system, vibrancy in the cultural life, late opening hours of shopping centres, an efficient civil service and an effective police force. »
L’efficacité et l’efficience dans le secteur public ne s’obtiennent pas avec plus de fonctionnaires à ne rien faire. On annonce 7 700 postes vacants à remplir. Des recrutements ne feront qu’accentuer la bureaucratisation et l’endettement de l’Etat. Ils n’effaceront pas le pessimisme des analystes.
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