- Suren Surat, CEO de SKC Surat : « Un ciblage serait dans l’intérêt de certaines entreprises »
La question du 14ᵉ mois pourrait connaitre ses premiers développements lors du prochain conseil des ministres.
Le paiement du 14ᵉ mois est un sujet d’actualité. C’est une mesure qui retient l’attention en ce mois de décembre, alors que la période de fin d’année se profile. Le deuxième conseil des ministres du nouveau gouvernement sera particulièrement suivi. Pour cause, le dossier du paiement du 14ᵉ mois devrait figurer à l’agenda.
Quasiment un mois après les résultats des élections générales, les modalités concernant le 14ᵉ mois se font attendre. Un comité technique s’est chargé de ce dossier. Deux ministères, celui des Finances et celui du Travail, s’y sont également attelés.
Cette mesure semble donner du fil à retordre au gouvernement. Plusieurs interrogations subsistent quant à de potentielles exclusions pour le paiement du 14ᵉ mois. Les appréhensions ont aussi gagné les rangs des entreprises, notamment celles dont la capacité financière pour financer une telle mesure est frileuse. Ce qui pousse un économiste à qualifier le 14ᵉ mois de mesure électoraliste irréfléchie. La raison selon lui est qu’on demande aux entreprises de trouver un mois supplémentaire de salaire pour les employés sans budget préalable.
« Les grosses entreprises qui ont enregistré des bénéfices pourront financer le 14ᵉ mois. Par contre, les PME subissent déjà l’impact d’un salaire minimum élevé. C’est un fardeau imprévu. La question de sa mise en place demeure entière », avance l’économiste.
Le ciblage : une option
Face à ce défi qui se dresse, le ciblage est une option envisageable. Ce serait un moyen qui pourrait être favorable aux entreprises. Il y a eu des discussions et elles sont toujours en cours entre les autorités, le représentant du secteur privé et les syndicats. Le ciblage est perçu comme une formule qui permettrait aux entreprises de limiter les dégâts. Suren Surat, CEO de SKC Surat, reconnait qu’il faudra certes respecter la loi. Cependant, s’il y a moyen qu’un ciblage soit instauré, ce sera dans l’intérêt de certaines entreprises.
Pour l’économiste, un employé au-dessus d’un certain seuil peut ne pas toucher le 14ᵉ mois, surtout si cette mesure s’insère comme un moyen de soutien à la consommation. « Il faut analyser quelles sont les personnes qui touchent suffisamment d’argent et qui n’ont pas besoin de ce soutien financier. La richesse et la qualité de vie doivent également être prises en compte. Ceux qui sont au bas de l’échelle sont les plus affectés en cas de hausse de prix. Les produits consommés par les plus aisés augmentent en quantité moindre par rapport aux produits consommés par les autres », argumente notre interlocuteur.
Une autre forme de ciblage, selon l’économiste, serait d’écarter ceux qui sont en temps partiel. Il fait comprendre qu’il y a une grande irrationalité entre les employés à plein temps et ceux à mi-temps. « Un employé qui fait quatre “part-time jobs” et qui travaille moins de 40 heures par semaine touche plus qu’un employé permanent », souligne-t-il. Et d’ajouter que seuls les employés dont les employeurs paient la Contribution sociale généralisée (CSG) et le National Savings Fund (NSF) doivent être éligibles au 14ᵉ mois. Plusieurs personnes opèrent dans le secteur informel ou le semi-informel. « En excluant ces derniers du 14ᵉ mois, ce sera une manière de les inciter à rentrer dans le système. Pourquoi récompenser une personne pour ne pas être dans le système ? », conclut l’économiste.
Déception
S’il y a des exclus, il y aura des déceptions et des mécontentements. D’ailleurs, certains commentaires sur Facebook vont en ce sens. Faisant référence au nouveau gouvernement, on peut ainsi lire : « Quand ils ont ouvert leur bouche pour dire qu’ils allaient donner le 14e mois, ils n’avaient pas parlé de grille salariale ». Un autre internaute souligne que « zam dan kanpayn ti dir pou fer siblaz ».
Toutefois, un économiste argue qu’il faut se demander comment cette mesure du 14e mois sera financée. Il est d’avis que la roupie va se déprécier davantage. « C’est un cadeau empoisonné sous forme d’illusion monétaire. Le paiement du 14e mois va entrainer une hausse des prix. La demande va augmenter alors qu’il n’y aura pas de production en plus. Les commerçants vont revoir leurs prix à la hausse, sachant que les consommateurs ont plus d’argent. Les consommateurs seront contents d’avoir plus d’argent, mais ne vont pas apprécier de voir les prix grimper », craint-il. Ce qui lui fait dire que c’est une mesure qui provoquera des déceptions et du mécontentement d’un côté ou d’un autre.
Aider les entreprises
Pour Suren Surat, la prise en compte de la situation financière des entreprises et de la capacité de payer le 14e mois aurait dû être un facteur non négligeable. Le gouvernement devra, selon lui, aider les entreprises en difficulté. Pour cause, le salaire est passé de Rs 11 575 en décembre 2023 à Rs 16 500 en janvier 2024. Le réajustement salarial est intervenu par la suite.
Cela n’est pas sans conséquence pour les entreprises. « On ne peut nier le fait que les prix des produits alimentaires ont grimpé et que les ménages ont besoin de cet argent. Or, avec le 14e mois et l’incertitude autour des autres ajustements salariaux en janvier prochain, c’est une situation pesante pour les entreprises », fait comprendre le CEO de SKC Surat. La gestion des dépenses et des coûts d’opération devient un vrai défi pour les entreprises. SKC Surat réfléchit depuis quelques mois sur des moyens de se restructurer afin de réduire ces coûts. « Nous sommes contraints pour le moment d’absorber l’augmentation des coûts », concède Suren Surat. De son côté, l’économiste est d’avis que l’aide gouvernementale doit surtout être pour toutes les entreprises qui font partie du Wage Assistance Program.
Les attentes des seniors
Vinod Dookhit est le président de la Fédération du club de troisième âge de Beau-Bassin/Rose Hill et District Representative de Lower Plaines-Wilhems.
Il avance que les deux principaux blocs qui étaient en course pour les élections générales ont promis le paiement du 14e mois. Les seniors comprennent qu’il y a des mécanismes qui doivent être mis en place pour introduire une telle mesure. Il y a cependant une grande attente par rapport à cette mesure. Ce sera une déception pour les seniors s’ils sont exclus. « Les retraités ont été affectés par l’inflation. Le 13e mois sera un moyen de faire face à cette situation. Nous avons des enfants et des petits-enfants qui sont toujours scolarisés. Le 14e mois nous permettra de participer au financement de leurs études, sachant que les parents sont déjà endettés à des fins de progrès. Il y aura également les dépenses pour la période de fin d’année », explique Vinod Dookhit.
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