
Depuis son arrivée au pouvoir il y a environ cent jours, l’Alliance du Changement s’efforce de s’adapter à un environnement économique difficile. Elle tente de poser les bases de son action, mais elle est confrontée à une situation héritée complexe. Entre tensions institutionnelles, défis économiques et réformes sociales, elle s’est engagée sur une voie semée d’embûches.
Publicité
Cela fait plus de cent jours que le gouvernement de l’Alliance du Changement, dirigé par le Premier ministre Navin Ramgoolam et le Deputy Prime Minister, Paul Bérenger, a pris ses fonctions. Un premier bilan s’impose. Confrontée à un contexte économique difficile et à une structure institutionnelle fragile qu’elle qualifie d’« héritage précaire », l’équipe au pouvoir s’efforce de poser les bases de son action. Plusieurs dossiers prioritaires ont été ouverts, en même temps que se poursuit la mise en place de la nouvelle administration gouvernementale.
Dès le 10 décembre 2024, lors de son discours sur le State of the Economy, le Premier ministre a présenté un rapport détaillant la situation héritée du gouvernement précédent. Déposé à l’Assemblée nationale, ce document a pointé une économie en « état de précarité sans précédent », marquée par un endettement public important et un déséquilibre des fondamentaux macroéconomiques.
« La nation sera consternée en prenant connaissance de la manière dont le gouvernement précédent a dilapidé les finances du pays. C’est choquant ! », a déclaré Navin Ramgoolam à l’Assemblée nationale. Il s’est engagé à ramener la dette publique à un niveau soutenable, tout en veillant à ne pas hypothéquer l’avenir des jeunes générations.
Le Premier ministre a également souligné l’importance de rétablir un climat de confiance entre les principaux acteurs de la société : gouvernement, syndicats, secteur privé et société civile. Ce dialogue, affaibli sous le précédent mandat selon lui, doit être rétabli pour favoriser un développement harmonieux.
Le 24 janvier, le président de la République, Dharam Gokhool, a présenté devant l’Assemblée nationale le programme gouvernemental pour la période 2025-29, intitulé « A Bridge to the Future ». Cette feuille de route met en avant la restauration de la démocratie, avec des réformes constitutionnelles et électorales.
« La première mission du gouvernement est de reconstruire notre démocratie et de restaurer la bonne gouvernance », a déclaré le chef de l’État. Dans cette optique, l’exécutif entend réviser les Standing Orders de l’Assemblée nationale et un renforcement de l’indépendance des institutions publiques sont prévus. Le gouvernement a aussi annoncé une restructuration économique, notamment la réactivation du ministère de la Planification économique, chargé de concevoir un plan de reconstruction socio-économique.
La stratégie du gouvernement pour stimuler l’investissement repose sur cinq piliers. Il s’agira d’élargir et de diversifier l’espace d’investissement pour attirer de nouveaux acteurs. Ensuite, une réaffectation des ressources vise à optimiser les capacités productives du pays. Le troisième axe concerne l’innovation et la compétitivité, avec la mise en place d’un cadre dédié à la recherche et au développement.
Parallèlement, le gouvernement prévoit de renforcer les forces institutionnelles du pays pour garantir une meilleure gouvernance et une administration plus efficace. Enfin, un renforcement des fondamentaux macroéconomiques doit assurer une stabilité économique nécessaire pour soutenir une croissance durable et inclusive. En ce qui concerne ces cinq piliers, le gouvernement n’en est qu’au début du chantier.
Un seul texte de loi adopté jusqu’ici
Malgré l’énoncé de son programme ambitieux, une seule loi a été adoptée à l’Assemblée nationale jusqu’ici. La Financial Crimes Commission (Miscellaneous Provisions) Act 2025, votée le 7 février, redonne au Directeur des poursuites publiques les pouvoirs que la Financial Crimes Commission (FCC), mise en place en 2023 pour remplacer l’Independent Commission against Corruption (Icac), lui avait retirés. Ce texte vise à rétablir l’indépendance du système judiciaire en matière de lutte contre la corruption.
Des nominations encore en suspens
Trois mois après son arrivée au pouvoir, le gouvernement procède toujours à la nomination des responsables des grandes institutions publiques. Plusieurs postes-clés, notamment ceux de directeurs de certains organismes et conseils d’administration de structures stratégiques, restent vacants.
Sur le front diplomatique, deux postes ont été pourvus : Milan Meetarbhan a été nommé représentant permanent de Maurice aux Nations unies la semaine dernière et Jasmine Toulouse déléguée permanente désignée de la République de Maurice auprès de l’UNESCO. Les nominations se poursuivent et beaucoup seront finalisées dans les prochaines semaines.
Les premiers chantiers engagés
Parmi les dossiers prioritaires ouverts par l’Alliance du Changement figure la réforme de l’éducation. Le retour aux critères de trois crédits pour l’admission en Grade 12 est l’une des premières mesures notables, affectant directement les futurs candidats au Higher School Certificate (HSC). Ce choix s’inscrit dans un projet plus large de réformes éducatives. Bien que ces réformes soient amorcées, l’ampleur du chantier reste importante.
Dans le domaine de l’environnement, plusieurs actions ont été annoncées pour faire face à l’urgence climatique et garantir une gestion plus durable des ressources naturelles. Le gouvernement met l’accent sur la préservation de l’environnement et l’adoption de stratégies pour réduire l’empreinte écologique de l’île.
Le secteur de la santé est également une priorité, avec des efforts visant à moderniser les infrastructures publiques. Un programme de remise à niveau des hôpitaux et centres de soins, en particulier ceux gérés par le secteur public, a été lancé pour assurer des soins de qualité à tous les citoyens. Ce secteur reste cependant confronté à des défis majeurs, notamment des équipements obsolètes et un manque de personnel.
En matière de rétablissement du pouvoir d’achat, une baisse de Rs 5 par litre d’essence et de diesel a été appliquée dès le 13 décembre 2024. Dans le domaine du sport et des loisirs, l’exécutif a réactivé le Mauritius Turf Club en tant qu’unique organisateur des courses hippiques, mettant fin à la gestion discutable de People’s Turf.
Au terme de ces 100 premiers jours, l’Alliance du Changement affiche donc une volonté de rupture avec la gestion de ses prédécesseurs. Si certaines mesures ont déjà été amorcées, plusieurs institutions demeurent toutefois en transition et la mise en place des réformes s’annonce complexe. Face aux défis économiques et sociaux, le gouvernement est attendu sur sa capacité à mettre en œuvre les réformes annoncées et à concrétiser ses engagements pour inscrire durablement sa marque.

Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !