Yacoob Ramtoola, Managing Partner de BDO, est optimiste par rapport à la relance de l’économie mauricienne. Toutefois, il explique que certaines conditions doivent être réunies pour la croissance.
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Certaines personnes disent que le Budget 2016/2017 ne va pas relancer l’économie étant plus porté vers le social. Partagez-vous cet avis?
Comme nous le disions dans notre OpEd, si la croissance du PIB atteint la barre psychologique des 4%, nous commencerons alors une nouvelle ère. En d’autres mots, cela serait synonyme de relance. D’ailleurs, le secteur des services financiers a la capacité d’apporter des mesures intéressantes qui contribueraient à réorganiser le paysage économique après les amendements majeurs dans le traité de non-double imposition Maurice-Inde. Cela permettra également de préserver un maximum d’emplois avec la réduction du fret et la réintroduction du LEMS pour le remplacement des équipements.
Le gouvernement attend beaucoup du secteur privé pour de nouveaux investissements afin de relancer l’économie. Croyez-vous que ce budget va motiver les investisseurs locaux ?
Si les conditions économiques sont favorables, cela motivera sans aucun doute les investisseurs locaux à investir. Il y a de nombreux projets en cours et certains nous concernent de près. Les mesures apportées dans le Budget 2016-2017 visant à améliorer le monde des affaires s’attaquent directement à certains obstacles. De plus, si la tendance actuelle se poursuit au niveau de la facilitation du commerce, l’investissement suivra logiquement. Cependant, nous sommes toujours hésitants à accueillir davantage d’étrangers à Maurice. Pourtant, cela créera plus de demandes au niveau de la consommation, augmentera le capital et le pays bénéficiera grandement du savoir-faire de ces professionnels. Tout cela ne peut que créer un climat favorable qui attirera non seulement des investisseurs locaux mais aussi étrangers. Il faut se rendre à l’évidence : nous sommes une petite île et notre population est tout aussi petite. Si nous voulons évoluer et réussir, il faut que notre pays s’ouvre davantage.
Quels sont les secteurs où les investisseurs locaux pourront intervenir ?
Il n’y a pas de secteur spécifique parce que nous pouvons également concentrer nos efforts sur les marchés spécialisés. Il y a quelques Smart Cities qui vont bientôt sortir de terre et cela va stimuler d’autres secteurs.
« Le secteur du tourisme est le seul secteur qui se porte bien. »
S’il y a une bonne gestion, les retombées seront très positives. Certains aspects du secteur manufacturier sont attrayants ; le tourisme se porte très bien et peut continuer sur cette lancée ; l’outsourcing va connaître une croissance exponentielle et les services financiers seront le moteur de croissance. Par contre, la construction pourrait continuer à subir les effets d’un secteur précaire et l’agro-industrie retrouvera un second souffle si l’African Strategy marche comme prévu.
Est-ce que toutes les conditions sont réunies pour la création d’emplois ?
La création d’emplois est directement liée à la croissance économique. Aussi longtemps que les entreprises continueront à croître, des emplois seront créés. Cependant, nous devons être vigilants, car la situation dans le secteur de la construction pourrait avoir un effet négatif sur le marché du travail et toute perte viendrait annihiler les efforts entrepris afin de créer de l’emploi.
Est-ce que les mesures incitatives annoncées par le ministre des Finances vont attirer les investisseurs étrangers ?
Les investisseurs étrangers ne seront pas attirés par le marché local en considérant uniquement sa taille à moins d’une politique forte ayant pour objectif d’attirer les investisseurs étrangers afin d’élargir le marché. Sinon l’investissement sera modéré. Ainsi, positionner Maurice comme une plateforme pour l’exportation vers l’Afrique ou ailleurs est intéressant, car nous maintenons notre pouvoir concurrentiel. La position stratégique et le régime fiscal sont des avantages concurrentiels puissants. Ce sont des offres commerciales uniques afin d’attirer des investisseurs.
De budget en budget, les ministres des Finances accordent beaucoup d’importance aux PME. Qu’est-ce qui explique les difficultés et que faut-il faire pour que les PME puissent s’épanouir ?
Les PME sont complexes. Elles souffrent d’un accès limité aux marchés et d’un manque de capital. Il y a eu beaucoup de mesures mises en place afin de faciliter l’accès au financement, mais cela s’est avéré être un échec. Ce qui fait qu’aujourd’hui, les PME ne sont pas viables. Nous devons encourager les investissements en fonds propres. Les entrepreneurs qui évoluent dans le segment des petites entreprises sont ceux qui font face à plus de problèmes. Le manque de capital et le manque de partenariats limitent leur possibilité de croissance. Les PME ont aussi besoin d’un nouveau souffle et doivent penser encore plus à une stratégie de croissance et à s’ouvrir plus aux actionnaires externes.
Est-ce pourquoi sept PME sur 10 ont des problèmes financiers dès leurs premières années d’opération ?
Un entrepreneur est souvent un « Jack of all trades » et travaille seul. Cela ne lui permet pas de se concentrer sur ses forces. Le manque de culture entrepreneuriale et le manque d’investissement en ce qu’il s’agit de gérer le back-office de façon professionnelle met souvent leur business en danger.
Pensez-vous qu’une assistance financière aux démunis va améliorer leurs conditions de vie ?
Nous avons tous un devoir et une responsabilité en ce qu’il s’agit de l’atténuation de la pauvreté. Chaque centime compte et toute aide venant de l’État est la bienvenue mais est loin de suffire. Nous devons être encore plus bienveillants et avoir la volonté d’aider les plus démunis.
Il paraît que le secteur touristique est l’enfant pauvre de ce budget. Êtes-vous du même avis ?
Le secteur du tourisme est le seul secteur qui se porte bien. Il a connu une bonne croissance et il bénéficie d’une bonne stratégie. L’avenir s’annonce prometteur et beaucoup aimeraient que les autres secteurs de l’économie se portent tout aussi bien. En sus d’une bonne politique gouvernementale, les ouvertures dans ce secteur et la gestion des opérateurs ont contribué à la bonne santé de l’industrie touristique.
Nous voulons aller vers une ‘low carbon economy’. Pourtant il y a des projets comme le « pretroleum hub ». N’est-ce pas contradictoire ?
Il y aura toujours un compromis à faire. Il faut trouver le juste milieu. Il faut qu’il y ait des contrôles et la protection de l’environnement est un élément clé de la stratégie. Cependant, la réalité économique et l’efficacité doivent être prises en considération. Le cadre doit permettre la mise en place de n’importe quel projet aussi longtemps que les promoteurs respectent l’environnement, les lois en vigueur, créent des emplois et contribuent au développement économique du pays.
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