Les trois jours du World AI Show à l’hôtel Intercontinental, Balaclava, ont réuni certaines des sommités mondiales dans le domaine. Ils ont dressé un tableau du potentiel de l’intelligence artificielle et des possibilités qu’elle représente pour Maurice.
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L’intelligence artificielle (IA) représente-t-elle une réelle opportunité pour Maurice ? Si oui, dans quels secteurs ? Et quels sont les dangers qu’elle représente pour l’emploi ? Ce sont quelques-uns des points abordés lors du World AI Show 2018, qui a eu lieu à l’hôtel Intercontinental, Balaclava, du mercredi 28 au vendredi 30 novembre. Plusieurs sommités mondiales dans le domaine, dont des Mauriciens expatriés, ont livré des pistes de réflexion qui laissent penser qu’on peu se montrer optimistes pour peu que le gouvernement joue son rôle de facilitateur comme il convient.
Parmi les intervenants, David Millan, responsable des sciences des données et de l’IA chez Vodafone en Espagne, a donné une idée des applications les plus diverses de l’IA et des données en termes d’automatisation. «À travers l’IA, nous pouvons désormais déterminer quel est le meilleur moment pour envoyer des notifications, a-t-il expliqué, l’IA aide à faire des prédictions en comprenant le comportement de nos clients. »
Les assistants virtuels, a-t-il expliqué, deviennent de plus en plus proactifs. C’est notamment le cas de TOBi, l’assistant virtuel de Vodafone. « 80% de nos actions vis-à-vis de notre clientèle sont exécutées par l’IA, notamment les recommandations personnalisées que nous faisons, a-t-il expliqué, l’assistant virtuel comprend et apprend des habitudes de chaque client, il essaie même de prédire le mood d’une personne à tout moment. »
Mais qu’en est-il du potentiel d’exploitation pour Maurice ? Un panel comprenant Arjoon Suddhoo, président du Mauritius Research Council (MRC), Vishwa Nath Jha, CEO de Saarthi AI India, ainsi que Nicolas Brien, CEO France Digitale, et modéré par Tugce Ergul, directeur d’Angel Labs US, en a discuté. Arjoon Suddhoo a démarré en prévenant que l’utilisation de l’IA était énergivore et qu’il était d’autant plus important de verdir la production énergétique du pays afin de ne pas polluer le pays davantage.
Vishwa Nath Jha s’est également demandé où on allait trouver les gens compétents pour développer le marché ? Un sujet sur lequel a également rebondi Nicolas Brien, qui estime que la plupart des pays utilisent mal les compétences disponibles dans le domaine. « Il y a tellement de jeunes talents qui vont travailler pour des géants américains, a-t-il expliqué, mais leur travail consiste à maximiser le nombre de clicks. Pourquoi gaspille-t-on autant de temps sur les clicks ? Pourquoi on n’utilise pas l’IA pour résoudre des problèmes plus importats? » Selon lui, les données disponibles devraient avant tout être utilisées pour le bien public.
Sur la même ligne de pensée, Arjoon Suddhoo estime que l’IA est potentiellement une grande source d’emploi pour les jeunes. « Mais, nous sommes un pays qui doit voir pour croire, a-t-il déclaré, on pourrait utiliser l’IA pour améliorer la production de sucre par au moins 10%. Si une technologie présente un tel potentiel, le gouvernement, les universitaires et la société civile devraient y porter attention. C’est un 'game changer' pour le pays. »
Le président du MRC estime que Maurice devra se distinguer d’autres pays compétiteurs à travers la qualité, la véracité et la fiabilité des données offertes. « L’IA sera aussi bonne que seront vos données, a-t-il expliqué, nous devons offrir des données qui ne pourront être obtenues nulle part ailleurs. » Le modèle qu’il imagine est décentralisé et délocalisé. Il n’y aurait pas de nécessité d’être basé à Maurice pour en profiter, vu que le transfert de données coûte bien moins que le transfert de biens. « Tous les acteurs, où qu’ils soient, doivent se réunir en un réseau », a-t-il assuré.
Nicolas Brien a repris l’idée de réseautage, en expliquant que le transfert de données devait être impliqué dans les accords de libre échange négociés à l’avenir. « Il ne faut pas négliger le transfert de données, on ne construira rien sans des océans de données, a-t-il expliqué, les entreprises ont une grosse responsabilité, car elles ont les moyens d’y investir. » Ces données, a ajouté Vishwa Nath Jha, doivent être en accès libre. « Laissez les gens jouer avec librement. On ne sait jamais ce qu’il peut en sortir », a-t-il conseillé.
Le plateau du Grand journal de Radio Plus a également emménagé sur les lieux pour l’occasion le jeudi 29 novembre et les invités de Nawaz Noorbux ont, entre autres, abordé la question de l’emploi. Ce sont les postes à faibles compétences ou hautement répétitifs qui sont les plus menacés par l’IA.
Gopal Ramchurn, chargé de cours en IA à l’Université de Southampton, a résumé le problème : « Les études ont démontré que la majorité des employés à des postes peu qualifiés perdront leur job … Le problème, c’est qu’on ne sait pas encore quels seront les nouveaux emplois qui seront créés en conséquence de l’expansion de l’IA. »
Damien Gromier, de l’ONG France is AI, a également expliqué que l’IA se prêtait mieux aux tâches répétitives et que même certains postes à haute qualification pouvaient être menacés. « Les procédures de KYC (Know Your Client) dans les banques, par exemple, sont automatisées aujourd’hui alors qu’auparavant, cela se faisait à la main », a-t-il donné en exemple.
Le conseiller au Bureau du Premier ministre, Georges Chung, a tenté de rassurer en avançant que les seules postes qui seraient occupés par des robots à l’avenir seraient ceux pour lesquels on ne trouve plus de main d’oeuvre humaine.
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