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Shaama Sandooyea, activiste pour le climat : «Le nouveau gouvernement devra rendre des comptes pour tout ce qu’il fera mal»

Shaama Sandooyea

Les leaders de l’Alliance du Changement ont salué le rôle de la jeunesse mauricienne dans la victoire historique de 60-0. Que pense Shaama Sandooyea, jeune activiste pour le climat, de ce bouleversement politique qui a entraîné la défaite de l’Alliance Lepep ? Elle partage ses réflexions à Le Dimanche/L’Hebdo.

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Âgée de 27 ans, Shaama Sandooyea est une militante pour le climat de premier plan. Depuis plusieurs années, elle consacre son énergie à la cause environnementale. Forte d’une formation en biologie marine et en développement durable, elle a travaillé avec diverses organisations et institutions tant à Maurice qu’à l’international pour la protection des océans et de la biodiversité.

Pour Shaama Sandooyea, les résultats des législatives de 2024 traduisent un ras-le-bol généralisé de la population envers l’ancien régime. « Ce régime oppressait le peuple, notre culture, notre joie et notre façon de vivre en harmonie », explique-t-elle. Son constat : le gouvernement sortant n’œuvrait que pour ses propres intérêts, négligeant les besoins réels du pays. « Pendant dix ans, les choses se sont aggravées lorsque le Premier ministre sortant a pris le pouvoir. Nous avons vu comment il l’a utilisé à son avantage, suivi d’une série de scandales qui ont discrédité son administration », souligne-t-elle. 

Shaama s’appesantit sur l’impact désastreux des politiques de l’ancien gouvernement sur l’environnement. « Ils ont détruit notre écosystème sans se soucier des conséquences pour le pays. Ce manque de responsabilité a a fait régresser le pays », regrette-t-elle. Cette situation, selon elle, a poussé les Mauriciens à chercher une alternative et à opter pour un changement radical de gouvernement.

Concernant le nouveau gouvernement, Shaama se montre mesurée : « Bien qu’il y ait des figures politiques du passé comme Navin Ramgoolam, dont le mandat passé a été marqué par des controverses, ce qui est intéressant, c’est la présence de partis de gauche et de militants actifs pour l’environnement et les droits des travailleurs. C’est une bouffée d’air frais. » 

Toutefois, elle reste prudente : « Nous plaçons notre confiance dans ceux qui ont prouvé leur engagement pour la société. Nous espérons qu’ils travailleront pour faire avancer le pays. »

Les attentes sont « très élevées », affirme l’activiste pour le climat, car « nous sommes tombés bien bas avec l’ancien gouvernement ». Pour relever le pays et la nation, elle plaide pour une plus grande transparence et l’inclusion de la société civile, des habitants, des communautés locales, des jeunes, entre autres, dans les processus de décision. « Ce n’est pas uniquement le gouvernement qui redressera le pays, mais toute une population unie », fait-elle ressortir. D’ailleurs, « ce serait aussi intéressant de mettre en place une plateforme où les gens pourraient exprimer leurs opinions et contribuer à l’avancement du pays ».

Et quels sont, selon elle, les chantiers prioritaires ? Pour Shaama Sandooyea, il y a un travail considérable à accomplir dans des domaines tels que l’éducation, la culture, l’art, l’environnement, les crises climatique et sociale ainsi que la sécurité alimentaire notamment. Parlant du combat contre le changement climatique, elle regrette que « l’Accord de Paris n’ait pas encore été pleinement respecté par Maurice ». Elle va plus loin, insistant sur l’urgence de « déclarer un état d’urgence environnementale en raison de la crise climatique ».

Le pays a vécu, ces dernières années, des conditions météorologiques dangereuses, et désastreuses, qui ont perturbé la société et son fonctionnement. « Il est crucial que l’État prenne cette urgence environnementale au sérieux et sensibilise la population à ce qu’est réellement la crise climatique. » D’ailleurs, elle pense que le nouveau gouvernement doit élaborer un plan stratégique couvrant plusieurs secteurs tels que l’éducation, l’emploi, les transports, le port et la nature afin de s’adapter efficacement à la crise climatique. « Il est essentiel de privilégier l’écologie et la préservation de la biodiversité plutôt que de continuer à bétonner partout, comme cela a été fait sous le gouvernement sortant. »

Dans la foulée, la jeune activiste souhaite que l’Offshore Petroleum Act soit abrogé et que des projets tels que la transformation du port en un Petroleum Hub soient abandonnés. « Ce sont des projets anti-climatiques, en contradiction totale avec les enjeux des crises climatiques. »

Shaama Sandooyea souhaite, d’autre part, que l’ESA Bill soit adopté et que le terme « écocide » soit introduit dans la législation environnementale. « C’est une réforme extrêmement importante car, en ce moment, notre loi sur l’environnement n’est pas suffisamment stricte. » 

Réforme du système électoral

Par ailleurs, Shaama Sandooyea plaide pour une réforme juste et adéquate de la Constitution et du système électoral. « Ce serait une avancée majeure. Lors des prochaines élections, nous ne voulons pas nous retrouver dans une situation où il faut encore voter pour les mêmes personnes », dit-elle. 

La jeune femme souligne la nécessité d’un Parlement diversifié, inclusif et solide. « Avec un score de 60-0, nous nous retrouvons avec un Parlement sans opposition, ce qui est dangereux et peut ouvrir la voie à une dictature. C’est pourquoi la population doit être davantage impliquée dans la politique. » 

Pour favoriser cette implication, Shaama Sandooyea pense qu’il est important que le kreol morisien soit utilisé au Parlement : « Beaucoup de personnes ne comprennent pas forcément l’anglais ou le français. Les termes utilisés sont souvent assez techniques. Si la langue créole était utilisée, cela rendrait, selon moi, la politique plus accessible et encouragerait davantage de citoyens à s’impliquer »

Par la même occasion, elle plaide pour que le système judiciaire puisse fonctionner de manière indépendante. « Il ne faut pas placer les institutions sous le contrôle du gouvernement, mais qu’elles puissent travailler en toute indépendance. »

En ce qui concerne le secteur de l’emploi, Shaama Sandooyea suggère que le gouvernement encourage les emplois verts et soutienne les jeunes dans des programmes éducatifs sur l’écosystème dès l’école primaire. « Il est important de favoriser les cours dans ce domaine et de développer ce secteur, qu’il soit terrestre ou marin, afin d’intéresser davantage les jeunes. »

Shaama Sandooyea pense que le nouveau gouvernement devrait également mettre l’accent sur la science pour apporter des solutions concrètes, notamment dans le secteur de l’agro-industrie. Abordant l’utilisation excessive de produits chimiques, elle est d’avis que « si le gouvernement travaille à une transition vers un système d’agroécologie en favorisant la nature et en abandonnant les produits chimiques, il serait intéressant qu’il nous présente des indicateurs concrets. Par exemple, le nombre de personnes tombant malades ».

De même, des indicateurs concrets sur la violence domestique « nous permettraient de trouver des moyens efficaces pour contrer cette problématique ». Elle appelle également à un effort national pour venir à bout de la violence et assurer la sécurité de tous.

Ainsi, pour Shaama Sandooyea, un immense travail attend le nouveau gouvernement, ainsi que le peuple mauricien. Elle inclut également les Chagossiens, les Agaléens et les Rodriguais. « Il faut que le nouveau gouvernement songe à améliorer leurs conditions de vie. »

Selon la jeune activiste le nouveau gouvernement doit être conscient qu’il devra rendre des comptes pour tout ce qu’il fera mal. Pour elle, le « coup de pied » donné à l’ancien gouvernement est aussi un avertissement pour le prochain gouvernement « Le gouvernement doit faire son travail et ne pas penser qu’il a été élu pour toujours. Si le travail n’est pas fait correctement, le peuple mauricien n’hésitera pas à le mettre dehors. Prenez garde, le peuple mauricien n’est pas un mouton. »

 

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