Population vieillissante : quels remèdes ?

Le vieillissement de la population est un des défis majeurs que le pays aura à faire face au cours des prochaines décennies. Les implications socio-économiques sont énormes et ce phénomène affecte beaucoup d’autres pays également. Comment alors contrer les conséquences et mieux gérer ce changement démographique ?

On en parle depuis assez longtemps. La structure démographique mauricienne change drastiquement et ce pour plusieurs raisons : le taux de fécondité a baissé et le nombre de naissances diminue annuellement. À l’opposé, l’espérance de vie augmente. Ainsi, alors qu’en 2017,  il y avait 4,3 personnes actives pour soutenir chaque personne âgée, ce taux baissera à 2,4 personnes pour chaque retraité, en 2037 et 1,7 pour chaque personne âgée, en 2057.

Dans le cadre des consultations pré-budgétaires, Business Mauritius a soulevé la question du vieillissement de la population et a proposé quelques mesures pour atténuer les effets. De son côté, la Mauritius Commercial Bank, dans son dernier numéro de MCB Focus, traite le sujet en large, tirant la sonnette d’alarme et proposant des solutions. Selon cette publication, la proportion de personnes âgées sera de 23 % de la population totale, en 2027 et atteindra 35 % en 2057, alors que le chiffre était de seulement 16 % en 2017. 

La pension

Tous les gouvernements successifs ont toujours eu une considération spéciale pour la pension de vieillesse. Le montant de base a augmenté de Rs 675 en 1995 à Rs 5 000 en 2015. Aujourd’hui, un retraité touche Rs 6 210. Le nombre de bénéficiaires s’élève à plus de 221 000, alors que le budget pour le paiement des allocations atteindra Rs 21 milliards en 2020-2021. Il est estimé que le nombre de bénéficiaires sera d’environ 325 000, en 2037, alors que la population active, âgée entre 15 et 64 ans connaîtra une baisse drastique. 

Les implications

Le rapport MCB Focus explique de façon très technique les implications d’une population âgée sur l’économie. En langage simple, cela veut dire que le gouvernement devra trouver plus d’argent pour pouvoir payer la pension. Or, les revenus publics seront affectés par deux facteurs principaux : d’abord, il y aura moins de contribuables pour payer l’impôt, ensuite une baisse de la consommation entraînera une baisse des recettes de la TVA. En revanche, les dépenses sur la santé augmenteront. Mais certains observateurs pensent que l’État aura, aussi moins, à dépenser sur l’éducation, la jeunesse et les enfants, donc l’argent économisé sur ces items peut être réorienté vers les retraités. 

Les mesures

Cela fait longtemps que les autorités encouragent les couples à avoir plus d’enfants, mais pour les travailleurs sociaux, cela a un coût. Dans cette optique, MCB Focus préconise une augmentation des allocations familiales pour aider financièrement les parents à compenser le coût de l'éducation des enfants, ou encore offrir un soutien additionnel aux parents, tout au long, de la petite enfance sous forme de congé parental payé, l'accès aux garderies, des services de garde, en dehors des heures de classe pour les enfants des écoles primaires, des visites d'infirmières à domicile, etc. Elle veut aussi promouvoir une culture d’épargne parmi les jeunes.

Zohra Gunglee : « La pension ne doit pas être vue comme un fardeau »

Zohra Gunglee, économiste, est d’avis que la pension va encore augmenter, surtout à cause des surenchères politiques, mais elle estime que cela sera très favorable à nos ainés qui pourront vivre mieux. « Les pensionnés méritent amplement une augmentation conséquente, car ceux qui ont travaillé toute leur vie et ont contribué à l’expansion de l’économie doivent pouvoir en récolter les fruits », dit l’économiste. À la question, si une hausse de la pension serait un fardeau sur l’économie, elle rétorque que toutes les dépenses publiques ont un poids économique, mais on dépense quand même, alors pourquoi toujours cibler la pension quand il s’agit de rationaliser les dépenses. « On peut réduire d’autres dépenses publiques afin de donner une priorité à la pension de vieillesse », dit-elle. 

Radhakrishna Sadien : « Ce n’est pas le travailleur qui a décidé de ne plus travailler »

Radhakrishna Sadien, président de la Government Services Employees Association, explique que le but de la pension de vieillesse est de soutenir une personne âgée qui cesse de travailler, à l’âge de 60 ans. Maintenant, si on veut le faire travailler encore, on ne peut lui ôter sa pension. « Ce n’est pas le retraité qui veut travailler encore, mais c’est l’autorité qui  repousse l’âge de la retraite, alors on ne peut dire qu’on va stopper le paiement de la pension à l’âge de 60 ans, parce que la retraite est à 65 ans », explique le syndicaliste.