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Pollutions en masse : des fêtards prennent d’assaut les ilôts

Une cinquantaine de hors-bord, des DJ, les décibels à fond la caisse, une piste de danse aménagée dans l’eau ou sur la plage et les boissons alcooliques. Nous n’évoquons pas une fête à Ibiza ni à Miami. Mais celles tenues sur les îles autour de Maurice. Quid de l’environnement ?

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Une fête privée ou Rave Party, comme les jeunes le surnomme. Ces surboums ont lieu annuellement et pendant la journée sur plusieurs îles autour du pays : île-aux-Bénitiers, île-aux-Bernaches, îlot Mangénie et île-aux-Cerfs, entre autres. « Nous recevons cette invitation à travers nos amis en ligne sur les réseaux sociaux. Cette fête est privée et elle est organisée une fois l’an », confie Rudolf, un des participants. Ces jeunes se rendent sur l’île de prédilection par des hors-bord. « La majorité d’entre nous en possède un et si certains n’en ont pas, leurs amis les transporteront dans les leurs. C’est une fête organisée entre nous et nous ne sollicitons l’aide de personne. »

3 janvier 2017. C’est la dernière fête qui a eu lieu. Elle s’est tenue sur l’île-aux-Bénitiers. Free Beach & Lagoon Party, c’est le nom de cet événement qui s’est déroulé sur l’étendue de sable fin de cette île. « Comme nous habitons La Gaulette et nous avons un bateau, nous nous profitons pour venir s’amuser entre amis », affirme Harris, un des fêtards. Si l’île-aux-Bénitiers se transforme en boîte de nuit pendant la journée, par contre, sur les autres îles, les fêtards privilégient la mer et la jetée comme piste de danse. Par exemple, sur l’île-aux-Bernaches, les installations pour la sonorisation de la fête, qui a eu lieu la dernière semaine de décembre, ont été placées sur l’île,  mais dans un périmètre sécurisé. D’ailleurs, plusieurs clips sur ces fêtes sont disponibles sur YouTube.

Dans l’un des clips disponibles en ligne, intitulé Bernache Party Mauritius 2015, on peut voir des jeunes déchantés qui s’éclatent sous le soleil, où l’alcool coule à flot dans les pirogues et les hors-bord. Ces fêtes peu médiatisées sont connues dans ces régions, comme témoigne Kevin, un skipper de la région. « Plus de 50 % de ces jeunes possèdent leur embarcation. Ils débarquent très tôt, chargent les hors-bord avec de la nourriture et des boissons, avant de mettre cap sur l’île. Si certains n’ont pas un moyen de transport, leurs amis les emmèneront. Personne n’osera solliciter nos bateaux pour les transporter. Qui plus est, très peu de gens oseront s’approcher de ces fêtes dites privées. »

L’environnement est-il en danger ?

Les déchets, indiquent le skipper, sont ramassés par ces jeunes après la fête. « Ils vont ramasser leurs cannettes de bière et bouteilles avant de partir. » Toutefois, au niveau du service de surveillance côtière (National Coast Guard — NCG), c’est un autre son de cloche. « Ces fêtards sur certaines îles laissent leurs déchets sur place. Ce sont les plaisanciers ou les employés d’hôtels qui doivent nettoyer. La raison : des touristes sillonnent ces îles. De fait, la propreté doit régner », lâche un officier du NCG.

Khoudijah Maudarbocus-Boodhoo, directrice de la Tourism Authority (TA) et le Dr Dhuneeroy Bissessur, directeur général de la Beach Authority (BA), soutiennent qu’ils ne sont pas concernés par ces fêtes sur les îles. « Ces îles sont placées sous l’égide des différents ministères et d’autres sont gérées par des compagnies. » Mais l’officier du NCG souligne que la TA a des responsabilités à assumer. « Ces hors-bord sont surchargés et à la fin des fêtes, certains sont ivres », rétorque le garde-côte. Du côté du ministère de l’Agro-industrie, un cadre affirme que « nous devons enregistrer des plaintes pour agir en conséquence sur ces îles qui relèvent de notre juridiction. »

Pollution sonore dénoncée

Du côté de la Police de l’Environnement, on soutient que des plaintes de pollutions sonores ont déjà été enregistrées concernant ces fêtes sur les îles. « Nous travaillons en étroite collaboration avec le National Coast Guard (NCG), car nous ne possédons pas de bateau. Nous sommes déjà en présence d’une plainte, ces dernières années, concernant la pollution sonore sur l’île-aux-Bénitiers. Par la suite, nous avons pris en contravention l’organisateur. Lorsqu’un permis est délivré pour ce type de fête, les organisateurs sont déjà avertis », explique l’inspecteur Jean Nobin Brasse de la Police de l’Environnement.

Un officier du NCG, posté sur le littoral nord de Maurice, abonde dans le même sens. « Un politicien résidant dans le Nord du pays avait déjà contacté un poste de police pour se plaindre des décibels et le brouhaha sur l’île-aux-Bernaches. Nous avons dû mobiliser les policiers de Grand-Gaube, Poudre-d’Or et des éléments du NCG pour se rendre sur l’île. Il y avait entre 100 à 200 personnes qui faisaient la fête. »

Canettes de boissons alcooliques, bouteilles et capsules retrouvées

Jacqueline Sauzier, présidente de la Mauritius Marine Conservation Society, signale qu’il n’y a aucune étude menée après l’organisation des fêtes sur les îles autour de Maurice. D’autre part, elle fait ressortir  qu’aucune plainte n’a été enregistrée à ce jour. Mais la présidente reconnaît que « si une cinquantaine de hors-bord sont en stationnement sur un banc de sable et des jeunes y font la fiesta, cela pourrait être néfaste à l’environnement marin ». Il y a quelques années, souligne Jacqueline Sauzier, au cours d’une plongée à l’île-aux-Bénitiers, des cannettes de boissons alcooliques, des bouteilles et des capsules ont été découvertes après une surboum.

 

 

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