Nomination controversée : interrogations sur l’indépendance du nouveau directeur de l’Audit 

Dharamraj Paligadu saura-t-il faire preuve de la même fermeté que ses prédécesseurs ? Cette nomination suscite bien des polémiques.

La nomination controversée de Dharamraj Paligadu au poste de directeur du Bureau de l’Audit soulève une série d’interrogations. Sa recommandation par le secrétaire au Cabinet, plutôt que par la Public Service Commission (PSC) après consultation avec le Premier ministre et le leader de l’opposition, conformément à l’article 110 de la Constitution, fait sourciller. De plus, des questions sont soulevées quant à son impartialité.

L’ancien secrétaire au cabinet, Sateeaved Seebaluck, fait ressortir que Dharamraj Paligadu sera d’emblée confronté à une situation de conflit d’intérêts. « Il sera appelé à auditer des décisions qu’il a lui-même prises lorsqu’il occupait le poste de Deputy Financial Secretary », explique Sateeaved Seebaluck. 

Un autre fonctionnaire, qui déclare avoir côtoyé Dharamraj Paligadu sur le plan professionnel, est d’avis qu’il ne devrait pas y avoir de grandes inquiétudes quant aux compétences du nouveau titulaire au poste de directeur du Bureau de l’Audit. « Il a commencé au ministère des Finances comme analyste et a, au fil du temps, fait ses preuves en travaillant sur un certain nombre de projets nationaux. Son expérience et sa rigueur ne devraient donc pas être un souci », affirme-t-il. 

Mais là où il pourrait y avoir certaines inquiétudes, c’est au niveau de sa fermeté. « Sera-t-il capable de sortir le bâton et de faire preuve de sévérité, comme l’ont fait d’anciens directeurs de l’Audit dans le passé ? » s’interroge notre source. En effet, si Dharamraj Paligadu a, selon ses anciens collègues, abattu un très bon travail au ministère des Finances, il a cependant la réputation d’avoir de tout temps incarné le rôle de « bon fonctionnaire consensuel ». 

Ainsi, pour ceux qui l’ont côtoyé, Dharamraj Paligadu devra très vite adopter une nouvelle attitude. « Il n’a jamais été capable de hausser le ton ou de faire part de son désaccord à un ministre des Finances lorsque ce dernier faisait fausse route sur une décision ou un projet. Sera-t-il en mesure d’émettre des critiques sévères à l’encontre d’un ministère lorsqu’il détectera des anomalies, ou se contentera-t-il de faire preuve de complaisance ? » se demande un de ses anciens collaborateurs. 

Par ailleurs, bien que tous les anciens collègues de Dharamraj Paligadu soient convaincus de sa neutralité politique, ils s’accordent cependant à dire que la décision de le nommer directeur du Bureau de l’Audit est loin d’être anodine. « L’ancien directeur du Bureau de l’Audit a fait preuve de beaucoup de sévérité dans ses critiques envers plusieurs ministères. Il est possible que le gouvernement cherche maintenant une personne plus conciliante », laissent-ils entendre.

Le président de la State Employees Federation (SEF), Radhakrishna Sadien, souligne que Dharamraj Paligadu devra constamment se rappeler qu’il assume d’importantes responsabilités. « Nous parlons d’un poste constitutionnel et la population s’attendra à ce qu’il fasse preuve d’impartialité. Il devra montrer qu’il n’a pas peur et qu’il n’a nullement l’intention de protéger le gouvernement », avance le syndicaliste.  

Les réponses aux questions qui se posent actuellement seront obtenues dans le prochain rapport de l’Audit, ajoute Radhakrishna Sadien. « Les Mauriciens ont toujours eu l’habitude de rapports rigoureux et continueront d’avoir les mêmes attentes », dit-il. Le nouveau directeur de l’Audit devra également veiller à suivre les anomalies relevées par son prédécesseur, en particulier au ministère de la Santé.

L’ancien ministre et directeur du Bureau de l’Audit, Kadress Pillay, analyse la situation sous un tout autre angle. « Nommer un directeur de l’Audit externe n’est pas en soi un problème. Cependant, cela ne donne-t-il pas un certificat d’incompétence aux employés du Bureau de l’Audit ? Si l’on a refusé de nommer un membre du personnel du bureau en tant que directeur, cela montre qu’on ne fait pas confiance à leurs compétences », fait-il remarquer. 

Selon Kadress Pillay, seul l’avenir nous dira si Dharamraj Paligadu fera preuve de caractère et de résilience, en se basant sur ses prochains rapports.