Du secteur manufacturier aux services financiers, la participation de la femme dans le marché du travail à Maurice a évolué au fil des années. Cependant, bien qu’il y ait eu une amélioration, le taux de chômage reste plus élevé chez les femmes que chez les hommes.
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203 000. C’est le nombre de femmes qui sont embauchées dans des activités économiques actuellement, selon les derniers chiffres du bureau des statistiques. Quant aux hommes, ils sont un total de 321 800 à être employés. L’écart de plus de 100 000 employés entre les hommes et les femmes dure depuis des années. Et il existe plusieurs raisons qui expliquent cela.
Une percée dans le secteur des services financiers
Le rôle de la femme dans l’économie mauricienne a bien changé durant ces 20 dernières années. C’est ce qu’avance l’économiste Takesh Luckho. « On est passé d’une position de « femme au foyer » à celle de la « femme épanouie » qui travaille aujourd’hui dans les secteurs public et privé et aussi à son propre compte », dit-il.
Toutefois, l’économiste Eric Ng avance que le taux d’activité chez les femmes est en baisse par rapport aux années 90. « Avec la fermeture des usines, beaucoup de femmes n’ont pas repris le chemin du travail, car elles n’avaient pas d’autres compétences », indique-t-il. Cependant, il affirme qu’au fil des années, les femmes ont fait une percée dans le secteur des services financiers. « D’ailleurs, les statistiques démontrent que dans les services financiers, y compris les banques et l’assurance, il y a plus de femmes que d’hommes qui travaillent », soutient l’économiste.
Une observation aussi notée par Beelal Baichoo, COO chez RockFin. « Je note un nombre toujours croissant de femmes dans le secteur. « Compte tenu du profil de RockFin, le secteur financier représente un marché important pour nous et je suis impressionné de voir l’implication proactive des dames et jeunes filles à tous les niveaux », dit-il. Dans certaines entreprises, il soutient que le rapport homme/femme est clairement en faveur de cette dernière.
Les raisons qui expliquent la prépondérance des femmes dans les services financiers demeurent certes les qualifications nécessaires, mais aussi le fait que certains postes sont plus appropriés occupés par les femmes que les hommes. « Il y a des métiers qui demandent des compétences féminines, notamment dans le secteur bancaire et dans l’assurance », affirment nos interlocuteurs.
Chômage : un manque de volonté chez les femmes
Takesh Luckho souligne qu’il faut disséquer et comprendre pourquoi le pourcentage de la participation féminine dans l’économie mauricienne est de 43%. En effet, il explique que la moitié de la gent féminine ne sont pas parties prenantes dans les activités économiques du pays. « Le taux de chômage élevé chez les femmes, accompagné par un manque de volonté des femmes à participer dans le marché du travail, doit être un sujet de recherche prioritaire pour les autorités du pays », fait-il ressortir.
Eric Ng abonde dans le même sens. Ce dernier indique que le chômage féminin est deux fois plus élevé que le chômage masculin. « Premièrement, on constate que des femmes quittent volontairement le marché du travail pour s’occuper des enfants à la maison », fait-il savoir. Par ailleurs, il affirme que beaucoup de femmes au-delà de 60 ans qui peuvent toujours travailler préfèrent prendre leur retraite en raison d’une pension de vieillesse assez élevée.
Salaires : l’écart se réduit
L’économiste Takesh Luckho estime qu’il y a une amélioration dans les salaires pratiqués entre les femmes et les hommes. « Dans beaucoup de secteurs, notamment dans la fonction publique, on est très proche de la parité », fait-il comprendre.
Pour sa part, Eric Ng est d’avis que les salaires des postes équivalents sont plus ou moins les mêmes. « S’il y a des différences entre les salaires, c’est principalement en raison de la productivité. Si une personne travaille des heures supplémentaires et prend plus de responsabilités, elle/il sera certainement mieux rémunéré à la fin », affirme-t-il. Par ailleurs, il soutient que dans le secteur public, les salaires sont définis et statutaires en fonction des postes. « Du coup, la question de discrimination salariale ne se pose même pas », appuie Eric Ng.
Horaires flexibles et garderie sur le lieu de travail
Beelal Baichoo avance que s’occuper des enfants et des tâches ménagères est une habitude des femmes qui n’est pas près de disparaître. « Il faut donc trouver un moyen pour que les femmes puissent avoir cet équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Des facilités comme des horaires flexibles, une garderie sur le lieu de travail et d’autres mesures similaires pourraient accompagner nos dames dans leur vie professionnelle », propose-t-il.
Comment progresser davantage ?
Encourager le travail hybride
Pour encourager plus de femmes à participer dans le monde du travail, Takesh Luckho est d’avis qu’il faut avant tout comprendre pourquoi ces dernières ont décidé d’être inactives. « Un des arguments qu’on entend souvent est en raison des enfants. Dans un monde post-Covid-19 où la technologie a pris une grande importance, un modèle de travail hybride peut aider à encourager plus de femmes à rejoindre le marché du travail », suggère-t-il.
Un avis que partage Eric Ng. « Les femmes doivent avant tout avoir la motivation de rejoindre le marché du travail », avance-t-il. Pour ce faire, dit-il, il faut leur donner les moyens pour qu’elles puissent assurer un équilibre entre la vie professionnelle et personnelle.
La mise en place d’un système de « discrimination positive »
Les politiques de discrimination positive ont été mises en place au début des années 1960 aux États-Unis par le président Kennedy. Au départ, il s’agissait de s’assurer qu’il n’existait pas de discrimination raciale à l’embauche. Selon Takesh Luckho, cette pratique a été également adoptée par certains pays européens. « On doit adopter cette pratique à Maurice. À travers cette politique, il y aura plus d’opportunités d’emploi réservées aux femmes », déclare-t-il.
Bâtir un réseau en dehors des heures du travail
Pour Eric Ng, le travail ne doit pas être restreint au bureau de 9 heures à 4 heures. « Pour pouvoir avancer dans sa carrière, la femme doit pouvoir également bâtir un réseau en dehors des heures du travail. Cela, à travers la participation dans des activités sociales, dans des formations et dans des événements de Networking », recommande-t-il. C’est ainsi, dit-il, que les femmes seront en mesure de créer des contacts professionnels et de progresser dans le monde du travail.
En chiffres
L’emploi des femmes par rapport aux hommes (troisième trimestre de 2022)
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