Le contenu du manuel scolaire renferme tout ce que l’élève doit étudier pour être promu en classe supérieure. Cependant, les conditions de la commercialisation de ces livres sont souvent pointées du doigt. Qu’en est-il au juste ? Faisons le point avant la rentrée de 2019.
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Gratuit et payant au primaire
Gratuité de l’écolage à l’île Maurice signifie également gratuité des livres scolaires pour les enfants du primaire. Le but de cette règle est de permettre à tous les enfants d’avoir un accès gratuit à l’éducation. Les manuels préparés par le Mauritius Institute of Education (MIE) sont distribués gracieusement aux enfants des écoles publiques mais sont payants pour les enfants des Fee Paying Schools. Un responsable du ministère nous explique que c’est une décision politique qui date de plusieurs années. Le principe serait que ces Fee Paying Schools, comme leur nom l’indique, fonctionnent en faisant payer pour les services qu’elles offrent.
Notre interlocuteur nous confie que selon la pratique, chaque année, les chefs d’établissements concernés passent leurs commandes respectives auprès du ministère. Ils viennent par la suite récupérer leurs copies au store où ils effectuent leur paiement (pratiquement, le cost price), et les revendent ensuite à leurs élèves. Toutefois, le ministère a peu de contrôle sur le prix de revente.
Selon nos informations, les livres se vendent dans une fourchette de Rs 300 à Rs 600, selon les classes du primaire. Rajcoomar Baichoo, le directeur d’Orchard Kids, estime que tous les écoliers devraient bénéficier de la gratuité des manuels. « Nous ne pouvons pas avoir deux catégories d’enfants à l’île Maurice. Ils utilisent tous les mêmes manuels et suivent le même programme d’études conduisant au Primary School Achievement Certificate (PSAC). »
Disponibilité des manuels
La rentrée 2019 a été fixée au 11 janvier pour l’exercice d’admission en Grade 1 et Grade 7. Les autres élèves reprendront le chemin de l’école le lundi 14 janvier. Mais qui dit rentrée des classes dit aussi nouveaux manuels. Or, à ce jour, tous les ouvrages ne sont pas encore sur les rayons. Les libraires assurent que ce sera fait avant la rentrée des classes. Plusieurs raisons sont à l’origine du retard dans la livraison des livres. Mahmad Mittoo de BM Bookcentre évoque les commandes venant de différents collèges. « Les chefs d’établissements auraient dû passer leurs commandes au plus tard au début du 3e trimestre. La plupart d’entre eux ne l’ont pas fait. C’est ce qui occasionne du retard… ainsi les derniers livres seront livrés au début du mois de janvier, selon ce qu’ils arriveront par bateau ou par avion… »
Quant aux livres de Grade 8, les mathématiques sont déjà sur le marché. L’anglais, le français, la littérature anglaise et l’arabe seront sur les rayons dès le 15 décembre. Une semaine plus tard, soit à partir du 22, les parents pourront avoir les livres de littérature française, de Business and Entrepreneurship et d’Art & Design. Les autres titres seront mis en vente en début d’année.
Coût des livres
Grade 7 Rs 1 000 à Rs 1 500 (excluant les langues orientales)
Grade 8 Rs 1 400 à Rs 1 600
Grade 9 Rs 2 500 à Rs 3 500
Grade 10-11 Rs 3 000 à Rs 4 000
Grade 12-13 Rs 4 000+
Les «nouvelles» éditions
Les parents doivent souvent acheter des manuels publiés par de nouvelles éditions. Or ils soulignent qu’en y regardant de plus près, il n’y a que quelques pages seulement qui sont différentes.
Sailesh, auteur de livres d’économie pour le SC et le HSC, nous confie que les nouvelles éditions ne se font pas chaque année. Cependant, il explique qu’il y a « régulièrement des changements au niveau des programmes d’étude de Cambridge International ». « En tant qu’auteurs, il est de notre devoir de mettre sur le marché des livres qui correspondent à la classe dans laquelle est inscrit l’élève, afin qu’il puisse réussir ses examens », insiste-t-il.
Au niveau du ministère de l’Éducation, il est indiqué que les manuels choisis par les chefs de département doivent correspondre au programme d’études et doivent impérativement le couvrir complètement. C’est le minimum requis.
À titre d’exemple, cette année, le programme d’étude des mathématiques au niveau du School Certificate (SC) a changé et il a fallu d’autres manuels. En 2020, le questionnaire d’Additional Mathematics sera modifié. Certains chapitres comme Matrix, Sets, Relative Velocity ne seront plus au programme. D’autres seront rajoutés, comme les concepts de Modulus et Cubic, et, au chapitre Series, apparaîtront Arithmetic et Geometric Progression.
Un autre changement en 2020 concernera le questionnaire de General Paper. Toutes ces évolutions pédagogiques ont pour conséquence des changements dans le contenu des livres afin de respecter le programme d’études. Parmi les nouveautés, il y aura davantage de vocabulaire et l’élève devra travailler sur les synonymes (comparaisons) et les antonymes (oppositions).
Avec les nouvelles éditions, les libraires doivent détruire les anciennes copies. « Dans certains cas, nous avons un préavis pour les livres qui ne seront plus utilisés. Nous devons par la suite détruire les livres. Même si nous gérons notre stock avec attention, chaque année il y a toujours des problèmes qui se posent », regrette Ahmad Sulliman.
Les élèves nécessiteux
Il existe une catégorie d’élèves admis dans les collèges de l’île et qui reçoivent gratuitement leurs manuels scolaires. Ils sont connus comme les Needy Students (élèves nécessiteux) du cycle secondaire. Ils sont choisis selon les conditions émises par le ministère de la Sécurité sociale.
Une fois les procédures respectées, la direction du collège fait l’acquisition des livres (selon une liste préétablie et provisoire) auprès des libraires. La formule permet aux élèves d’obtenir gratuitement les livres qui seront utilisés durant l’année et conservés comme livres de référence durant leur scolarité.
Les bénéficiaires sont ceux qui reçoivent une aide sociale ou une allocation chômage ; ceux dont les parents auraient été éligibles à une aide sociale s’ils n’étaient pas bénéficiaires d’une pension de base (pension de vieillesse, pension de veuve, pension d’invalidité, pension d’orphelin) ; ceux qui sont issus d’une famille enregistrée au Social Registry of Mauritius (SRM).
Les parents concernés doivent se rendre à l’établissement secondaire que fréquentera leur enfant en 2015, afin d’obtenir un formulaire signé par le chef d’établissement. Ce formulaire doit ensuite être présenté au bureau de la Sécurité Sociale le plus proche. Une fois les procédures respectées, les parents doivent retourner le formulaire au chef d’établissement qui se chargera des procédures pour l’acquisition et l’octroi des livres. Ces manuels sont achetés avec les fonds des PTAs et la somme déboursée est, par la suite, rendue par le ministère.
Mahmad Mittoo, quant à lui, estime que le ministère de l’Éducation et la Private Secondary Education Authority (PSEA) auraient dû faire l’acquisition des manuels qui seront nécessaires à leurs élèves. Par la suite, les responsables des collèges en auraient pris livraison pour les distribuer aux élèves dans le besoin. Cette formule, dit-il, devrait aussi permettre aux élèves de retourner les livres à la fin de l’année afin qu’ils soient, par la suite, redistribués à d’autres élèves l’année suivante.
De son côté, Ahmad Sulliman, directeur des Éditions Le Printemps, souligne qu’il n’a pas de problème avec le paiement des livres distribués aux Needy Students. « Nous avons signé un contrat avec la PTA du collège stipulant que le paiement doit être effectué dans un délai de 60 jours. Depuis sa mise en place, les clauses sont respectées et cela marche. »
Manuels achetés non-utilisés
«Je ne comprends pas pourquoi le collège nous demande d’acheter des livres que les enfants utilisent rarement. Ces livres ne sont pas donnés et les enfants ne l’apportent pas en classe », déplore Anne-Marie. Cette mère de famille a une fille en HSC qui a choisi les sciences. Youven, qui a participé aux examens du SC en comptabilité, avance que s’il devait « apporter tous mes livres au collège, je devrais prendre une valise, car ils sont énormes et lourds… »
Anne-Marie ajoute que ces manuels coûtent Rs 800 et plus. Elle pense que les enseignants devraient faire un tri pour savoir quels livres seront vraiment utiles, au lieu de demander d’en acheter autant. « Au cours de l’année scolaire, les enseignants demandent aux élèves d’acheter des test papers. Dans la plupart des cas, ils ne figuraient pas sur la liste des livres au début de l’année », déplore la mère de famille.
Le pédagogue Mahend Gungapersad souligne l’importance des manuels dans la vie d’un apprenant. « On achète les livres pour avoir des explications sur un sujet précis inscrit dans le programme d’étude. Il y a aussi des exercices permettant aux élèves de travailler et trouver des références. Les gros livres sont complets, ils contiennent davantage d’informations, des exercices et des notes », précise-t-il.
Il existe aussi certains cas, selon ce spécialiste, où l’enseignant, pour une raison ou une autre, n’arrive pas à travailler sur la totalité du contenu d’un livre. « Nous avons dans nos classes des élèves de différents niveaux. Cela freine un peu le travail qui ne permet pas toujours de terminer le livre, mais nous devons faire avec notre classe. Mis à part le livre principal en chaque matière, il y a aussi des à-côtés que nous devons prendre en compte. Souvent des profs se penchent sur d’anciens test papers et y préparent aussi leurs propres devoirs pour faire travailler les élèves. En général, c’est mieux de couvrir l’ensemble d’un livre, mais ce n’est pas toujours possible. »
Mahend Gungapersad ajoute qu’un manuel est un livre de référence que les élèves peuvent utiliser pour parfaire leur connaissance, étudier à leur rythme ou pour comprendre un chapitre après l’explication du professeur en classe. « Toutefois, si un enseignant n’arrive pas à compléter une partie d’un livre, les parents peuvent définitivement demander des éclaircissements. »
Normalement, dans leurs weekly ou daily lesson plans, les enseignants préconisent en avance les chapitres qu’ils vont couvrir, ou telle ou telle partie d’un livre, et s’ils n’arrivent pas à le faire, alors ils doivent des explications à leurs Head of Department ou Head of School. Parfois, l’absence répétée des profs ou des élèves, le mauvais temps, des activités scolaires tombant le même jour de la semaine, font que les enseignants n’arrivent pas à couvrir leur programme.
« Toutes les excuses peuvent être mises en avant pour ne pas terminer un livre d’étude, mais cela ne doit pas être un prétexte pour ne pas en travailler une large portion. Dans de tels cas, les élèves peuvent attirer l’attention de leur professeur sur cette situation à la fin du premier trimestre et même à la moitié du second trimestre et non pas attendre la fin de l’année. »
Mahend Gungapersad fait ressortir qu’en général les enseignants rigoureux arrivent à couvrir le programme inscrit dans les manuels.
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