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Les nominations sous tension : entre blocages et rupture avec le passé

Le gouvernement de Navin Ramgoolam, en quête de rupture, prend son temps pour nommer les responsables des principales institutions, un retard qui suscite interrogations et frustrations.

Le gouvernement tarde, ou plutôt prend son temps, à compléter le puzzle institutionnel. La Public Service Commission, la Disciplined Forces Services Commission, ou encore la Local Government Service Commission restent sans présidents ni membres désignés. D’autres institutions sont encore dépourvues de responsables. Un retard qui alimente interrogations et frustrations, alors même que l’Exécutif revendique une approche renouvelée dans ses choix.

Trois mois après les élections législatives, les nominations tardent toujours à venir. Habituellement, elles suivent l’installation d’un gouvernement, mais cette fois, l’attente s’éternise. La Public Service Commission (PSC) et la Disciplined Forces Services Commission (DFSC), responsables du recrutement et des promotions dans la fonction publique, tournent au ralenti, leurs décisions étant suspendues à ces désignations. Même paralysie du côté de la Local Government Service Commission (LGSC), pourtant cruciale pour le bon fonctionnement des Collectivités locales. Résultat : des dossiers qui s’accumulent, des postes vacants et des fonctionnaires plongés dans l’incertitude.

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L’analyste et observateur Faizal Jeerooburkhan reconnaît que le gouvernement a pris « certaines bonnes décisions en accord avec son programme », mais pointe aussi des failles. « L’une d’elles concerne les nominations. Ils avaient promis d’instaurer des comités pour choisir les responsables des institutions clés. Or, en attendant, ces désignations se font au petit bonheur », regrette-t-il.

Mécanisme mal perçu

L’observateur Jocelyn Chan Low est, lui, d’avis qu’il faut prendre du recul. « C’est trop prématuré pour juger. Après la victoire de l’Alliance du Changement en novembre 2024, il y avait une urgence à placer certaines personnes à la tête d’institutions clés. Il fallait remplacer ceux en poste par des figures issues du nouveau régime. Certaines nominations ont été dictées par des affiliations politiques », constate-t-il, citant notamment la Banque de Maurice, où Rama Sithanen a été nommé Gouverneur.

Mais ce mécanisme, soutient Jocelyn Chan Low, est mal perçu. « Ces nominations concernent en grande partie des personnalités du troisième âge », souligne-t-il, dénonçant une logique du « Salut les copains ». « Il est compréhensible que certains postes stratégiques aient dû être pourvus rapidement, notamment en raison des changements attendus dans la politique monétaire. Mais la question est de savoir comment cela va se passer pour les autres postes. Il faudrait attendre l’institution du comité promis par l’Alliance durant la campagne pour analyser la suite des nominations », estime-t-il.

La méritocratie finira-t-elle par s’imposer ? « Il faut voir comment les choses évoluent. Plus de 100 jours se sont déjà écoulés », note-t-il. Concernant la nomination des ambassadeurs, Jocelyn Chan Low rappelle que le processus est plus long. « Cela dépend du pays hôte et nécessite des consultations en cours », précise l’intervenant.

« Right man in the right place »

Pourquoi un tel retard ? Au niveau du Prime Minister’s Office (PMO), on balaie toute idée de flottement ou de tensions internes. « Ce n’est pas que les leaders de l’alliance peinent à accorder leurs violons. Les choix ont été faits depuis longtemps. Il n’y a aucun conflit entre eux sur les nominations », assure-t-on. Des personnalités respectées ont déjà été désignées. Le gouvernement revendique ici une rupture avec son prédécesseur. « Ceux qui ont été nommés sont neutres, spécialistes dans leurs domaines respectifs. L’objectif a été de placer « The right man in the right place ». Un choix logique, puisqu’il s’agit de personnes compétentes », fait-on valoir. Parmi elles : Gilbert Gnany, ancien cadre de la MCB, désormais conseiller au ministère des Finances ; Gérard Sanspeur, ex-haut cadre du privé, nommé Deputy Governor de la Banque de Maurice ; Vijay Makhan, diplomate recruté pour conseiller le Premier ministre adjoint Paul Bérenger sur les affaires étrangères ; Maurice Allet, fin connaisseur du secteur portuaire ; ou encore Rama Sithanen, économiste désormais à la tête de la Banque de Maurice.

Dans les milieux proches du gouvernement, on fait remarquer que c’est une pratique courante de nommer des personnes proches du pouvoir à des postes de responsabilité moyennant qu’elles aient les compétences requises. On cite à ce propos l’exemple des États-Unis où le président nouvellement élu comme des personnes qui lui sont proches.

Anciens fonctionnaires rappelés

Faizal Jeerooburkhan rappelle que les nominations sous l’ancien régime posaient déjà problème, en particulier celles de fidèles dont la compétence laissait à désirer. « C’est une tendance que nous observons encore aujourd’hui », déplore-t-il. Autre source d’inquiétude : le retour d’anciens fonctionnaires à des postes clés. « Ce n’est pas correct. Il existe des personnes compétentes pour les remplacer, mais on ne fait pas suffisamment d’efforts pour « put the right person in the right place ». Cela soulève des doutes sur la volonté réelle du gouvernement de favoriser le rajeunissement, la méritocratie et le professionnalisme au sein des institutions », estime-t-il.

Un manque d’audace d’autant plus préoccupant, selon lui, dans des secteurs stratégiques comme la digitalisation et les nouvelles technologies. « Nous n’avancerons pas sur ces enjeux en recyclant les mêmes profils. On ne peut pas faire du neuf avec du vieux », tranche-t-il. Faizal Jeerooburkhan met en garde : si le gouvernement persiste dans cette voie, il pourrait connaître le même sort que son prédécesseur. « L’ancien régime n’avait pas misé sur la compétence et l’intégrité. Il en a payé le prix fort lors des dernières élections », rappelle-t-il.

Transition fluide et efficace

Pour l’observateur Olivier Précieux, un gouvernement démocratique doit s’assurer que les nominations à des postes de responsabilité reposent avant tout sur la compétence. « Les personnes choisies doivent avoir les qualifications requises pour ces fonctions », insiste-t-il. Selon lui, l’Exécutif aurait pu s’inspirer du modèle britannique, où les officiers du 10 Downing Street se mobilisent immédiatement pour accompagner le nouveau gouvernement dans ses nominations. « Cela aurait permis d’assurer une transition plus fluide et efficace », souligne-t-il. À ce stade, note-t-il, les nominations les plus stratégiques à Maurice, à commencer par celle du président de la République, ont largement bénéficié aux figures travaillistes, bien plus qu’aux représentants du MMM ou d’autres partis de l’alliance au pouvoir.

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