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Légalisation du cannabis : Maurice est-elle prête à franchir le pas? une solution, mais… 

La légalisation du cannabis était au centre des débats, le jeudi 27 mars, lors de l’émission « Au cœur de l’Info », animée par Prem Sewpaul, sur Radio Plus. Selon une étude réalisée par la firme Straconsult en 2023, 45 % des 600 personnes interrogées sont opposées à la légalisation du cannabis, tandis que 46 % y sont favorables. Bien que certains considèrent cette mesure comme une solution pour endiguer le problème de la drogue de synthèse, elle suscite néanmoins une certaine prudence.

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Invité de l’émission, José Ah-Choon, travailleur social et ancien membre du Conseil d’administration de la NATReSA, continue de s’interroger sur cette question. Ancien toxicomane, il se montre pessimiste à ce sujet. De son côté, l’artiste engagé Percy Yip Tong adopte une position tranchée : selon lui, la légalisation du cannabis est indispensable pour espérer voir la lumière au bout du tunnel.

Comme en témoigne la situation actuelle, le pays assiste, impuissants à une véritable « zombification » de la jeunesse. La drogue de synthèse a connu un essor fulgurant peu après son apparition en 2013. Si le phénomène a débuté avec la drogue « Krokodil », de nombreuses autres substances circulent aujourd’hui sur le marché. 

Comment rétablir un équilibre ? La question de la légalisation du cannabis refait surface, et le débat demeure partagé. José Ah-Choon se montre sceptique face à ceux qui soutiennent cette mesure. Selon lui, la légalisation pourrait constituer une « gateway drug », une porte d’entrée vers des substances plus dures.

« J’ai touché au cannabis très jeune et je l’ai vite regretté. J’ai été pris dans l’engrenage de la drogue pendant 15 ans, et je peux affirmer que la légalisation n’est pas forcément la solution. Lorsqu’on regarde les chiffres de l’étude menée en 2023, on constate que ce sont principalement les jeunes qui y sont favorables. Or, il existe un risque réel qu’ils finissent par se tourner vers des drogues plus dures, comme l’héroïne ou la cocaïne. Je pense qu’un référendum est nécessaire. Il faut engager un dialogue national, revoir les structures d’accompagnement et, à partir de là, prendre une décision éclairée », dit José Ah-Choon.

Si certains estiment que le pays n’est pas encore prêt pour un tel changement, Kunal Naik est convaincu que Maurice possède toutes les connaissances nécessaires pour emboîter le pas à d’autres pays. Selon lui, la légalisation du cannabis ne représenterait pas seulement « un atout économique », mais elle permettrait également d’adopter « une nouvelle approche dans la lutte contre la drogue ».

« L’information est aujourd’hui accessible à tous. De plus en plus de jeunes sont favorables à la légalisation, car le sujet était autrefois diabolisé. Nos parents et grands-parents n’avaient pas accès aux ressources et aux études dont nous disposons aujourd’hui. Les intellectuels, les professionnels et ceux ayant suivi des études tertiaires partagent, pour la plupart, cet avis. Certes, il faudra réguler le taux de THC dans le cannabis à usage récréatif, mais dans l’ensemble, il est temps de légaliser et de s’adapter aux changements qui en découleront », dira le psychologue et addictologue.

Imran Dhanoo, responsable du centre Idrice Goomany, qui s’est également exprimé sur le sujet, adopte une approche réaliste : une société sans drogue n’existe pas. Travaillant aux côtés de personnes en traitement pour diverses addictions, il reconnaît que la légalisation du cannabis pourrait avoir « un impact direct » sur la consommation de drogue de synthèse, mais aussi sur celle de l’alcool et du tabac.

« Au centre, nous accueillons de nombreuses personnes cherchant de l’aide, qu’il s’agisse de problèmes liés à la drogue, à l’alcool ou à la cigarette. Je pense que l’éducation autour de la légalisation est primordiale pour en comprendre tous les enjeux. La légalisation du cannabis n’est peut-être pas la solution ultime, mais quand on analyse la situation, on se demande : pourquoi pas ? Il est essentiel de bien définir ce qu’est une drogue, de reconnaître que la science évolue et de s’adapter en conséquence. Je suis favorable à cette évolution, mais il faut mettre en place des cadres solides pour qu’elle se déroule dans les meilleures conditions. L’éducation et la sensibilisation doivent être au cœur du processus », dit-il.

Percy Yip Tong, quant à lui, estime que la légalisation du cannabis aura un effet de réduction des risques (harm reduction effect). Militant de longue date pour cette légalisation, il est convaincu que cette mesure « contribuera à diminuer le trafic de drogues de synthèse tout en permettant la création de cellules efficaces dédiées à la réhabilitation, à la désintoxication et à la rupture des cercles vicieux alimentés par les laboratoires clandestins ».

« La légalisation du cannabis est moins néfaste comparé avec ce qui se passe avec la drogue de synthèse. Il est grand temps que les politiciens prennent une décision. Il y a quelques années, j’avais invité nos politiciens à un débat sur le sujet et ils étaient en faveur, mais aujourd’hui, rien ne bouge. La drogue de synthèse a connu une ascension fulgurante pendant la pandémie de COVID-19, et de nombreux jeunes sont devenus dealers, livreurs, et même producteurs. Voilà d’où vient le mal, et il est urgent d’agir en légalisant », dit-il.

Le Dr Anil Jhugroo, psychiatre et spécialiste du traitement des addictions, n’est pas totalement en faveur de la légalisation du cannabis. Selon lui, les études actuelles ne sont pas suffisantes pour lutter efficacement contre le fléau de la drogue de synthèse. Il va même plus loin en suggérant qu’un dialogue national devrait être lancé sur la question.

« Ce qui rend un individu accro aux substances, ce sont évidemment les molécules présentes dans la drogue, et aujourd’hui, nous en avons plusieurs, ce qui complique la tâche des professionnels de santé. La légalisation du cannabis n’est pas la solution complète. Nous avons encore des preuves à apporter avant d’adopter une nouvelle ère », dit Dr Jhugroo.

Amédée Darga : « Il faut choisir le moindre mal »

Amédée Darga, directeur de la firme StraConsult, a également réagi à ce sujet. Suite à une étude menée en 2023, il a pris conscience que le fléau de la drogue de synthèse a profondément affecté la société. Il n’est plus possible de voir autant de jeunes sous l’emprise de ces substances nocives, voire fatales.

« Lors de cette étude, nous avons constaté que la drogue représente le deuxième problème majeur affectant la société dans son ensemble. Elle est à l’origine de la violence, du taux de criminalité, et de bien d’autres maux. Si nous voulons procéder à une légalisation du cannabis dans les règles, il faudra la faire en quatre étapes. Il est crucial de sensibiliser la population, en particulier les jeunes. La mise en place d’un National Youth Service serait essentielle pour sensibiliser toutes les couches de la société. Il est également nécessaire d’instaurer une réhabilitation systématique sous forme résidentielle, de changer l’offre sur le marché, et bien sûr, de punir les trafiquants », dira-t-il, ajoutant. 

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