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Le sprinteur Noa Bibi : «j’ai été livré à moi-même»

Noa Bibi, 23 ans, a vécu un sentiment profond d’abandon en l’absence de son entraîneur aux Jeux Olympiques de Paris. Le spécialiste mauricien du 100m a déjà Los Angeles 2028 en ligne de mire. Il espère pouvoir compter sur le soutien de sa fédération et des instances sportives concernées pour réaliser atteindre ses objectifs.

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Pour une première participation aux Jeux Olympiques, franchir le tour préliminaire constitue déjà un accomplissement, n’est-ce pas ?

Oui, c’était mon premier objectif : passer le cap des préliminaires. Chaque étape franchie était un pas vers mon objectif principal, les demi-finales. Je suis réaliste, atteindre la finale était un défi de taille, et je sais que je dois encore progresser pour y parvenir. 

J’ai réalisé un chrono de 10.19, soit à 8 centièmes de mon meilleur temps, qui est le record national, et j’ai terminé 6e dans ma série face aux pointures mondiales. En visionnant la course, j’ai constaté que j’étais au même niveau jusqu’au 60 m. L’expérience et l’encadrement professionnel dont bénéficient ces athlètes ont clairement fait la différence. Je suis passé à 3 centièmes d’une qualification pour les demi-finales, car le dernier chrono repêché était de 10.16.

Il y a des athlètes qui ont obtenu la qualification pour les JO mais ne passent pas les préliminaires. Sur 72 engagés sur la distance reine, je prends la 34e place. Pour tout cela, j’ai de quoi être satisfait.

Cependant, je suis aussi déçu d’avoir accompli seulement 50 % de ma mission à Paris, car plusieurs facteurs auraient pu changer le cours des choses. En effet, ce sont parfois les petits détails qui font la différence.

Que voulez-vous dire exactement ?

J’aurais pu faire mieux avec un entraîneur à mes côtés. J’ai été livré à moi-même sur le plan du coaching. J’ai été peiné de me retrouver seul sur la piste d’échauffement avant le premier tour, alors que les autres coureurs avaient leur entraîneur pour leur donner des consignes, les guider et les motiver. Avant les préliminaires, le président de l’Association mauricienne d’athlétisme, qui avait une accréditation, était présent sur la piste d’échauffement. Cependant, il n’a pas pu m’aider, n’ayant pas les compétences d’un entraîneur. Il est ensuite allé dans les gradins pour assister à la compétition. 

Je suis convaincu que si j’avais eu un coach pour me motiver, j’aurais pu atteindre les demi-finales. Le soutien d’un entraîneur est crucial pour le succès d’un athlète, car il fournit une expertise technique et stratégique tout en offrant un soutien psychologique et une motivation continue, essentiels pour optimiser les performances et atteindre les objectifs.

En quoi pensez-vous que votre expérience aux JO pourrait influencer l’évolution de votre carrière sportive ?

Définitivement, l’expérience des JO a renforcé ma motivation et mon inspiration pour aller de l’avant et progresser. Me mesurer aux meilleurs athlètes du monde m’a permis de comprendre les niveaux d’exigence et de préparation nécessaires pour atteindre l’élite. Cette compétition a également mis en lumière des aspects spécifiques que je dois améliorer pour structurer efficacement ma préparation future. En somme, cette expérience m’a aidé à identifier des axes de développement tout en consolidant ma détermination à exceller dans ma discipline. Comme je l’ai mentionné à mon entraîneur, Stephan Buckland, lors de notre conversation téléphonique après ma course, j’ai déjà les Jeux Olympiques de 2028 à Los Angeles en ligne de mire. Nous devons commencer à travailler dès maintenant pour viser une finale et, pourquoi pas, décrocher une médaille. Je dois être à mon pic de performance dans quatre ans en Amérique. J’espère également obtenir le soutien des instances sportives, des sponsors et plus particulièrement de l’Association mauricienne d’athlétisme, pour mener à bien mon projet.

À vous entendre, on dirait que vous n’avez pas l’appui de votre fédération. Qu’en est-il exactement ?

La fédération n’a pas apporté le soutien attendu lorsque j’ai sollicité son aide. J’ai eu l’impression qu’elle était indifférente à mes ambitions et projets, et qu’elle ne croyait pas en moi. L’Association mauricienne d’athlétisme ne m’a pas tendu la main quand j’en avais besoin. Heureusement, le soutien de mon sponsor, Bioculture, a été déterminant pour mes déplacements et ma participation à des compétitions et stages à l’étranger.
 Il semble que certaines personnes au sein de la fédération avaient déjà pris des décisions concernant l’attribution des invitations pour les JO de Paris, me laissant de côté.

J’ai déjà les Jeux Olympiques de 2028 à Los Angeles en ligne de mire. Nous devons commencer à travailler dès maintenant pour viser une finale et, pourquoi pas, décrocher une médaille"

J’ai dû redoubler, voire tripler d’efforts pour atteindre les minima ou améliorer mon classement afin d’espérer une place pour cet événement. Mes sacrifices ont porté leurs fruits, et j’ai obtenu mon invitation aux JO par mérite. Ce qui est particulièrement frustrant, c’est de constater que certains athlètes bénéficient de privilèges. Par exemple, lors des Championnats d’Afrique au Cameroun, les conditions de voyage ont été inégales ; certains ont eu des vols directs, tandis que d’autres, dont moi-même, ont dû faire des escales longues et difficiles. Cette disparité est vraiment décevante.

Je vois beaucoup de belles déclarations après mes courses aux JO. J’espère qu’à l’avenir, je pourrai bénéficier d’une véritable considération et d’un soutien équitable.

Par ailleurs, je tiens à remercier le peuple mauricien pour son soutien et ses encouragements tout au long des JO. Un grand merci du fond du cœur à tous ceux qui m’ont soutenu et continuent à croire en moi, même dans les moments les plus difficiles.

J’ai été peiné de me retrouver seul sur la piste d’échauffement avant le premier tour, alors que les autres coureurs avaient leur entraîneur pour leur donner des consignes, les guider et les motiver à se surpasser"

La saison 2024 en athlétisme est loin d’être terminée. Quels sont vos prochains objectifs ?

À mon retour au pays, je vais discuter avec mon entraîneur ainsi qu’avec mon manager pour définir les compétitions auxquelles je participerai. Tout dépendra grandement du financement. J’aimerais avoir l’opportunité de participer à deux ou trois meetings internationaux si les conditions le permettent.

 

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