Environ 400 millions de personnes vivent actuellement avec l’hépatite virale dans le monde. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), 1,45 million de personnes en meurent tous les ans. À Maurice, selon une étude de la Commission de l’océan Indien, en 2011, il y aurait 40 000 cas d’hépatite C dans la population adulte, soit 3,1 %.
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On appelle l’hépatite C le virus silencieux. Il est présent dans notre société, mais nous n’en parlons pas souvent. À Maurice, aucune information chiffrée n’existe, mais on sait que le pays n’est pas épargné. En l’absence de données, le virus continue à faire des victimes. « Nous n’avons pas de données sur la situation de la population générale, des jeunes et des adultes, mais aussi du corps médical, qui peut aussi être à risque. Il n’y a jamais eu d’études sur les hépatites à Maurice », explique Nudhar Bundhoo, chargé de plaidoyer de l’ONG PILS.
Comment éliminer le virus en l’absence de données ? Notre interlocutrice nous explique : « Il y a les informations que nous avons pu recueillir parmi nos partenaires et sur le terrain lors de nos tests de dépistages. » Il y a aussi les IBBS Studies, qui avancent qu’en 2010, 43,8 % des travailleuses du sexe portaient le virus et en 2012, 89 % de ce même groupe, qui ont été testés positifs pour le VIH/Sida, ont également été testés positifs pour l’hépatite.
Parmi les personnes qui s’injectent des drogues, les études ont démontré des chiffres plus inquiétants, avec 97,3 % de prévalence du VHC (Virus hépatite C). En ce qui concerne les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes, la prévalence du VHC était de 14,2 % en 2010.
PILS plaide depuis récemment pour l’accès au dépistage et des soins pour l’hépatite C, car il y a un gros manque de service de dépistage et la plupart de ceux ayant une hépatite virale chronique ignorent qu’ils sont porteurs de l’infection. Afin de répondre à ce manque, PILS a mis en place un service de dépistage et de sensibilisation.
L’ONG, qui a une grande expertise dans le domaine du VIH/Sida, constate qu’il y a une différence considérable dans la prise en charge d’un patient vivant avec le VIH/Sida, contrairement à l’hépatite C. Quand une personne est testée positive au VIH/Sida, il y a accompagnement et des soins qui ont été mis sur pied pour prendre en charge la personne.
Aujourd’hui, la charge virale d’une personne vivant avec le VIH/Sida peut être indétectable, de ce fait, la personne ne transmet plus le virus.
« Nous savons où et comment canaliser les patients après le dépistage, mais malheureusement pour l’hépatite C, il n’y a rien. Nous ne pouvons que référer le patient à un gastro-entérologue ou à un médecin. Ce sera tout et si la personne développe des complications du foie ou une jaunisse, il ne sera traité que pour cela. Il y a une discrimination dans l’accès au traitement au HCV. Surtout si la personne est déjà sur un traitement de substitution aux opiacés ou en période d’injection active. On cherche seulement à atténuer les symptômes », explique Nudhar Bundhoo.
Par ailleurs, notre interlo-cutrice note qu’il y a une réticence des médecins à offrir un traitement d’hépatite C aux personnes suivant un traitement de substitution aux opiacés (méthadone) ou qui s’injectent des drogues. Cela en raison des préoccupations à une faible adhérence aux traitements et des effets adverses, principalement, la réinfection.
Nudhar Bundhoo va plus loin, car en 2014, l’OMS avait renversé cette ligne de pensée en recommandant des traitements pour les personnes qui s’injectent des drogues. « Aujourd’hui, les médecins doivent suivre les patients et heureusement nous avons de nouveaux traitements qui sont plus tolérables et faciles à prendre. Il n’y a aucune raison de refuser l’accès au traitement à des gens qui sont en situation de vulnérabilité comme les détenus, les personnes qui s’injectent des drogues et ceux prenant la méthadone. »
Aujourd’hui, avec les avancées de la médecine, il existe un traitement fiable pour l’hépatite C, bien que ce traitement demeure extrêmement coûteux. Maurice est éligible à des prix très préférentiels.
« Le gouvernement peut négocier avec les bailleurs de fonds pour pouvoir avoir ce traitement, afin d’éliminer le virus. Mais nous avons des blocages tels que l’absence d’un protocole national, l’absence de collaboration entre les ONG, les patients et le ministère de la Santé », ajoute-t-elle.
Afin de combler ce manque, PILS souhaite travailler en collaboration avec le ministère de la Santé, dans l’intérêt des patients. Un atelier de travail est prévu le 9 août, en partenariat avec le ministère de la Santé et l’OMS, avec deux médecins réunionnais qui expliqueront ce qui se passe à l’international à propos du VIH/Sida et du VHC, et comment accéder aux nouveaux traitements. Une session communautaire est aussi prévue le 8 août, où les patients pourront mieux comprendre le virus et les traitements disponibles pour le VHC. Une campagne de sensibilisation à travers la distribution des flyers pour chaque groupe avec lequel PILS travaille débutera prochainement.
Pour Nudhar Bundhoo, il n’est pas impossible ni difficile d’éliminer l’hépatite C. « Avec les nouveaux traitements, qui sont plus efficaces, il y a beaucoup de chances de guérison, contrairement au VIH/Sida. Nous avons déjà des programmes de réduction des risques, les Universal Precautions pour le personnel de santé. Si nous renforçons tout cela, nous pourrons éliminer le virus. Il faut l’engagement de tous les acteurs de la société. »
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