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Financement des partis politiques : comment sauver le projet de loi?

Il semble que Pravind Jugnauth présentera à nouveau un projet de loi voué à l’échec.

Le projet de loi sur le financement des partis politiques, qui sera présenté mardi au Parlement, semble voué à l’échec pour la deuxième fois. Deux obstacles majeurs se dressent : le manque de consultations préalables avec les différentes formations politiques et le timing délicat de la proposition de cette loi, juste avant les prochaines élections générales.

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Outre ces critiques centrales, plusieurs autres aspects sont soulignés par les acteurs politiques. Ils regrettent notamment que le gouvernement n’ait pas pris en compte d’autres dimensions cruciales dans l’élaboration de ce projet de loi. Selon eux, une approche plus inclusive aurait pu permettre de dégager un consensus plus large et d’éviter les obstacles rencontrés actuellement.

Jack Bizlall, syndicaliste et ancien député, exprime une position ferme sur le financement des partis politiques, affirmant que cette responsabilité devrait entièrement incomber à l’État. Selon lui, cela garantira une transparence accrue et une équité dans le processus politique mauricien. Il insiste sur l’idée que l’État devrait être le seul organisme autorisé à financer les activités des partis politiques, mais il souligne également l’importance de conditions strictes pour encadrer ce soutien financier.  

Pour Jack Bizlall, la condition sine qua non pour qu’un parti politique puisse bénéficier du financement public est de rendre son programme politique entièrement public avant toute élection. « Cette mesure vise à assurer que les électeurs aient une compréhension claire des intentions et des politiques proposées par chaque parti politique. Trop souvent, les partis politiques se présentent aux élections sans avoir suffisamment clarifié leurs positions et leurs plans d’action, ce qui nuit à la transparence et à la crédibilité du processus électoral », affirme-t-il.

Le syndicaliste souligne aussi le rôle crucial des médias dans le processus électoral et estime que la loi sur le financement des partis politiques aurait dû inclure des dispositions interdisant toute forme de discrimination envers les partis politiques. Selon lui, l’État devrait garantir un accès équitable des partis politiques aux médias en finançant cette opportunité.

Pour Jack Bizlall, il est essentiel de reconnaître que tous les partis politiques n’ont pas la même visibilité médiatique ni les mêmes ressources pour, par exemple, diffuser leurs communiqués dans les journaux. Cette mesure permettra ainsi de créer des conditions équitables où chaque parti politique pourrait compétitionner sur un pied d’égalité.

Jack Bizlall, qui plaide ardemment pour une plus grande équité dans le processus de financement politique, souligne qu’un exemple marquant de cette inégalité s’est produit l’année dernière, lorsque l’actionnaire majoritaire du People’s Turf Club, Jean Michel Lee Shim, a publiquement admis avoir financé le MSM à hauteur de Rs 10 M lors des élections. Pour lui, de telles pratiques persistent et compromettent l’intégrité et l’équité démocratiques du système électoral.

Danger

Ashok Subron, de Rezistans ek Alternativ, qui se montre critique sur le projet de loi sur le financement des partis politiques, souligne que ce projet de loi est « extrêmement dangereux ». Selon lui, cela va légaliser la corruption en permettant aux grandes entreprises de financer les partis politiques. « Ce projet de loi ne renforce pas le pouvoir des électeurs. De plus, il crée des structures excessivement intrusives qui menaceraient la liberté d’expression politique », dit-il. 

Ashok Subron exprime  finalement un profond regret quant à l’échec total du MSM en matière de réforme électorale : « Le gouvernement n’a pas agi pour respecter les recommandations des Nations Unies depuis 2012, notamment en ce qui concerne l’élimination de la classification communale avant les prochaines élections ».

Dev Sunnasy, de Linion Moris, critique aussi la stratégie de Pravind Jugnauth, affirmant que c’est à cause de cette approche que le projet de loi ne sera pas voté. Il souligne que même si ce projet de loi figurait dans le programme du MSM, le présenter uniquement pour la forme ne suffit pas. « Le MSM va ensuite blâmer une fois de plus l’opposition pour avoir refusé de voter pour ce projet de loi. Mais présenter un projet de loi aussi important dans de telles conditions garantit son échec », dit-il.

Selon Dev Sunnasy, il est crucial de déterminer si l’on souhaite réellement réduire les coûts des élections. « Une solution, pourrait consister à mettre les infrastructures publiques à la disposition des partis politiques. Par exemple, pour la tenue de réunions et de meetings qui peuvent représenter des dépenses importantes, les salles des collectivités locales pourraient être mises à leur disposition. De même, l’accès aux stades pourrait être facilité. Ce modèle est également utilisé en France pour soutenir le processus électoral », fait-il ressortir.

Deux autres aspects malheureusement négligés dans le projet de loi portent sur le fonctionnement de la Mauritius Broadcasting Corporation (MBC) ainsi que sur l’Electoral Supervisory Commission (ESC). Selon Dev Sunnasy, il est nécessaire que la MBC ne soit plus autorisée à déterminer et superviser le temps d’antenne des partis politiques lors des campagnes électorales. Il préconise que cette responsabilité soit confiée à un organe totalement indépendant, tout en assurant que les autres médias garantissent un accès équitable sur leurs antennes.

En ce qui concerne l’ESC, Dev Sunnasy est d’avis que son fonctionnement doit également être revu. Pour ce faire, il propose une réforme du processus de nomination de ses membres afin d’assurer une véritable indépendance. « Seule une commission dotée de membres véritablement indépendants pourrait être habilitée à exercer des pouvoirs de sanction. Dans le cadre actuel, il est  inutile d’accorder de tels pouvoirs à l’ESC car elle n’est pas suffisamment indépendante », dit-il.

 

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