Que fait un bébé d’un mois à la rue ? Sa famille a été expulsée de la maison où ils ont vécu pendant au moins 29 ans. Leur tentative de trouver un autre toit s’est avérée vaine. C’est ainsi que toute la famille passe ses nuits à la rue dans un froid hivernal, avec leurs animaux et tous les risques que cela comporte. L’heure est à la solidarité…
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Il est midi. C’est aux rue Pagoda et rue Goon à Plaine-Verte, grouillantes de monde, qu’on trouve principalement la famille Edoo. C’est un lieu très fréquenté, de nombreux véhicules font le va-et-vient et d’autres personnes vaquent à leurs occupations. Sauf que, ce vendredi 12 juillet, ils s’arrêtent pendant quelques minutes, attirés par les cris d’un bébé qui pleure. Lorsqu’on s’approche, on remarque tout de suite des affaires à peine empilées sur un trottoir. C’est ici que dort une famille depuis jeudi, jour où elle a été expulsée de son domicile après plusieurs requêtes d’évacuation de la part du propriétaire.
Le nourrisson, une petite fille d’un mois, est couchée dans un fauteuil, enveloppé maladroitement dans un grand drap. Pendant la journée, c’est ici que la petite passe la majorité de son temps, parmi des adultes qui multiplient des appels pour essayer de trouver une solution et ne pas passer une nouvelle nuit dehors. La nuit, c’est dans un van emprunté à un proche qu’elle la passe en compagnie de sa mère.
La maison où vivait la famille Edoo est située à l’étage d’un vieux bâtiment commercial. Elle est quelque peu délabrée et on apprend du propriétaire que c’est une des raisons principales pour laquelle il a demandé à la famille de partir. Effectivement, le toit semble sur le point de céder et le balcon n’est pas en si bon état. Le père de famille concède que le propriétaire n’est pas fautif de les avoir mis à la porte et reconnaît que ce dernier a donné à la famille plusieurs avertissements.
Le couple Edoo habitait cette maison depuis plus de 30 ans. C’est en février dernier que le propriétaire leur a signalé qu’ils devaient maintenant partir. « Nous ne sommes pas partis parce que nous n’arrivions pas à trouver une autre maison. De nos jours, ce n’est pas évident de trouver comme ça une autre maison, on le sait. Après tout, si on arrive à en trouver, le loyer est au-dessus de nos moyens », explique le couple.
Le jeudi 11 juillet, ils ont dû faire face à une très dure réalité. « Le propriétaire est venu accompagné par des policiers et on nous a demandé d’évacuer les lieux. Nous habitions au premier niveau, ils ont pris nos meubles, nos lits, nos matelas et autres et les ont jetés de l’étage dans la rue. Ils ont même cassé notre téléviseur. Regardez, tout est devant nous», se lamente Rizwana.
La situation est délicate du fait que la famille comprend aussi un nourrisson âgé d’à peine un mois. Où ont-ils passé la nuit? « Un ami nous a bien cédé son van. Ma belle-fille, son bébé et moi-même avons dormi à l’intérieur du véhicule sur un coussin posé en bas. Mon mari et mon fils ont passé la nuit à l’extérieur assis sur les sofas », raconte Rizwana. Elle et son mari remercient les voisins qui leur sont venus en aide d’une manière ou d’une autre.
Est-ce que leurs proches sont au courant de la situation? « Oui, mais de mon côté, personne n’a encore réagi. Je dois vous avouer que ma famille m’a rejetée. Du côté de mon mari, personne n’a encore pris une décision sauf mon beau-frère qui nous soutient dans notre tribulation. Il nous aide autant qu’il peut. D’ailleurs, il multiplie les appels pour essayer de trouver une solution », déclare Rizwana.
Elle et son mari racontent qu’ils ont entamé des démarches pour obtenir un logement NHDC depuis 2004. « Malgré toutes nos démarches, rien n’a abouti jusqu’à ce jour. À un certain moment, nous étions supposés avoir une maison à Notre-Dame. Puis cette année, en avril dernier plus précisément, nous avions cru que nous allions avoir enfin une maison. Mais voilà où nous en sommes aujourd’hui », dit Rizwana en pleurs. Son mari ajoute qu’il trouve injuste que les moins nécessiteux obtiennent plutôt rapidement une maison auprès des autorités alors que les plus nécessiteux doivent patienter indéfiniment.
Malade – elle souffre d’épilepsie – Rizwana craint pour sa santé dans ce froid. Elle ne travaille pas. Son mari est receveur. Quant à leur fils, qui a 18 ans, il gagne sa vie à une station de lave-voitures.
Malgré leurs présentes difficultés, le fils de Rizwana s’est rendu à son travail vendredi matin. Son petit frère, 6 ans, s’est lui aussi rendu à l’école (il fréquente l’école du gouvernement Jean Lebrun). Comment ont-ils fait ? Est-ce qu’ils ont mangé et bu quelque chose avant de partir ? Le petit garçon a-t-il apporté de quoi manger à l’école ? « Oui, répond la belle-fille de Rizwana, 18 ans également. Des voisins se sont montrés généreux. »
À l’heure où vous lirez cet article, on espère que la famille aura trouvé un abri temporaire le temps qu’elle trouve une autre maison. Un bébé d’un mois ne peut pas dormir dans la rue. Ni encore sa mère et toute la famille. Rizwana souhaite trouver, si possible, une maison à louer à hauteur de Rs 3 000.
La NEF fera un suivi
Sollicité pour une réaction, Clifford Vellien de la National Empowerment (NEF) avance qu’il est difficile de donner une réponse définitive à la requête de la famille Edoo pour bénéficier d’une maison. « Il est important de savoir si la famille est bien enregistrée au Social Register of Mauritius (SRM), puis les officiers feront une enquête sociale pour évaluer leur situation et proposer l’aide la mieux appropriée.» Cependant, devant l’urgence de la situation, il a demandé au père de famille de venir aux locaux de la NEF rue La Poudrière à Port-Louis, pour tenter de trouver une solution.
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