Elle est sourde de naissance. Et cela fait deux ans que son appareil auditif ne fonctionne plus. Vinaygee Muraven est désemparée. Elle veut pouvoir entendre la voix de ses enfants de nouveau. Mais ses démarches pour l’obtention d’un tel appareil n’aboutissent pas.
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« Parfois, les gens l’insultent ou se mettent à rire quand elle parle. Mais malgré son handicap, ma mère fait tout pour nous »
Rupture de stock, lourdeurs administratives, appels d’offres qui restent sans suite, longues listes d’attente… Ce sont autant de raisons fournies pour expliquer les nombreuses doléances pour l’obtention d’un appareil auditif. Et ce, depuis plusieurs années.
Mais pour Vinaygee, âgée de 35 ans et sourde depuis la naissance, ce problème lui complique la vie. Son appareil auditif étant endommagé, elle ne peut s’occuper de ses deux enfants, dont l’un est en bas âge. Et un malheur ne venant jamais seul, son mari est gravement malade et ne peut plus subvenir aux besoins de la famille.
Vinaygee Muraven soufflera ses 35 ans le 24 septembre. Son aîné, Himaleyen (11 ans), sait déjà quel cadeau plaira le plus à sa mère : un appareil auditif. La jeune femme a soumis une demande auprès de la Sécurité sociale pour l’obtention d’un tel appareil. Mais cette habitante de Petit-Verger, Moka, se heurte à plusieurs obstacles depuis 2017. Cela, malgré le fait que les préposés à la Sécurité sociale lui promettaient, selon elle, que ses démarches ne tarderaient pas à aboutir.
Pour la jeune mère, cet appareil revêt une importance capitale. Primo, à chaque fois qu’elle se rend à la Sécurité sociale, on lui promet qu’elle obtiendra l’appareil dans un mois. Mais cela fait maintenant deux ans qu’elle attend ! Si pour certains, cela ne représente qu’un exercice visant à offrir aux personnes malentendantes un appareil, pour elle, c’est bien plus. Cela représente un indéniable moyen de communication qui offre plus d’autonomie aux personnes atteintes de surdité. Et le manque d’autonomie, c’est aussi ce qui pèse en ce moment sur la famille Muraven. La belle-mère de Vinaygee explique que depuis que son premier appareil auditif est cassé, sa belle-fille ne peut rester seule à la maison. « Elle n’entend rien. Elle a deux enfants de 11 et 3 ans. On ne peut pas la laisser avec le benjamin, car quand il se réveille ou il pleure, elle n’entend pas ».
Difficultés d’articulation
Vinaygee, que nous rencontrons à son domicile à Petit Verger, Moka, comprend que l’on parle de son enfant. Elle, dont le visage est si jovial, devient triste. Elle explique comme elle peut (puisqu’elle a des difficultés d’articulation) que cela lui fait mal de ne pas pouvoir entendre la voix de ces enfants. « Mon fils vient d’avoir trois ans. Il parle. Il avait à peine un an quand j’ai fait cette demande à la Sécurité sociale.Ce qui fait que j’ai tout manqué de ses premiers mots. Parfois, il s’énerve. Il ne comprend pas que je ne l’entends pas. Il m’appelle et pleure. » La famille a essayé d’en obtenir un dans le privé, mais cela coûte entre Rs 40 000 et Rs 50 000. Elle n’a donc pas les moyens d’en acheter un.
« Li pa tann nou kan nou kriye li »
Dans une lettre qu’il a écrite à la radio, son fils aîné demande à ce que quelqu’un vienne en aide à sa mère pour lui offrir un appareil auditif : « Avan, mwa ek mo mama nou ti partaz bokou sekre. Li bien kontan pou zwe ek mwa. Asterla li pa tann nou kan nou kriye li. Fode nou vinn tous so ledo lerla li kone nou pe bizin li. Sa fer mwa bien sagrin e mo mama so leker fermal parfwa. » Pour son âge, cet élève de Grade 7 au collège Camp de Masque SSS est très bavard. Il dit ne pas avoir honte de sa mère, même si auparavant, quelques personnes se sont moquées d’elle : « Elle ne parle pas très bien. Il faut bien l’écouter pour comprendre ce qu’elle dit. Parfois, les gens l’insultent ou se mettent à rire quand elle parle. Mais malgré son handicap, ma mère fait tout pour nous. »
Comme un malheur ne vient jamais seul, il y a un an, le mari de Vinaygee est tombé gravement malade. Il travaillait comme maçon, puis dans un petit commerce. « Il souffre maintenant d’un cancer du colon et du foie. Nous avons dû prendre tout l’argent de notre retraite, mon mari et moi ,pour ses soins. Il était le gagne-pain de la famille et aujourd’hui, c’est nous qui devons subvenir à ses besoins. C’est très dur, mais nous ne pouvons pas les laisser tomber », affirme Jay, la belle-mère de Vinaygee.
Contacté, un préposé de la Sécurité sociale explique qu’il a toujours des difficultés en ce qui concerne les appareils auditifs : « Nous sommes souvent en rupture de stock, car les demandes augmentent. » Nous avons voulu en savoir plus sur les derniers appels d’offres lancés (Il y a en a eu 3, le dernier a-t-il abouti ?) et sur le nombre de personnes sur la liste d’attente. Cependant, nous n’avons pas encore pu obtenir une réponse officielle à l’heure où nous mettions sous presse.
Témoignage : « On avait demandé à ma fille de 9 ans d’attendre 3 ans »
Le 14 février, lorsqu’Emilie (prénom modifié) apprend que sa fille aura besoin d’un appareil auditif, elle se rend immédiatement à la Sécurité sociale pour faire une demande. Sur place, elle tombe des nues : « L’officier que j’ai rencontré m’a dit que je devais attendre au moins 3 ans, car la distribution actuelle se fait pour les personnes de la liste de 2016. » Cependant, suite à sa rencontre avec une personnalité politique de l’endroit, sa fille a obtenu l’appareil il y a deux semaines. « Je ne sais pas comment il a fait », dit-elle. Quant au politicien concerné, il dit ne pas s’en souvenir.
« 200 appareils livrés chaque année »
Selon la Society for the Welfare of the Deaf, « tout se passe bien en ce moment ». Un des responsables nous explique : « Nous recevons environ 200 appareils chaque année pour la distribution. L’année dernière, nous avons souvent eu des problèmes, car il n’y avait pas d’appareils. Mais cette année, non seulement la situation revient à la normale, mais il paraît que nous allons bientôt recevoir de meilleurs appareils. Le retard est aussi dû aux nombreuses personnes qui ne répondent pas aux appels lorsqu’on les contacte pour les essais ou ceux qui sont négligents et perdent régulièrement leurs appareils. »
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