Dortoirs : piège à Covid-19

Si dans le passé, à plusieurs reprises l’état des dortoirs dans lesquels vivent des travailleurs étrangers a défrayé la chronique, cette fois-ci, ce sont les cas de contamination à la Covid-19 au sein de ces hébergements qui interpellent. Pas plus tard qu’hier, mardi, 305 travailleurs étrangers ont été testés positifs dans deux dortoirs. Ce qui fait penser que ces derniers sont aujourd’hui un lieu propice de propagation du virus.  

En 12 heures hier, mardi, 368 cas de Covid-19 ont été enregistrés. Un chiffre record jusqu’ici. Parmi, 305 concernent des expatriés qui vivent dans deux dortoirs et qui ont été détectés suite à des exercices de dépistage ciblé. Cinq d’entre eux présentent de légers symptômes (état fiévreux) tandis que les 300 autres sont totalement asymptomatiques. Ces dortoirs opèrent déjà comme centres de quarantaine et font l’objet de stricte surveillance selon le ministère de la Santé, qui précise que les résidents de ces lieux sont isolés de la communauté locale. 

Le Dr Vasantrao Gujadhur ne passe pas par quatre chemins. « Depuis le début, je disais haut et fort qu’on ne peut pas faire des dortoirs des zones rouges et y laisser les travailleurs étrangers pour la quarantaine. Qu’ils soient vaccinés n’est pas une garantie qu’ils ne vont pas contracter le virus », tonne notre interlocuteur.

Selon lui, on doit s’attendre à avoir de nouveaux cas positifs dans les dortoirs dans les jours à venir. « Il y a des individus qui ont fait un test PCR mais sont négatifs. Il se peut qu’ils soient contaminés mais toujours en période d’incubation. Ce qui fait que quand on va refaire des tests dans quelques jours, davantage de cas seront à dénombrer », prévient le Dr Vasantrao Gujadhur. 

L’ancien directeur des services de santé affirme que c’est normal que la propagation soit plus rapide dans un dortoir. « Il y a cinq à six personnes dans une seule chambre, il n’y a pas beaucoup de toilettes, il n’y a pas de bonne aération, sans parler de la promiscuité. Ce sont là des éléments favorisant la transmission du virus », souligne ce dernier.  

L’épidémiologiste et virologue, le Dr Deoraj Caussy, affirme qu’effectivement les dortoirs sont un lieu propice d’infection étant « quasiment des espaces clos ». « Le virus se transmet dans l’air car il n’y a pas d’aération adéquate. Quand une personne malade tousse, le virus est dans l’air et une autre respire cet air. La transmission se fait principalement par voie respiratoire », explique-t-il. 

La vaccination prise en compte 

Le porte-parole du National Communication Committee, le Dr Zouberr Joomaye, indique qu’il faut bien faire la nuance. Les personnes positives sont en général envoyées dans des centres de traitement et celles qui ont été en contact avec elles sont en surveillance dans des centres de quarantaine au cas où elles développent une infection. « S’agissant des travailleurs étrangers, la décision a été prise de convertir les dortoirs en centres de traitement. On a également séparé ceux qui ne sont pas positifs de ceux qui le sont. Cela dit, on a pris en compte que ces travailleurs sont vaccinés. D’ailleurs, on voit que la vaccination porte ses fruits. Ces personnes sont positives mais ne sont pas malades. », avance le Dr Zouberr Joomaye. 

Faizal Ally Beegun : « C’est inacceptable »

Le syndicaliste qui est connu comme un défenseur des droits des travailleurs étrangers, Faizal Ally Beegun, ne cache pas sa colère. « C’est inacceptable que le gouvernement ait pris la décision de convertir les dortoirs en centres de quarantaine. Nous avons eu 305 cas en un jour, ce qui démontre que ce n’était pas la chose à faire. La situation va encore empirer car les employés sont à l’étroit dans les dortoirs. Il semble que le gouvernement ne respecte pas la dignité de ces expatriés qui ont été contaminés par nul autre que des Mauriciens », fustige Faizal Ally Beegun.