Dernière année de mandat - Jocelyn Chan Low, historien : «Il faut s’attendre à beaucoup de coups bas»

Il reste officiellement une année de mandat. À quoi doit-on s’attendre ?
C’est difficile à prédire. Pour commencer, il y a le jugement du Privy Council qu’on attend concernant Pravind Jugnauth. Et on ne sait pas ce qu’il se passera avec le procès de Navin Ramgoolam. Le sort de deux leaders politiques majeurs dépend d’un jugement. C’est inédit. Ensuite, on a vu pleins de secousses au sein du MMM, mais il faut s’attendre à ce qu’il y en ait d’autres un peu partout.

Pourquoi ?
Aujourd’hui, la politique, c’est surtout la guerre des places. Il n’y a plus d’idéologie et les gens vont sauter ici et là. Puis le gouvernement prendra des mesures électoralistes, notamment avec le Budget. Déjà, on commence à parler d’augmenter le montant de la pension de vieillesse. Dans un contexte où la Russie et l’Arabie saoudite veulent s’entendre sur la réduction de la production de pétrole et la guerre économique entre la Chine et les États-Unis, c’est dangereux. Ces mesures poussent vers le populisme dans le monde. Le gouvernement fera preuve de largesse alors qu’il aurait fallu de la rigueur face à cette situation.

Quelle lecture faites-vous du jeu des alliances ?
Le MMM dit qu’il ira seul. Dans une situation où ni le MSM, ni PTr ne remporte une majorité, il fera la différence. D’autres partis se positionneront et il y aura des tractations. Au niveau politique, ce sera extrêmement mouvementé. D’après moi, les prochaines élections seront un affrontement directe entre Navin Ramgoolam et Pravind Jugnauth. Il y a une grande hostilité entre les deux. On aura des personnes remplies de rancunes et de rancoeurs. Il faut s’attendre à beaucoup de coups bas. La lutte sera féroce. Espérons que les institutions joueront le jeu.

Il y a également des mouvements civiques qui émergent sur la place dans un contexte où le taux d’abstention est fort. Est-ce que ces mouvements seront plus structurés ? L’offre politique ne satisfait définitivement pas les Mauriciens désenchantés par les partis traditionnels. Mais un individu pourra-t-il fédérer tout cela ? Je ne pense pas.

Le MMM et le PTr ont tous deux dit qu’ils ne feront pas d’alliance. Vous y croyez ?
Pour le MMM, aller seul est le scénario qui lui rapporterait le plus. Il peut laisser le MSM et le PTr s’affronter puisque pour la première fois, il n’y a aucune possibilité d’alliance entre ces deux partis, à moins d’un changement de leaders. L’électorat du MMM est très hostile à toute alliance et il peut donc jouer le jeu post-électoral. Est-ce qu’une alliance PTr/PMSD ou MSM/ML peut gagner ? Il ne faut pas sous-estimer le MSM non plus.

Sur quels thèmes se jouera la campagne ?
Jugnauth jouera sur sa performance et attaquera Ramgoolam sur la moralité publique. Ramgoolam attaquera aussi le MSM sur ce dernier point. La moralisation sera un thème central. Dans un contexte où il y a beaucoup d’indécis, la campagne sera déterminante. Le MSM jouera aussi sur le renouvellement. Il lui manque des gens de qualité et il partira à la pêche aux personnalités fortes.