Société

Cancer: le tabou freine le dépistage précoce

Avec 2 387 nouveaux cas de cancer enregistrés en 2014, la prévalence de la maladie à Maurice est préoccupante, selon la cancérologue Mokshda Dauharry-Gunness. Alors que nous sommes arrivés à un stade où la survie est passée de 5 à 10 ans, elle est d’avis que la population ne devrait plus hésiter à opter pour des tests de dépistage, pour bénéficier d’un traitement précoce et de vaincre le tabou associé à cette maladie. Le cancer est en hausse à Maurice. « Même si la situation est jugée préoccupante, elle n’est pas méchante », affirme la cancérologue Mokshda Dauharry-Gunness du ministère de la Santé. Et pour cause, cette « hausse » peut s’expliquer par les dépistages plus fréquents, notamment concernant le cancer du sein et du côlon qui présente des symptômes assez distinctifs : respectivement grosseur et saignement.

Dépistage précoce

Certes, les dépistages précoces sont en hausse, mais subsistent les craintes de faire face à la vérité. C’est pourquoi la cancérologue encourage la population à profiter des facilités disponibles dans les différents centres de santé à travers le pays pour augmenter ses chances de guérison. Qui plus est, le traitement est moins complexe. Le Dr Ashraf Cadersa, chirurgien à l’hôpital Apollo Bramwell, abonde dans le même sens : un cancer dépisté très tôt est plus facile à suivre médicalement et peut même nécessiter moins de traitement, tout en augmentant les chances de guérison. « Un cancer dépisté à un stade avancé réduit les possibilités d’être soigné comme il se doit. » D’où les campagnes de dépistage, par exemple, car il y a des symptômes distinctifs qui indiquent qu’il y a un cancer qui se développe.

Quelques chiffres

Le nombre de cas de cancer a augmenté de 13 % chez les hommes et de 1,4 % chez les femmes de 2013 à 2014, selon les derniers chiffres disponibles du National Cancer Registry. Le cancer du côlon et de la prostate sont les plus communs chez les hommes tandis que chez les femmes, c’est le cancer du sein et du côlon. Mais en regroupant les divers types de cancer de l’appareil génital de la femme (col et corps de l’utérus et ovaires), ces types de cancer viennent en deuxième position après celui du sein.

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Facteurs de risques

Cependant, même si les causes ne sont pas déterminées, le cancer peut être inévitable et souvent attribué au vieillissement. Il y a aussi des facteurs de risques, parmi lesquels figurent le manque d’activités physiques, une mauvaise hygiène alimentaire, l’alcoolisme et le tabagisme. La cancérologue Dauharry-Gunness explique qu’un cancer peut être attribué à des agents cancérogènes ou à des bactéries, comme c’est le cas pour le cancer du foie et de l’estomac. Une exposition prolongée aux radiations ou aux rayons ultra-violets est une cause de cancer. À tout cela, il faut ajouter les facteurs héréditaires, ajoute le Dr Cadersa. Et comme souligné plus haut, un mode de vie sain peut diminuer de 30 % les risques d’avoir un cancer, affirme la cancérologue.

« Prevention is better than cure »

La population devrait surtout briser le tabou autour du cancer, souligne aussi le Dr Dauharry-Gunness. Un avis que partage le conseiller Emmanuel Maurice engagé dans l’accompagnement des malades dans diverses Organisations non gouvernementales. On ne le dira jamais assez, « prevention is better than cure ». Et le tabou, la crainte de parler du cancer, empêche de faire face à la sittuation. Le Dr Cadersa recommande  des tests de dépistage précoce, une mammographie ou la palpation. Pour lui, toutes les femmes de plus de 40 ans devraient faire une mammographie, chaque année. « Le dépistage peut commencer avant l’âge de 40 ans, selon le choix du malade. Mais les symptômes tels qu’une grosseur au sein, un écoulement du mamelon et tout changement de la peau devraient être signalés à un chirurgien », dit-il.  
   

Questions à… Emmanuel Maurice, Counsellor: « Être à l’écoute est fondamental »

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"10178","attributes":{"class":"media-image alignleft wp-image-16877","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"350","height":"541","alt":"Emmanuel Maurice"}}]]Le cancer est une maladie qui est toujours tabou. Qu’est-ce qui peut être fait pour le démystifier ? En parler, tout simplement ! Un tabou existe et perdure en raison des croyances religieuses ou des convenances sociales qui font qu’il est interdit d’en parler, de critiquer ou de chercher à en savoir plus. Le cancer demeure parfois un sujet tabou parce qu’on a peur d’en parler. Cette peur est elle-même souvent nourrie par l’ignorance et le manque d’information. Alors pour démystifier, il est important d’en parler, de s’informer et d’informer, afin que cette frayeur ne soit plus néfaste pour ceux qui combattent cette maladie qui est ni une fatalité ni une malédiction. Comment peut-on accompagner une personne pour l’aider à vivre avec sa maladie et l’accepter ? Être à l’écoute de cette personne atteinte de cancer reste fondamental dans cet accompagnement. Au-delà de la souffrance physique liée à la maladie et au traitement, la souffrance psychique et émotionnelle implique que le malade a aussi besoin d’un soutien psychologique. L’accompagnement demande une compréhension de différentes phases émotionnelles, comme le déni et l’évitement, la peur et la colère, par lesquelles passe le patient, avant d’accepter la maladie. Il est important pour l’aide-soignant(e) de pouvoir aussi « aller au rythme » du malade sans le juger et sans essayer de le forcer à parler de son vécu de la maladie. Qu’en est-il des proches qui doivent les accompagner ? Le cancer affecte aussi les proches. Il est important qu’ils sachent qu’ils ne sont pas seuls et qu’ils peuvent bénéficier de toute aide dans cet accompagnement avec Link to Life ou Breast Cancer Care. Accompagner une personne malade ne veut pas dire s’oublier et se négliger au risque de s’épuiser, de ne plus pouvoir prendre soin de soi-même et d’assumer son rôle de ‘proche-aidant’. Nous avons besoin de nous accorder afin de vivre aux côtés du malade. Quel est le soutien de cet accompagnement finalement pour tous ceux concernés par le cancer ? L’accompagnement du malade dans son intégralité – c’est-à-dire au niveau physique, émotionnel, social et spirituel – est d’un apport essentiel, afin que ce dernier et ses proches puissent faire face aux difficultés que présente la maladie. Ce soutien, qui considère les besoins complexes du patient et de ses proches, devrait être complémentaire au traitement médical. Nous avons espoir que cela évolue davantage en ce sens à Maurice.  
   

Doyana Tour: « Il y a trop de préjugés et tabous »

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"10179","attributes":{"class":"media-image alignleft wp-image-16879","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"350","height":"547","alt":"Doyana Tour"}}]]La maladie l’a ébranlée, mais elle n’a pas voulu abandonner la lutte pour autant et se laisser mourir comme le font certains par pudeur, en raison des préjugés et du tabou de nos jours. Doyana Tour a choisi de témoigner à visage découvert car elle accepte sa condition de vie. En rémission depuis sept ans, elle vit malgré tout dans l’angoisse d’une rechute. « C’est en 2009 que j’ai découvert que j’avais une grosseur au sein grâce à l’autopalpation. Un médecin m’a proposé d’opter pour une biopsie et c’est là qu’on a découvert que j’avais un cancer. J’ai subi une ablation et suivi des traitements de chimiothérapie et de radiothérapie pendant presque une année. Ensuite, j’ai pris des médicaments pendant cinq ans, en sus des visites régulières à l’hôpital. Je suis en rémission. En théorie, je n’ai plus le cancer, mais je vis malgré tout dans l’angoisse d’une rechute. Depuis ma maladie, je suis tous les conseils. Même si on ne me recommande pas de ne pas manger de la chair, je ne mange que des plats végétariens. Je préfère suivre une alimentation rigoureuse. Je pratique une activité physique régulièrement et j’améliore mon hygiène de vie. » Elle se dit optimiste grâce au soutien de ses enfants et de ses proches. La spiritualité permet également à Doyana de faire face à cette épreuve. Ce n’était pas évident avec la chute de ses cheveux. Vivre avec un seul sein n’était pas évident non plus. C’est comme perdre un bras ou un autre membre de son corps. « À Maurice, il y a trop de préjugés et de tabous autour du cancer : j’ai perdu des amies qui se sont laissées mourir au lieu de se faire soigner. La peur nous empêche de faire des tests de dépistage. Mais le dépistage précoce permet une meilleure prise en charge de la maladie qui, traitée plus tôt, a plus de chances d’être vaincue. Mais il faut être fort. »  
   

Cancer du sein: l’âge est un des facteurs déterminants

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"10180","attributes":{"class":"media-image wp-image-16880","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"350","height":"547","alt":"Dr Ashraf Cadersa"}}]] Dr Ashraf Cadersa

Le cancer du sein est le plus répandu chez la femme. Le Dr Ashraf Cadersa, chirurgien à l’hôpital Apollo Bramwell, explique que comme pour les autres types de cancer, il est difficile de déterminer les causes. Mais, ajoute le médecin, il y a néanmoins un nombre de facteurs de risques qui ont été identifiés. L’âge est un des facteurs le plus déterminant. Plus on vieillit, plus le risque d’avoir le cancer augmente. Ainsi, la plupart des cas de cancer du sein sont-ils enregistrés à partir de 50 ans et rarement avant 40 ans, ajoute le Dr Cadersa. Les femmes sans enfant sont un peu plus à risques. Le risque diminue si la femme accouche de son premier enfant tôt. Il en est de même pour l’allaitement maternel qui a un effet protecteur contre ce cancer. Il y a un lien entre le cancer du sein et les premières menstruations, selon le Dr Cadersa. Et si la personne fait sa ménopause à un âge tardif, le risque est plus élevé que chez celles qui le font tôt. En sus de cela, les femmes sous la thérapie de remplacement d’hormones (les comprimés hormonaux suivant la ménopause) ont plus de risques de développer le cancer du sein, surtout si ces médicaments ont été pris pendant plus de cinq ans. Le spécialiste est cependant rassurant : même si une femme est exposée à un ou plusieurs de ces facteurs de risques, cela ne veut aucunement impliquer qu’elle aura le cancer du sein. Cependant, il y a des facteurs héréditaires à prendre en considération. Ainsi, le cancer du sein est plus présent chez les femmes d’origine africaine. Ces antécédents familiaux existent en raison des relations sanguines qui existent à travers la naissance et non à travers le mariage. Ainsi, avoir une maman, sœur ou fille ayant eu le cancer du sein, multiplie par deux le risque d’avoir le cancer du sein. Dans 10 % des cas, ce cancer est dû à des prédispositions familiales ou génétiques.  
   

Cancer commun chez les hommes

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Cancer commun chez les femmes

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