Le rapport minutieusement préparé par le Commissaire électoral, Irfan Abdool Rahman, sur la proposition radicale d’introduire le « same day counting » dans notre pratique électorale donnera lieu évidemment à bien des débats. Selon toutes les recherches, Maurice serait en retard sur plusieurs pays du tiers-monde, sans parler des pays développés, où les bulletins sont dépouillés le jour même des élections et les résultats aussitôt proclamés.
Il est néanmoins nécessaire de souligner que dans la plus grande démocratie du monde, c’est-à-dire l’Inde, dans de nombreux cas, la proclamation des résultats se fait plusieurs semaines après le vote.
Mais l’Inde est un pays géographiquement vaste et connaît des problèmes logistiques qu’on ne rencontre pas ailleurs. Tout comme l’Inde avec son immensité territoriale, Maurice, avec son exiguïté géographique a, lui aussi, connu une expérience particulière avec la démocratie en général et les élections en particulier. Les Mauriciens ont eu droit au suffrage universel depuis 1959, soit bien avant l’accession de plusieurs colonies britanniques et françaises à l’indépendance.
Mais qu’a-t-on vu tout de suite après ? Des pays à parti unique dirigés par des dictateurs. Si certains de ces tyrans se souciaient de respecter ce qu’on appelait la farce électorale, ils récoltaient toutefois plus de 95 % des votes aux élections.
Le système mauricien a connu des élections passionnément ou même hystériquement disputées. Toutefois, l’essentiel, c’est-à-dire le fair-play et le respect du système, a toujours été maintenu. Bien sûr, il y a eu des contestations légales mais le système n’a jamais été compromis.
Le « same day » implique deux problèmes majeurs aptes à ébranler l’ensemble du système. Le premier, comme évoqué par Irfan Rahman dans son rapport, serait d’ordre logistique. Comment trouver et gérer les ressources de personnel à mettre en place pour le « counting » immédiatement après le déploiement de l’énorme personnel qui a été actif pour l’exercice de vote depuis tôt le matin ? Le deuxième problème qui se pose et qui ne fait pas partie de l’attribution de la Commission électorale est le suivant : comment gérer l’ambiance explosive et hystérique créée par la mobilisation la nuit aux alentours des centres de dépouillement des votes ?
Il s’agit-là d’un problème culturel et sociologique unique à Maurice. Dans le système actuel, lors du dépouillement des votes engagé depuis le matin le lendemain, lorsque les tendances de vote se précisent, de part et d’autre, on commence à intérioriser les résultats éventuels. Les perdants s’éclipsent. Les gagnants se font de plus en plus bruyants.
Le Mauricien sobre en plein jour ensoleillé et le Mauricien « excité » dans l’obscurité de la nuit sont deux êtres totalement différents. On ne devait pas s’attendre à un comportement fairplay de la part des fanatiques des deux camps dans la nuit. Une simple allégation de « eleksion kokin » pourrait faire tout exploser dans la nuit.
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