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Banque des Mascareignes: mauvaise gestion relevée

Les rapports d’audit effectués en 2009 et 2010 par la firme BDO que nous avons obtenus de sources proches de la Banque des Mascareignes sont sans équivoque. Plusieurs manquements sont relevés. Sous les feux des projecteurs depuis une semaine, la Banque des Mascareignes est égratignée. Les rapports d’audit de la firme BDO viennent mettre en lumière les failles de sa gestion. Mais dans les milieux de la finance, on souligne que la situation aurait été autre, s’il y avait eu une meilleure coordination entre la Financial Services Commission (FSC) et la Banque de Maurice. D’autant que la transaction était visible dans les livres de la BAI. « Une fusion des deux entités auraient permis de mieux superviser le secteur financier dans son ensemble », nous explique un observateur. Néanmoins, après avoir récupéré certains documents de la Banque des Mascareignes, on constate que la gestion de cette banque commerciale laissait bel et bien à désirer. Dans son Internal Control Review de 2009 et 2010, la firme BDO note les divers manquements. Ainsi, au niveau de la gouvernance de l’entreprise, la firme d’audit souligne, dans le rapport 2009 conclu en mars 2010, que « le conseil d’administration est présidé en France, assisté par un seul directeur basé à l’île Maurice, la Chief Executive Officer (Ndlr : Nelly Jirari). Le conseil d’administration n’est pas en ligne avec le Code de gouvernance d’entreprise qui stipule que tous les conseils devraient avoir une forte présence de la haute direction avec au moins deux cadres en tant que membres. » Selon la structure du Board of Directors, sur les 8 membres, 7, soit 88 %, étaient domiciliés à l’étranger. On apprend également que la Banque des Mascareignes n’avait pas mis sur pied tous les comités recommandés par la Banque de Maurice. Ainsi, la Banque des Mascareignes n’avait pas mis sur pied le Board Governance Committee, le Board Compensation Committee et le Board Nomination Committee au 31 décembre 2009 comme souhaité par la Banque de Maurice. Passons aux observations du département de crédit. En 2009 donc, la firme BDO souligne que « nous notons dans la liste des « États de garanties à recueillir » qu’il y a plus de 200 cas pour lesquels des garanties doivent encore être obtenues même si le décaissement a déjà été effectué. » Et d’ajouter que « l’incapacité à obtenir des garanties dans le temps peut affecter la recouvrabilité de certaines dettes en cas de défaillances. » Par ailleurs, la firme d’audit affirme avoir «  demandé la liste des garanties expirées qui doivent être renouvelées et nous avons obtenu un rapport où le total de ces garanties s’élèvent à plus Rs1,7 milliard. » Au chapitre de l’anti-blanchiment d’argent / lutte contre le financement du terrorisme, BDO note que « le Money Laundering Reporting Officer (MLRO) n’a pas enquêté sur des transactions dites suspectes. Après enquêtes, certaines transactions, qui ont été initialement considérées comme suspectes par le personnel traitant avec les clients, ont été classées comme non-suspectes par le MLRO et n’ont pas été signalées aux autorités compétentes. Pour ces cas, le MLRO n’a pas offert de documentation pour expliquer le raisonnement derrière ses conclusions. »

Prêts non-productifs

Dans la Management Letter pour l’exercice financier 2009, BDO souligne la hausse de 48 % des prêts non-productifs. Mais aussi des risques de concentration venant de clients majeurs. Au 31 décembre 2009, la Banque des Mascareignes avait accordé des prêts totalisant Rs 14,3 milliards. Le montant des prêts non-productifs avait atteint Rs 162,6 millions contre Rs 109,7 millions en 2008. Dans la Management Letter de 2010, passant en revue les clients de la banque, BDO s’attarde sur le cas de Sipromad, groupe malgache qui cherchait des fonds pour la construction de la Tour Orange. Le prêt accordé par la Banque des Mascareignes à cette société malgache a été à l’origine de la révocation de la CEO Nelly Jirari. BDO indique ainsi l’absence d’un exercice profond visant à analyser les sources de revenus des entreprises faisant partie du groupe. Le montant « unsecured » du crédit accordé à Sipromad était de Rs 680 millions au 31 décembre 2010. BDO affirmera aussi que les informations « off-balance sheet » ont continué à être compilées manuellement en 2010. BDO précise dans la lettre que « nous attirons votre attention sur le fait que l’examen du système que nous réalisons pour les fins de notre audit, ne révèle pas nécessairement toutes les faiblesses, et pour cette raison les questions traitées dans cette lettre ne peuvent pas être les seules lacunes qui existent dans le système. Nous devons procéder à une étude extensive pour faire un examen plus approfondi afin d’identifier toutes les faiblesses du système existant ». À la suite de son exercice d’audit du bilan de 2010, la Banque des Mascareignes se passera des services de la firme BDO. [padding-p-1 custom_class=""][/padding-p-1]

La FSC avait autorisé une transaction de Rs 3,6 milliards

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"2311","attributes":{"class":"media-image aligncenter wp-image-2806 size-full","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"800","height":"710","alt":"La FSC avait autoris\u00e9 une transaction de Rs 3,6 milliards"}}]] La Financial Services Commission (FSC), dans une lettre datée du 13 janvier 2010 avait autorisé une transaction de Rs 3,6 milliards, permettant à la BAI Co.Mtius d’augmenter son ‘share capital’. Dans ladite lettre (voir plus loin), la FSC souligne que « nous nous référons à vos lettres datées du 21 décembre 2009 et le 11 janvier 2010 relatif à la demande d’approbation en vertu de l’article 23 (i) de la loi sur les services financiers 2007. Nous sommes heureux de vous informer que sur la base des documents soumis, la Commission a, en vertu de l’article 23 de la loi sur les services financiers 2007, approuvé l’émission de 3,6 milliards d’actions ordinaires d’une roupie chacune, à être souscrite par la British American Investment Co. (Mtius ) Ltd ». [padding-p-1 custom_class=""][/padding-p-1]

Des anciens cadres dans la tourmente

Quatrième arrestation par le Central CID dans le volet consacré au transfert allégué de Rs 3,6 milliards de la Banque des Mascareignes vers la BAI le 31 décembre 2009. Cette fois, la police a coffré l'ancien Relations Manager de la banque, Jean Jacques Heen Fah, qui a été placé en détention policière. Cet ancien cadre sera inculpé devant le tribunal ce samedi. Les limiers s’attèlent à comprendre comment cette énorme somme d’argent a pu être transférée vers la BAI. C’est l’ancienne directrice Nelly Jirari qui a balancé le nom de ses anciens collègues. L’ancien cadre au département Corporate de la banque, Mehdi Auckbarally, l’ancien Corporate Director, Lobine Umole ainsi que Nelly Jirari ont été inquiétés par la police. Quant à l’ancienne CEO de la banque, elle a fait ressortir, lors de son interrogatoire, qu'à son niveau, elle ne connaissait pas tous les détails des transactions de la banque. [padding-p-1 custom_class=""][/padding-p-1]

Et la responsabilité de la BoM ?

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"3451","attributes":{"class":"media-image alignright wp-image-699","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"400","height":"225","alt":"Banque de Maurice"}}]]La Banque de Maurice (BoM) est formelle : l’auditeur de la Banque des Mascareignes pour l’année 2009, BDO, ne l’a jamais alerté d’un quelconque transfert de Rs 3,6 milliards au bénéfice de BAI. Pourtant, la Banque centrale a passé au crible les rapports soumis par BDO pour l’année en question. Comme le veut la procédure, une réunion tripartite entre les superviseurs de la BoM, la direction de la Banque des Mascareignes et les auditeurs de BDO a suivi la soumission du rapport de BDO. Cet exercice avait pour objectif de revenir sur les irrégularités que BDO a soulevées suite à son audit. Toujours selon la BoM, durant cette réunion, il n’a été fait aucune mention de la transaction de Rs 3,6 milliards. Selon nos informations, un « senior partner » avait des rencontres régulières avec le précédent gouverneur. Nul ne sait si cette irrégularité a été discrètement évoquée, lors de ces rencontres. La BoM tient à rappeler que, selon la loi encadrant le secteur bancaire à Maurice, notamment l’article 39.10 de la Banking Act 2004, les auditeurs ont le devoir de l’avertir officiellement de chaque irrégularité détectée lors des audits des banques commerciales, surtout dans les cas de fraude et d’acte malhonnête. Au cas où il est avéré qu’il y a connivence entre un établissement bancaire et son auditeur, la BoM peut sévir et imposer des sanctions. Est-ce que la BoM aurait dû détecter la transaction de Rs 3,6 milliards en dehors de l’audit de BDO ? Il faut savoir que le régulateur effectue au moins une fois tous les deux ans des inspections dans les banques commerciales. La BoM explique qu’elle ne peut contrôler l’ensemble des transactions. Ces inspections servent, entre autres, à examiner le système de contrôle interne, à identifier et à évaluer les risques, et à en examiner certains comme ceux liés à la trésorerie ou aux crédits par exemple.
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