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Yvan Martial : «Nos politiciens font de l’Audit un bouledogue édenté»

L’ancien journaliste et observateur politique Yvan Martial insiste sur le fait que le gouvernement du Changement serait en train d’adopter une politique de « tricherie » en tenant les élections municipales en mai. Selon lui, ces scrutins auraient dû se tenir à mi-mandat.

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Malgré les promesses de baisse des prix après la victoire électorale, les consommateurs constatent une érosion continue de leur pouvoir d’achat. Le gouvernement a-t-il sous-estimé l’ampleur de la crise ou assiste-t-on à un échec des politiques de contrôle des prix ?
Promesses ne sont pas réalité. Surtout électorales. Surtout ministérielles. Promesses sont mensonges quand elles ne se réalisent pas. Y croient seulement les nigauds. Mais qui souffre des hausses des prix ? Surtout les gaspilleurs. Quelques paresseux. Pourquoi achète-t-on une paire de ‘dholl puri’ à Rs 20, quand un pain maison se vend à Rs 2,60. Nous avons tué la boutique du coin. On y allait acheter ce qui manquait à la maison. Dans les grandes surfaces, on poireaute aux caisses, avec un caddy surchargé d’articles, moisissant pourtant dans nos buffets. Privilégions les produits locaux. Plus facile à trouver dans ‘enn ti-bazar’ que dans les grandes surfaces, favorisant à outrance ceux du dehors. Plus particulièrement ceux de l’enseigne. Sommes-nous seulement capables d’aider financièrement nos rares associations de consommateurs ? Au ministre Sik Yuen, à qui nous offrons nos plus sincères condoléances, de nous prouver si, d’ici 2029, il sera ministre de la protection des Consommateurs ou celui de celle des Commerçants.

La colère gronde….
Où çà ? Ah oui, dans nos salons. Au bureau, à l’atelier. Est-ce suffisant ? Elle gronde pourtant mais dans les rues d’Israël. Elle manifeste contre Netanyahou voulant subordonner le Judiciaire de son pays (ça nous rappelle quelqu’un…). Il veut aussi exterminer le peuple palestinien jusqu’au dernier. Jésus-Christ était un Palestinien. Netanyahou veut imposer sa solution finale à Gaza et dans le Sud-Liban. La Bande de Gaza est pire que des camps de concentration. Ceux-ci n’étaient pas bombardés nuit et jour. Il y a des colères muettes, notamment en Ukraine. Muette car il y a mieux à faire. Résister aux hordes d’occupants russes que Donald Trump chérit. Ce valet inconditionnel des nouveaux Tsars que seuls Visages Pâles pouvaient plébisciter outre-Atlantique. Si colère doit gronder à Maurice, qu’elle se dirige contre le commerce de la mort. Mais l’action constructive vaudra toujours mieux que la seule colère.

Une inflation importée pour justifier la hausse des prix. Dans quelle mesure cette explication tient-elle la route, et le gouvernement a-t-il vraiment les moyens d’atténuer l’impact sur les Mauriciens ?
Au dire ministériel, notre roupie s’est dépréciée de près de 50 % entre 2014 et 2019. Notre roupie ne vaut plus que 50 sous. Elle nous procure la moitié de ce qu’elle nous procurait jadis. Si nous voulons la même quantité, il faut doubler le montant. Achetons mais plus intelligemment. Contentons-nous de l’essentiel. Ne confondons besoins vitaux et folles envies de dépenser, de gaspiller. Épargnons autant que faire se peut. 

Le régime en place semble osciller entre autosatisfaction et hésitation. Y a-t-il une véritable vision politique ou simplement une gestion au jour le jour ?
Pas l’ombre d’une autosatisfaction. En revanche un vertige d’hésitations. Il faut nettoyer les écuries d’Augias. Karcher n’est pas Hercule.

Changeons de sujet. Chaque année, le rapport de l’Audit pointe du doigt des dérives budgétaires et une mauvaise gestion des finances publiques. Pourquoi ces abus persistent-ils malgré les scandales et les promesses de réforme ?
Nos politiciens font de l’Audit un bouledogue édenté. S’il voulait un Audit efficace et performant, ils auraient déjà donné à son Directeur (que la Constitution devrait protéger) le droit de soumettre directement, sans passer par aucun ministre intermédiaire mais aussi goalkeeper, au DPP ou à la FCC, les cas de gaspillage de fonds publics les plus éhontés. Alors fonctionnaires et semi-fonctionnaires commenceraient à avoir peur de ce qui aurait dû être un Grand Inquisiteur aux pleins pouvoirs. Il défend l’argent des contribuables. Peut-on avoir tâche plus sacrée ?

De nombreux cas de mauvaise gestion sont relevés dans le rapport de l’Audit, mais rares sont les sanctions. L’État protège-t-il ses fidèles au détriment des contribuables ?
Le Rapport de l’Audit 2023-24 revêt un caractère particulier. Ministres et majorité parlementaire peuvent fustiger autant qu’ils le veulent leurs prédécesseurs à l’Hôtel du gouvernement, tristes héros de ce document tellement accablant. Voilà un Rapport de l’Audit pouvant enfin ressembler à un rotin-bazar. Allez-y de bon cœur militants et travaillistes. Vous n’êtes en rien responsables des scandales dénoncés dans ces 600 pages. Mais attention. Vous serez fustigés en 2026 et années suivantes, mais seulement par l’opinion publique malheureusement, avec votre rotin-bazar de 2025.

Êtes-vous en faveur de réintroduire le Performance-Based Budgeting ?
Je doute que le Ti-Dimounn puisse comprendre ce gros mot. La population entend, ces jours-ci, mais parfois seulement, parler de « responsabilité fiscale ». À tort ou à raison, elle comprend cela par le principe « le gaspilleur doit rembourser ». Intégralement sans échapper à une sanction, pouvant être le licenciement. Pas de place dans la fonction publique, corps paraétatique, compagnies d’État, pour les gaspilleurs, les resquilleurs, les corrompus, les ripoux et autres gredins de ce triste acabit. Mais là aussi, on nous ment. Exemple le feu de paille du slogan Ou zété ! Ou payé ! Là encore… Amende pour le jeteur de mégot mais impunité pour le gros paletot qui déverse son pétrole, ses eaux usées, dans un ruisseau ou qui le teint aux couleurs de l’arc-en-ciel. Impunité pour le bâtisseur qui assèche allègrement un marécage pour agrandir sa varangue ou aménager sa piscine. Amende pour un mégot mais rien pour celui balance son matelas, son frigo, sa carcasse de voiture au ruisseau.

Après cinq mois au pouvoir, comment qualifieriez-vous la gestion du gouvernement ?
Ma réponse ne saurait avoir la moindre importance ni signification. Tout gouvernement intelligent s’arrangerait pour avoir une évaluation nationale incontestable de l’ensemble de la nation au mi-mandat, par le truchement d’élections régionales (municipales et villageoises) quinquennales mais obligatoires. Si Changement est démocrate, il modifie prestement notre Constitution pour imposer cela. Si ce vœu se réalise, il faudrait même songer à de nouvelles Municipales en 2027. Ce test électoral à mi-mandat permettrait à tout un chacun de situer ses chances auprès de l’électorat. Il y a fort à parier que si le MSM n’avait pas la pétoche électorale aussi prononcée, il aurait maintenu les Municipales prévues en 2023. Il les aurait peut-être perdues. Mais cela lui aurait servi d’électrochoc.

Plusieurs institutions attendent encore des nominations à des postes stratégiques. Cette lenteur est-elle une preuve d’incompétence, de luttes internes ou d’une volonté de verrouiller l’appareil d’État avec des proches.

Cette lenteur peut s’expliquer par la crainte de ne pas pouvoir, aussi hâtivement, « put the right person, at the right place, in the right time ». Mais pourquoi un seul homme, fut-il Premier ministre, doit accaparer toutes les nominations majeures et stratégiques ? Pourquoi ne pas laisser chaque secteur concerné proposer, au Grand Sachem, une courte liste de quelques candidats valables et lui laisser le soin d’y dénicher l’oiseau rare. Mais attention ! Qui nomme est entièrement responsable des possibles méfaits du nominé. Mieux encore ! Le Grand Manitou laisse aux secteurs concernés le soin de nommer leur directeur général. Il se réserve, toutefois, le privilège de placer une épée de Damoclès sur l’occiput des choisis. « Tu fais le con, je coupe le fil de l’épée ». Le tout est de savoir si nos ministres doivent être au service de la population ou de leur « nou-bann ». Nous savons le sort que notre électorat réserve aux tenants et partisans du « noubanisme ».

L’absence du MSM aux élections municipales est perçue comme une fuite en avant. Pensez-vous que le MSM a pris peur face à une potentielle déroute ou s’agit-il d’une stratégie bien calculée ?
Capon reste capon. Pas de miracle en politique. Mais le MSM avait quand même 59 sièges de conseillers municipaux, acquis en 2015, à défendre (37 pour le PMSD et 24 pour le Mouvement Libérateur). 

Avec l’entrée en lice des extraparlementaires, ces municipales risquent de devenir un véritable baromètre de l’opinion publique. Le gouvernement peut-il encore espérer une victoire ou doit-il redouter un vote sanction qui rebattrait les cartes en vue des municipales ?
Il n’y a qu’un seul mot d’ordre pour l’ensemble de l’Opposition, forcément extraparlementaire : éviter toute division et dispersion des voix adverses au Changement PTr/MMM/ND/ReA. Que tous ces roitelets s’asseyent autour d’une table, ronde de préférence (pour éviter tout risque de présidence contestable), et y collent leur séant jusqu’à ce qu’ils trouvent le moyen de présenter une liste commune, mais unique et indivisible, pour contrer ce Changement, espérant surfer sur sa fallacieuse victoire du 10.11.2024 (Elle est davantage le refus obstiné de revoir la Kwizinn au pouvoir jusqu’à 2029. Soit une liste unique de l’Opposition réunifiée, soit la course d’un seul cheval. Imaginons seulement l’arrogance du Pouvoir si un 120-0 devait suivre un 60-0. Cette opposition enfin unifiée tient en ses mains hélas trop éparpillées le sort de la démocratie à Maurice

Après la débâcle électorale du MSM, le parti peut-il éviter une hémorragie de démissions ou assiste-t-on aux prémices d’un éclatement inéluctable ?
Un cadavre ne peut éclater, ni pisser du sang. Je parle sous la correction du Dr Satish Boolell, gardant un mauvais souvenir de son dernier déplacement à Souillac. Le MSM vit-il encore. Il est vrai que nous n’avons pas encore vu son avis de décès. Gardons espoir.

Pravind Jugnauth a-t-il encore un avenir politique ou sa traversée du désert annonce-t-elle la fin d’une ère pour le MSM ?
Je revois Gaëtan Duval écrasé par sa défaite électorale, au N°4, du 21.12.1976. Je le revois, flamboyant, après le triomphe bleu-blanc-rouge du 21.8.1983. Mais moins caracolant après sa mise en cachot du 23.6.1989, sans que Bhai Anerood ne lève le petit doigt pour le sortir de ce pétrin. Ne le répétez pas. J’ignore si Pravind et Xavier le savent. Au lendemain du premier 60 zéros du 11.6.1982, je revois Seewoosagur Ramgoolam, toute honte bue, devant parader aux Casernes centrales (anniversaire de la reine oblige) le 12.6.1982, en présence de son vainqueur, Bhai Anerood, encore chef de l’opposition. Je le revois, après ce 23.8.1983, trônant au château du Réduit mais en tant que gouverneur général et point comme premier président de notre République. La faute au MMM. Qui oublie, Bhai Anerood, concédant « enn bate bef », quand sonne l’angélus vespéral du 17.12.1995. On le revoit pourtant Premier ministre de 2000 à 2003, président de la République de 2003 à 2013, ré-Premier ministre de 2014 à 2017. Ministre mentor de 2017 à 2019. Qui ne se souvient de Navin Ramgoolam, hagard, la chemise déchirée, malmené par des gabelous, devant se contenter d’un 4x4 en guise de panier à salade, mis au cachot en février 2015, selon les prédictions du Bhai Anerood. Et pourtant… En dépit de Macarena, de cotomili, de coffres-forts, ne le voilà-t-il pas de retour à l’Hôtel du gouvernement et même au Bâtiment du Trésor, l’ancien fief de Raymond Bérenger dans les années 1950 ? Pourquoi l’Histoire ne se répètera-t-elle pas en faveur de Pravind Jugnauth ? Il sera de nouveau Premier ministre. L’âge joue en sa faveur. Tout vient à point à qui sait attendre.

Parlons Metro Express. Trois ans sans augmentation des tarifs, mais un déficit grandissant : peut-on encore tenir ce modèle sans faire payer davantage l’usager de ce transport ferroviaire ?
Trop tard pour une « révision complète du modèle économique ». Le vin « Metro Express » est tiré. Il nous faut boire jusqu’à la lie cette piquette. Démanteler rail et Metro Express coûterait peut-être aussi cher que leur aménagement. Que dire de l’obligation de remettre ce site, de plusieurs kilomètres de long, comme il était antérieurement ? Le mot d’ordre doit être : Sauvons ce qui peut l’être. La possible suppression des trains dominicaux entre Rose-Hill et Réduit est un bon signal. Y a-t-il seulement quelqu’un réduit au Réduit le dimanche ? Mais le transport en commun ne s’arrête heureusement pas au Metro Express. Grand merci nous avons nos autobus, même conduits par de juvéniles chauffeurs, agissant sous l’effet de la drogue y compris synthétique. Si subside suit, nos autobus pourraient s’électrifier. 

Le ministère du Transport doit faire pour l’autobus ce qu’il a fait pour le Métro Express. Quelques centaines de millions suffiront. Ce service public doit être subventionné. L’argent ne suffira pas. Le Metro Express a ses lignes réservées. L’autobus doit avoir les siennes. On pourrait, pour commencer, leur réserver entièrement quelques tronçons de la Route Royale entre et La Vigie, Curepipe et Port-Louis. Exemples : entre l’église Saint-Paul et la CWA à Phœnix, de la police de Rose-Hill à l’hôtel de ville, du rond-point du Sacré-Cœur à Beau-Bassin jusqu’à l’église adventiste, devant les Casernes centrales à la rue Lord Kitchener. Les voitures de maître devront se farcir les détours qui s’imposent. Troquons nos autobus mammouths contre des minibus de 20 places ou vans pour desservir nos banlieues. Rationnalisons la circulation routière en multipliant les sens interdits aux Plaines-Wilhems. À propos nos routes sont-elles faites pour la circulation routière ou pour le stationnement des véhicules, y compris ceux sur caisse ? Privilégions le transport en commun (la gratuité par exemple) aux dépens des voitures de maître (en taxant davantage le carburant). Qu’est-ce que quelques roupies de plus pour ceux s’offrant des voitures de luxe à plusieurs millions.

Multiplions les routes réservées aux deux roues et aux riverains. Tout devient l’impossible quand l’Imagination est au Pouvoir. Mais le Pouvoir peut-il se défaire de son arrogance pour prendre en considération de l’imagination du Ti-Dimounn ? Grand Manitou Konn Tou ou ministres serviteurs de la population, qui les a plébiscités, il faut choisir.

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