La PNQ du leader de l’opposition du 22 novembre dernier a permis de faire la lumière sur le problème de la drogue au sein des forces de l’ordre. Ainsi, 21 policiers ont été appréhendés pour délit de drogue entre 2014 et 2016.
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On apprend également, au grand dam du PM lui-même, que parmi ces 21 officiers, figure un membre de Vipsu, responsable de la sécurité de sa propre résidence. De plus, les 43 caméras du centre de détention de Moka ne sont pas en mesure d’enregistrer et le policier Arvin Hurreechurn était incarcéré dans une cellule où la caméra de surveillance était en panne.
D’autre part, les voyages suspicieux des bateaux vers La Réunion – où 43 kg d’héroïne, qui seraient manifestement destinés au marché mauricien, avaient été interceptés par la police française le 11 novembre dernier – et Madagascar se font à partir de la côte ouest, qualifiée par le leader de l’opposition comme « une véritable passoire ». La question que l’on se pose : y a-t-il vraiment une volonté à tous les niveaux de combattre le fléau de la drogue ?
La drogue représente, sur le plan global, un pactole de plus en plus attirant au nord comme au sud, avec un marché florissant, des profits énormes et des réseaux puissants et protégés.
Gouvernements des pays producteurs, politiciens de tout bord, services secrets des grandes puissances planétaires, systèmes bancaires peu regardants sur l’origine des dépôts qu’ils reçoivent, etc. utilisent et profitent d’un commerce qui rapporte des centaines de milliards de dollars.
Longtemps demeuré à l’écart du narcotrafic international, le continent africain s’y est mis il y a quelques décennies. Aujourd’hui, des milliers d’Africains, majoritairement des Nigérians et des Kenyans, sont emprisonnés de par le monde pour trafic des stupéfiants. Bien que confrontés aux ravages d’une consommation de plus en plus importante, qui accroît la petite délinquance comme la grande criminalité, les pays développés ferment les yeux sur bien des trafics, quand ceux-ci peuvent servir leurs intérêts politiques et géostratégiques.
Dans de nombreux pays d’Asie, d’Amérique latine et même en Italie, où la mafia s’est reconvertie depuis les années 70 dans le trafic des stupéfiants, on a assisté à la criminalisation progressive de secteurs entiers de l’armée, de la police et de l’appareil d’État. Bien des coups d’État s’expliquent, d’ailleurs, par la volonté des groupes dirigeants rivaux de contrôler à leur profit les réseaux du narcotrafic.
Il est alarmant de constater que la majeure partie des guerres ravageant aujourd’hui les points chauds de la planète sont financées par l’argent de la drogue. Une fois le communisme vaincu à la fin des années 80, ni les États-Unis ni la Russie n’ont continué à financer des mouvements de guérilla, longtemps partie prenante du conflit est-ouest. Certains s’éteignirent, d’autres trouvèrent de l’argent en passant des alliances avec les narcotrafiquants ou en montant leurs propres réseaux.
Les guérilleros latino-américains, comme le FARC en Colombie jusqu’à l’accord signé avec le gouvernement central cette année, contrôlent toute une partie non négligeable des zones de production de la coca. En Asie, la drogue finance, en grande partie, les conflits régionaux du Cachemire, du Penjab indien, du Pakistan, de l’Afghanistan, ainsi que les activités terroristes et militaires de Daech au Moyen-Orient.
En Afrique également, la vente des stupéfiants est devenue pour de nombreux mouvements armés et séparatistes – au Mali, Sénégal, Nigeria (Boko-Haram), etc. – une source irremplaçable de revenus. Guerre et drogue sont intimement liées. Deux phénomènes qui sont apparus au début des années 80 expliquent pourquoi, de par le monde, les paysans sont de plus en plus nombreux à pratiquer ces cultures illicites : l’explosion de la demande dans les pays industrialisés et ailleurs, de même que les politiques de dérégulation de l’économie mises en œuvre dans les pays du sud endettés dans le cadre des programmes d’ajustement structurel.
Face à l’ampleur du phénomène, toute tentative d’éliminer les cultures illicites aboutit souvent à des résultats opposés au but recherché. C’est en réalité à une mise à plat du système économique mondial, marqué par de profondes inégalités, à une dénonciation des innombrables intérêts qui gèrent la narcoéconomie, qu’il conviendrait de se livrer pour essayer de combattre le fléau. À Maurice, le marché se porte bien et selon toute vraisemblance, ce n’est certainement pas l’arrestation de quelques « petits poissons » qui casserait les reins à ce trafic mortel. Avec la protection occulte dont il bénéficie sur le plan global, le commerce de la drogue, paraît-il, a encore de beaux jours devant lui.
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