Cette semaine revêt une importance particulière concernant le retour de l’archipel des Chagos dans l’escarcelle mauricienne. Lundi, Jonathan Powell, conseiller à la Sécurité nationale du Royaume-Uni, et sous la direction duquel un accord politique entre Maurice et le Royaume-Uni avait pu être conclu sur ce dossier, est attendu à Port-Louis.
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Envoyé par le Premier ministre britannique, sir Keir Starmer, pour une réunion particulièrement importante avec le Premier ministre, Navin Ramgoolam, Jonathan Powell devrait présenter une ébauche de traité entre les deux pays et qui pourrait être soumise au Parlement britannique possiblement d’ici la fin de cette année.
Pour cette réunion, le Premier ministre Ramgoolam devrait être accompagné de son adjoint, Paul Bérenger, du ministre des Affaires étrangères, Ritesh Ramful, et de l’Attorney General désigné, Mᵉ Gavin Glover, entre autres. À noter que Navin Ramgoolam a déjà eu des discussions avec sir Geoffrey Cox, parlementaire britannique et King’s Counsel, et d’autres conseillers légaux qui défendent les intérêts mauriciens sur la marche à suivre sur le dossier Chagos. Washington sera aussi briefé sur les retombées de cette réunion.
À noter aussi que Navin Ramgoolam a déjà rencontré la Haut-commissaire britannique à Port-Louis, Charlotte Pierre, vendredi soir, au Bureau du Premier ministre. Durant cette visite de courtoisie, l’accord politique sur les Chagos a été « largement à l’agenda ». Elle a assuré Navin Ramgoolam de la volonté du Royaume-Uni de finaliser le dossier de rétrocession au plus vite.
Selon les termes du traité proposé, le Royaume-Uni reconnaîtrait formellement la souveraineté de Maurice sur les Chagos. Cependant, Diego Garcia, qui abrite une base militaire stratégique, resterait sous contrôle britannique pour une période initiale de 99 ans, renouvelable. Durant cette période, le Royaume-Uni continuerait d’exercer « les droits et autorités souverains nécessaires » pour garantir l’exploitation de la base militaire, essentielle à sa politique de défense. Ce compromis vise à concilier les revendications de souveraineté mauriciennes, validées par des résolutions de l’ONU et des avis juridiques internationaux, avec les intérêts stratégiques britanniques et américains, ces derniers étant les principaux utilisateurs de la base de Diego Garcia.
Au-delà de la question militaire, l’accord entend formaliser une coopération renforcée entre Maurice et le Royaume-Uni dans plusieurs domaines. Les deux parties travailleraient conjointement à la protection de l’environnement, notamment via la création d’une zone marine protégée sous contrôle mauricien, remplaçant celle actuellement gérée par le Royaume-Uni sous l’appellation British Indian Ocean Territory. Une collaboration accrue sur la sécurité maritime et la lutte contre la pêche illégale, enjeux cruciaux dans cette région stratégique de l’océan Indien, sera aussi abordée dans le traité. Un nouveau partenariat économique et environnemental sera aussi élaboré, et le Royaume-Uni financerait des projets d’infrastructure à Maurice pour soutenir cette collaboration.
Le sort des Chagossiens au cœur des discussions
L’accord propose également des mesures spécifiques pour les Chagossiens, communauté déracinée à la suite de l’expulsion des habitants de l’archipel dans les années 1960 et 1970. Parmi les dispositions prévues : un programme de réinstallation. Maurice serait autorisé à réinstaller les Chagossiens sur certaines îles extérieures de l’archipel, à l’exception de Diego Garcia. Il est aussi question d’établir un fonds de soutien : cofinancé par le Royaume-Uni. Il vise à améliorer le bien-être des Chagossiens, avec des aides supplémentaires pour ceux résidant au Royaume-Uni.
Le traité, une fois finalisé, prendra la forme d’un accord juridiquement contraignant en droit international. Son texte sera publié dans les prochaines semaines, si un consensus est trouvé entre les autorités du Royaume-Uni et de Maurice. Parallèlement, le gouvernement britannique s’apprête à introduire une législation à la House of Commons pour intégrer certaines dispositions du traité dans son droit interne. Le traité et la législation associée seront soumis au Parlement britannique pour examen, avec un objectif de ratification fixé à 2025.
Sans le dire ouvertement, un des objectifs est de pouvoir potentiellement conclure le deal avant que le président élu des États-Unis, Donald Trump, ne prenne officiellement ses responsabilités. Il doit être assermenté en tant que 47ᵉ président des États-Unis le 20 janvier 2025, date d’inauguration de son deuxième mandat présidentiel et à laquelle il entrera immédiatement et légalement en fonction.
Un fort lobby est exercé pour bloquer la mise en œuvre de la rétrocession de l’archipel à Maurice, invoquant des préoccupations sur la sécurité mondiale. Selon la presse britannique, Donald Trump aurait sollicité un avis juridique du Pentagone pour contester cet accord, signé sous le Premier ministre britannique sir Keir Starmer et soutenu par Joe Biden, actuel président des États-Unis.
Au Royaume-Uni, le gouvernement tente d’apaiser les inquiétudes américaines. Stephen Doughty, ministre des Affaires étrangères, a déclaré il y a une dizaine de jours, à la Chambre des communes, que son gouvernement s’efforce de rassurer Washington sur les avantages de cet accord, jugé « inévitable » après la décision de la Cour internationale de Justice affirmant que le Royaume-Uni n’a pas la souveraineté sur l’archipel.
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