Les cas de complot entre détenus et gardes-chiourmes deviennent de plus en plus fréquents. Mais quel est le lien qui unit ces officiers aux détenus ? Quelles sont les raisons qui les poussent à collaborer avec les condamnés ?
Le dernier cas en date remonte au mois de septembre où un garde-chiourme de 28 ans, posté à la prison de Grande-Rivière-Nord-Ouest, a été pris la main dans le sac lorsqu’il tentait de remettre de la drogue à un détenu. Cet officier, qui était d’ailleurs sous surveillance depuis plusieurs mois, était soupçonné d’agir comme passeur de drogue à la prison. Le colis qu'il allait livrer était dissimulé dans ses chaussettes et c’est en retirant ses chaussures qu’il s’est fait prendre par ses collègues. Des cellulaires et une somme de Rs 5 900 ont aussi été retrouvés lors d’une fouille dans le casier (locker) du garde-chiourme.
Une source de la prison lève un coin du voile sur cette collaboration détenus-officiers. Elle explique que ce sont les caïds qui soudoyent les gardes-chiourmes. Ces caïds sont très influents et surtout riches. Une forte somme d’argent est ainsi mise en jeu. Le montant équivaut bien souvent à la valeur monétaire du colis attendu. Les passeurs sont toujours rémunérés en dehors de la prison par la famille des commanditaires.
[panel contents="Souvenez-vous de la mutinerie du dimanche 27 juin 2010 à la prison de Grande-Rivière-Nord-Ouest. Quatre détenus ont accusé un garde-chiourme d’être impliqué dans cette affaire. Ils l'ont identifié lors d’une parade deux jours après l’évasion. La Prison Officer’s Association (POA) a fait bloc derrière l’accusé." label="Un garde-chiourme présumé complice de mutinerie" style="info" custom_class=""]
[blockquote]«Le phénomène du trafic d’objets prohibés existe dans toutes les prisons du monde. Mais chaque milieu pénitentiaire applique sa propre discipline pour contrer ce mal. Malgré cela, il y a toujours des brebis galeuses en quête d’argent facile qui tombent dans les filets des caïds », avance un haut cadre de l’administration de la prison.[/blockquote]
C’est la raison pour laquelle, poursuit notre source, que la prison doit interdire aux nouvelles recrues de se mélanger aux détenus dans les cours de récréation ou autres. Ces officiers devraient plutôt être postés dans les postes d’observation de la prison.
« Le trafic de produits prohibés se déroule entre quatre protagonistes et à travers un véritable réseau. D’abord, il y a celui qui amène le colis à la prison. La marchandise est ensuite remise à l’officier qui est posté au portail. Ce dernier, lui, passe le colis à un autre officier affecté dans la cour et c’est un autre garde-chiourme qui a accès au détenu qui collecte la marchandise pour le remettre au destinataire », explique notre source.
Mais des fois, il arrive que les passeurs prennent l’argent de leurs commanditaires et refusent de prendre les colis. « Dans ce cas le garde-chiourme se fait rosser soit par les détenus, une fois qu’il met les pieds à la prison ou par les membres de la famille du détenu », poursuit notre interlocuteur.
Vigilance accrue
La prison explique qu’il y a diverses raisons qui poussent les gardes-chiourmes à endosser la veste de passeurs. D’abord, l’argent facile. Puis, il y a le chantage et les menaces qui leur sont proférées. Finalement, il y a le facteur de sélection lors du processus de recrutement. Mais le Commissaire des prisons Jean Bruneau est catégorique. Le service des prisons investit beaucoup dans les dispositifs de recherche (chiens renifleurs/caméras de surveillance CCTV) pour repérer la drogue et les téléphones portables qu'on essaie de faire entrer en douce. Les services de renseignements sont sur le qui-vive. Il y a aussi des fouilles régulières à la prison.De la drogue dans du ‘briani’
Les officiers développent au fil du temps des moyens des plus astucieux pour transporter leurs colis. En 2013, les effets personnels d’un élément de la Prison Security Squad (PSS) ont été soumis à une fouille par les officiers et de la drogue a été retrouvée dans sa nourriture, du briani. C’est un cas qui a fait un grand bruit dans le service.La fouille des chaussettes obligatoire
Les officiers, qui prennent leurs services, sont tous soumis à une fouille (rub down search) avant de mettre les pieds dans la prison. En cas de soupçons, l’officier est conduit dans une salle séparée où il est soumis à une fouille corporelle. Un haut gradé de la prison explique que la fouille des chaussettes est devenue obligatoire depuis peu. Il souligne que les éléments de la Prison Security Squad (PSS) doivent également se soumettre à des fouilles même s’ils ne travaillent pas directement avec les détenus. Ils sont généralement postés dans les tours de guet de la prison et au portail.Où finissent les cellulaires ?
Les saisies de téléphones cellulaires et de cartes Sim sont courantes à la prison. Mais où finissent ces gadjets, bien souvent sophistiqués, une fois qu’ils sont saisis ? « Un téléphone portable est l’outil le plus dangereux qu’un détenu puisse posséder en prison. Il peut commanditer un meurtre rien que par un coup de fil. Ce serait bien que le département démontre comment il détruit ces appareils électroniques », fait ressortir un haut cadre.Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !