«Les 10 ans les plus noirs de mon existence », murmure Sheila Uppeegadoo, la voix pleine d’émotion. Victime indirecte de l’effondrement de l’ex-BAI, elle a témoigné, samedi matin au Taher Bagh Hall de Port-Louis. Son récit, poignant, rappelle les lourdes conséquences humaines et financières du scandale.
En 2015, Sheila et son époux Atma étaient à un tournant crucial de leur vie. Lui, ancien caporal de police ayant dévoué 39 ans de service à la nation, luttait contre le diabète. Une lueur d’espoir avait jailli lorsque la famille avait trouvé un donneur pour une transplantation rénale en Inde. « Tout était sur le papier, il ne restait qu’à prendre l’avion pour l’intervention », se remémore Sheila tristement. Mais le destin avait d’autres projets.
En avril 2015, l’effon-drement de la BAI a brisé leurs rêves... Le couple avait placé ses économies dans le fonds Super Cash Back Gold (SCBG), un investissement censé être sûr. Avec ces fonds, ils comptaient financer l’opération vitale d’Atma. « Mon époux se demandait chaque jour si nous allions percevoir l’argent. Mais nous n’avons rien eu », se désole la veuve.
L’angoisse montait, mais aucun remboursement n’était en vue.
Le 1er août 2015, Atma est décédé. Il avait 62 ans. « Cet argent aurait pu lui sauver la vie », souffle Sheila, le regard fixé sur un passé qu’elle n’arrive toujours pas à enterrer. Depuis, la vie de Sheila s’est figée dans une spirale de douleur, de perte et de colère. « Jusqu’à présent, nous sommes encore dans le noir. »
Le traumatisme s’étend bien au-delà d’elle. Leurs deux fils, aujourd’hui quadragénaire et trentenaire, portent encore les stigmates de la perte de leur père. Une famille déchirée, des vies bouleversées, et un avenir teinté d’une espérance amère. Car malgré tout, Sheila persiste à croire en un changement. « L’espoir fait vivre les imbéciles, mais nous entretenons l’espoir qu’il y aura un nouveau départ », confie-t-elle avec résilience.
L’effondrement de la BAI n’a pas seulement bouleversé l’économie mauricienne, il a également mis à nu les failles d’un système financier défaillant et l’indifférence des institutions envers les drames humains qu’il engendre. Pour Sheila, chaque jour sans son mari est un rappel cruel de ce qu’elle a perdu. Dix ans plus tard, la veuve a récupéré seulement 50 % de son investissement. Sans plus. Aucune aide, aucune reconnaissance n’est venue du gouvernement d’alors, la laissant désemparée face à une machine administrative insensible.
Aujourd’hui, avec le retour de Dawood Rawat sur le territoire mauricien, Sheila entrevoit une étincelle d’espoir. « C’est une occasion de regarder en face la vérité et d’obtenir justice.
Justice doit être rendue dans cette affaire. Nous avons trop attendu », affirme-t-elle dans une déclaration téléphonique, peu après la rencontre avec les souscripteurs des plans SCBG et Bramer Assets Management (BAM).
En témoignant devant ses pairs et l’ancien patron de la BAI, Sheila cherche non seulement à réclamer ce qui lui revient de droit, mais aussi à redonner une voix à tous ceux qui, comme elle, ont vu leurs vies détruites par ce scandale financier.
Pour elle, ce combat n’est pas seulement personnel, il est aussi celui d’une vie entière vouée à la recherche d’une vérité, d’une reconnaissance et d’un semblant de réparation. Et la mère de famille l’a bien fait comprendre lors de son témoignage, lorsqu’elle rappelle que derrière les chiffres et les procès, il y a des vies brisées, des familles anéanties, et des rêves envolés.
« C’est comme si c’était hier… » conclut-elle.
Mais hier est un poids écrasant, et demain reste une promesse incertaine.
Salim Muthy : « Ena enn lespwar avek Navin Ramgoolam »
Lors de son intervention, Salim Muthy, le porte-parole des souscripteurs, leur a demandé de donner du temps au temps. Il a ensuite fait comprendre que l’une des options est de développer une formule visant à rembourser la totalité de la somme injectée par les souscripteurs dans les plans SCBG et BAM : « Nou pou gete. Nou amenn 4-5 propozision. Omwin aret sa batay-la. Lot Nwel nou kapav asize nou manz enn bout ‘Christmas cake’. »
Il y a un espoir, selon lui. « Dawood Rawat a fait comprendre qu’il a eu une rencontre positive avec le PM Navin Ramgoolam, mais nous devons laisser le temps de faire son travail. Nou atann ankor. Anou pran pasians », demande-t-il. Salim Muthy a ensuite rappelé que certains souscripteurs ont investi la somme de Rs 100 ou encore Rs 200 dans les plans SCBG et BAM. « Sa ansien gouvernman pa ti le pey sa bann dimounn-la ! Sa kalite dominer-la zot inn fer. Me ena enn lespwar avek Navin Ramgoolam. Le 4 novam mo ti dir ou al vot sa gouvernman-la masivman. Ek sa gouvernman-la pou bizin rekonesan anver ou ek misie Rawat. »
Selon Salim Muthy, « Navin Ramgoolam est sensible aux problèmes humains. Nous souhaitons qu’il soit à l’écoute, la population lui a fait confiance. Se bann dimounn ki dan soufrans ki pe rod zistis. Ou enn viktim zeneralize. Nou pou amen sa konba-la avek zot ansam ».
Salim Muthy a ensuite déploré les « tret ek vander » : « Malerezman inn ena bann dimounn kinn diboute ek finn manz ar zot. Zot inn vande. Me lepep anvi trouv lazistis. Tou bann ki finn kokin bizin dan kaso. MSM finn detrir ou ».
Et d’ajouter : « J’espère que le nouveau régime travaillera dans l’intérêt des petits investisseurs et entrepreneurs. Nou pou kontign lager. Ena enn lespwar, nou ena lespwar ki ena kominikasion ki pou ouver biento. Nou pou aksepte diskite. Me donn nou letan. Mo konpran dimounn bizin larzan. Nou pou trouv solision pou satisfer zot. Lane prosenn fer 10 an. Mo panse nou fini sa 10 an la avek satisfaksion. »
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