Les caïds Peroomal Veeren et Siddick Islam bénéficient d’une attention spéciale depuis quelques mois. Ils sont soupçonnés d’avoir concocté un plan avec leurs hommes de main en liberté ainsi qu’un cambiste véreux pour s’évader vers Madagascar.
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Les autorités carcérales et policières sont sur le qui-vive. Cela fait plusieurs mois déjà qu’elles sont en présence d’une série de renseignements troublants au sujet d’un plan d’évasion échafaudé par les caïds emprisonnés Peroomal Veeren, dit Nobee et Siddick Islam, alias Nerf.
Détenus respectivement à la Prison Centrale, à Beau-Bassin, et à l’Eastern High Security Prison, à Melrose, ils caressent le projet de rejoindre un pays d’Afrique avec le soutien de leurs hommes de main grassement rémunérés avec l’argent provenant du trafic d’héroïne qu'ils contrôlent.
La police ne sous-estime pas les caïds en raison des moyens financiers à leur disposition.
Les premières informations quant à une fuite vers le continent noir, via Madagascar, concernent Peroomal Veeren. Elles remontent à la période d’avant la saisie des 157 kilos d’héroïne évalués à Rs 2,4 milliards, en rade de Port-Louis. Le caïd multipliait alors les grèves de la faim.
L’administration carcérale avait revu le niveau de sécurité autour de ses déplacements vers l’hôpital Jawaharlal Nehru, à Rose-Belle, lorsque son état de santé l’exigeait. Dans ces cas-là, des hommes de la Prison Security Service (PSS) étaient chargés de l’escorter.
Le caïd était, à l’occasion, transporté dans un véhicule banalisé, car la PSS craignait qu’une voiture-bélier ne soit utilisée pour s’attaquer à la fourgonnette de service. Une stratégie a été mise en place pour éviter un tel scénario. Un itinéraire différent est choisi à la dernière minute pour les déplacements de Peroomal Veeren et seuls les hommes de confiance sont choisis pour l’escorter. Depuis la saisie des 157 kilos d’héroïne, le caïd n’a aucune raison de demeurer en prison. La police a donc sorti le grand jeu pour l’escorter en cour car elle a appris qu’il pourrait bénéficier d’appui de gardiens de prison véreux.
Un hélicoptère, un blindé, des commandos du Groupe d’intervention de la police mauricienne et de la National Coast Guard (NCG) ainsi que des agents de la Special Support Unit (SSU) étaient mobilisés pour sa dernière comparution en cour intermédiaire le mardi 11 juillet.
Peroomal Veeren devait prendre connaissance du verdict dans l’affaire des comprimés de Subutex retrouvés dans sa cellule. Des officiers de la police régulière et de l’Anti-Drug and Smuggling Unit (Adsu) étaient dans la foule au tribunal et sur son trajet. Rien n’a été laissé au hasard et la salle d’audience a même été interdite au public.
Antoine Georgy Wesley Badhoodeenkan, alias Toto, recherché par l’Adsu depuis février dans l’affaire des Rs 30 millions de Subutex saisis à Roche-Bois, est soupçonné de faire partie du réseau chargé d’exfiltrer Peroomal Veeren du pays. As du volant, ce présumé assassin de Denis Fine aperçu récemment dans la région de Pamplemousses et de Terre-Rouge, est également censé aider Siddick Islam à prendre le large. En prenant le contrôle d’un véhicule spécialement préparé pour ce projet, sans doute un puissant tout-terrain.
Les autorités ont été averties que Siddick Islam risquent de vouloir détourner l’attention des gardiens de prison en faisant croire qu’il est victime de troubles cardiaques. Il sera alors « pris en charge » par des « complices » dans l’établissement où il sera admis. Si Peroomal Veeren et lui-même arrivent à fausser compagnie à leurs gardiens, ils seront placés en lieu sûr avant d’être dirigés vers un hors-bord surpuissant, voire un yacht, sous contrôle d’un skipper de confiance et habitué aux eaux malgaches.
La thèse d’une fuite par la mer semble plausible car plusieurs magazines spécialisés ont été saisis dans la cellule de Peroomal Veeren. Même si la police dispose de l’hélicoptère Dhruv et du patrouilleur Barracuda pour contrecarrer une telle fuite, elle ne veut cependant rien laisser au hasard, car cette double évasion serait financée par un cambiste - money changer - notoire de la place soupçonné d’être spécialisé dans le blanchiment de l’argent émanant de leurs activités illicites.
La police ne sous-estime pas les caïds en raison des moyens financiers à leur disposition. Des renseignements faisant état que des armes de contrebande pourraient être acheminées de Madagascar pour faciliter ce projet, a déjà fait l’objet d’une enquête de la part de la cellule antiterroriste en début d’année. L’ex-steward d’Air France, Christophe Caterino, ayant rejoint La Réunion à bord d’une vedette rapide en juin 2009, alors que le tandem Sunny Ramkissoon-Rishi Luchun a rallié la Grande île sur le trimaran Patrol One six mois plus tôt, gardent les autorités en état d’alerte. Plus précisément parce qu’un de leurs complices également emprisonné, le trafiquant Curly Chowrimoothoo, « contrôle » un réseau composé de skippers.
Les plans de Peroomal Veeren et de Siddick Islam ont cependant évolué depuis la saisie des 157 kilos d’héroïne et la mise en accusation de plusieurs de leurs principaux lieutenants. Le premier a été placé en isolement depuis qu’il est soupçonné d’avoir passé un appel international sur un téléphone portable depuis la Prison centrale. Quant au second, il risque le même sort. Il a porté des allégations contre le Commissaire des prisons, Vinod Appadoo, mercredi. Il a soutenu à Sam Lauthan, l’un des assesseurs de l’ex-juge Paul Lam Shang Leen venu le rencontrer en prison, que l’ancien patron de l’Adsu lui a remis du Lanate à travers un gardien de prison afin d’empoisonner d’autres caïds de la drogue.
Si Siddick Islam a bien été en possession de ce poison violent, ce qui devra être confirmé par le Forensic Science Laboratory, il sera considéré comme dangereux et placé en isolement. Jusqu’ici, il ne bénéficie pas du même traitement que Peroomal Veeren. Il a été escorté par le Correctional Emergency Response Team (CERT) pour son audition devant la Commission d’enquête sur la drogue en début de semaine.
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