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Prisheela Mottee, présidente de l’association Raise Brave Girls : «L’éducation parentale est essentielle pour prévenir les violences»

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Afin d’assurer une intervention rapide, coordonnée et efficace, l’ONG Raise Brave Girls propose le « Brave Flag System ». Ce système vise à connecter toutes les autorités concernées en ligne pour prévenir les drames liés à la violence et à la négligence envers les enfants.

Les violences envers les enfants sont de plus en plus fréquentes, comme en témoigne le récent décès tragique d’une fillette d’un an et demi (NdlR, la petite Marie Catalea Nalatambee, 19 mois). Quelles sont les principales causes de ces violences ? Est-ce uniquement la drogue ?
Les violences envers les enfants, comme en témoigne le récent décès tragique d’une fillette d’un an et demi, sont malheureusement de plus en plus fréquentes en raison de divers facteurs. L’abus de drogues par les parents ou les proches altère le jugement et augmente considérablement les risques de violence et de négligence. 

Le manque d’éducation parentale, notamment sur la gestion du stress et l’éducation positive, conduit trop souvent à des comportements abusifs. De plus, la pauvreté aggrave la situation en créant un stress financier qui nuit à la capacité des parents à répondre aux besoins émotionnels et physiques de leurs enfants. Enfin, l’absence de suivi social et psychologique laisse de nombreuses familles vulnérables sans aide, alimentant ainsi une spirale de violence. 

Une action urgente est impérative, notamment à travers des programmes d’éducation parentale et un meilleur accès aux services sociaux et psychologiques pour protéger les enfants.

La ministre de la Femme et des enfants a tiré la sonnette d’alarme en appelant à une plus grande responsabilité de la part des parents. Votre ONG, Raise Brave Girls, milite activement pour cette cause depuis des années. 
Cette déclaration rejoint pleinement la mission de Raise Brave Girls, qui œuvre depuis des années pour sensibiliser les parents à leur rôle crucial dans l’éducation et la sécurité de leurs enfants, notamment des filles. Nous croyons fermement que l’éducation parentale est essentielle pour prévenir les violences et les abus. 

C’est pourquoi nous soutenons et promouvons l’« École des parents », un programme visant à fournir aux parents les outils nécessaires pour comprendre les besoins émotionnels et physiques de leurs enfants, et adopter des pratiques éducatives positives. 

Pensez-vous qu’il y a eu un certain relâchement des parents ces dernières années ?
Il est indéniable que, ces dernières années, un relâchement a pu se manifester chez certains parents, notamment avec l’augmentation du nombre de parents actifs professionnellement. Il existe un réel besoin d’encadrement des parents, dès la grossesse et au-delà, avec des programmes soutenus par les autorités couvrant des aspects aussi bien pratiques que psychologiques. Par exemple, dans de nombreux pays, comme en Scandinavie (Suède, Norvège), des initiatives de soutien pendant la grossesse sont mises en place. 

Des formations en pédagogie et en soutien psychologique pendant la grossesse, mais aussi après l’accouchement, devraient être instaurées pour renforcer les compétences parentales et offrir un accompagnement émotionnel. Ces programmes permettraient d’éviter des comportements négligents ou violents, d’encourager l’éducation positive et de soutenir les parents dans leurs défis quotidiens. 

En parallèle, l’intégration de cours de psychologie permettrait d’aider les parents à mieux comprendre les besoins émotionnels de leurs enfants et à mieux gérer le stress, surtout dans un contexte où de nombreux parents jonglent entre le travail, la vie personnelle et la parentalité. 

L’avenir des enfants étant en jeu, il est impératif d’avoir une structure centralisée et forte»

Même si les parents travaillent, n’existe-t-il pas des solutions pour les responsabiliser afin qu’ils veillent sur leurs enfants, et en particulier sur leurs adolescents ? 
Dans d’autres pays, plusieurs initiatives ont été mises en place pour accompagner les parents, même ceux qui travaillent, afin qu’ils puissent veiller sur leurs enfants, en particulier les adolescents. Par exemple, en Scandinavie, des services de garde après l’école sont largement développés, offrant des activités éducatives et récréatives encadrées pour les enfants et les adolescents, permettant ainsi aux parents de travailler en toute tranquillité.

En Suède, les cours de parentalité sont souvent gratuits et accessibles à tous, offrant des conseils pratiques sur la gestion de la parentalité, la résolution de conflits et la gestion des comportements des adolescents. En Finlande, des programmes de soutien psychologique sont également mis en place dans les écoles, où les parents peuvent accéder à des services de conseil pour mieux comprendre les besoins émotionnels de leurs enfants.

Par ailleurs, au Canada, des applications et outils en ligne sont utilisés pour maintenir une communication constante entre les parents et les établissements scolaires. 

L’absence ou le manque d’éducation peut-il avoir une influence sur ce genre de comportement ? 
L’absence ou le manque d’éducation, la pauvreté et une société patriarcale ont des conséquences dévastatrices sur les comportements violents et abusifs, en particulier envers les femmes et les enfants. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), une femme sur trois dans le monde subit des violences physiques ou sexuelles au cours de sa vie, et dans de nombreux cas, ces violences trouvent leur origine dans des normes sociales patriarcales qui dévalorisent la dignité et les droits des femmes. 

En outre, les enfants issus de milieux défavorisés sont plus vulnérables à la négligence et à la violence, en raison du stress lié à la précarité économique. 

Les enfants issus de milieux défavorisés sont plus vulnérables à la négligence et à la violence, en raison du stress lié à la précarité économique»

Ailleurs, il existe des écoles de parents, des formations, des guides, et des pairs. Faut-il envisager un tel modèle chez nous, surtout dans les régions les plus défavorisées ? 
Il est essentiel d’envisager la création d’écoles de parents et de formations pour les parents, en particulier dans les zones vulnérables. Des pays comme la France, l’Espagne, la Norvège, et la Suède ont déjà mis en place des programmes similaires qui offrent un soutien éducatif aux parents sur des sujets tels que la parentalité positive, la gestion des conflits et la prévention des violences domestiques. 

Pour notre pays, ces formations devraient être intégrées dans toutes les écoles, notamment après les heures de classe ou en soirée, afin de toucher un large public, en particulier ceux qui travaillent. Les formations devraient être accessibles à tous, gratuites ou à faible coût, et pourraient inclure des pairs pour faciliter les échanges et rendre l’expérience plus concrète. Un tel programme offrirait un soutien précieux aux parents, réduirait les risques de violence et créerait un environnement plus sécurisé pour les enfants 

Votre ONG prône un protocole. Parlez-nous en 
Notre ONG, Raise Brave Girls, propose un protocole global visant à renforcer la protection des enfants et des femmes, en s’appuyant sur notre expertise en recherche et en développement de politiques publiques. Ce protocole inclut des programmes de formation pour les parents et les professionnels, un système de suivi des familles vulnérables, des campagnes de sensibilisation, et la création de partenariats entre les autorités publiques et les ONG. 

Nous avons également proposé un « Raise Flag System », un système d’alerte intégré qui connecte toutes les autorités compétentes pour une réponse rapide et coordonnée face à la violence et à la négligence. 

Votre organisation compte-t-elle travailler de concert avec le ministère de tutelle et faire des propositions concrètes et réalisables ? 
Oui, Raise Brave Girls propose la création d’une unité spéciale placée sous la direction directe du bureau du Premier ministre, afin de coordonner efficacement toutes les actions relatives à la protection de l’enfance et à la lutte contre la violence. Cette unité aurait pour mission de superviser la mise en œuvre de politiques publiques, d’assurer une réponse rapide et coordonnée aux situations d’urgence, et de garantir un suivi constant des mesures prises. 

L’avenir des enfants étant en jeu, il est impératif d’avoir une structure centralisée et forte, capable de travailler de manière transversale avec toutes les autorités concernées, tout en ayant une visibilité et une influence au plus haut niveau de l’État. 

L’Ombudsperson for children plaide pour une école des parents

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Selon Aneeta Ghoorah, l’exercice de la parentalité devient de plus en plus complexe.

Selon l’Ombudsperson for Children Aneeta Ghoorah, le meurtre de la petite Catalea souligne l’urgence de sensibiliser davantage les citoyens, les professionnels et les décideurs à l’impact dévastateur de telles situations sur les enfants. « Nous plaidons pour des politiques et des programmes visant à protéger ces enfants, à réduire les risques grâce à la prévention et l’éducation, tout en garantissant un soutien psychologique et social adapté », explique-t-elle. Cependant, elle précise le rôle clé des ministères et agences concernés – éducation, santé, et protection de l’enfance – pour mettre en place ces structures.

Le bureau de l’Ombudsperson for Children met également l’accent sur le rôle essentiel des parents dans l’éducation et la protection des enfants. « Les familles ont besoin d’accompagnement pour offrir un environnement sûr, apaisant et épanouissant. Toutes les autorités compétentes doivent travailler main dans la main pour doter les parents des compétences nécessaires », insiste Aneeta Ghoorah.

Elle note que l’exercice de la parentalité devient de plus en plus complexe, en raison des nombreux défis sociaux, économiques et technologiques. « Il est impératif d’étudier les enjeux de la parentalité et de proposer des solutions concrètes. Par exemple, une école des parents pourrait être un outil précieux pour les jeunes couples, mais aussi pour tous ceux qui souhaitent mieux comprendre et répondre aux besoins de leurs enfants », suggère-t-elle.

Qu’en est-il des enfants exposés à la violence conjugale ? « Ces enfants évoluent dans un environnement toxique qui affecte leur santé physique, leur équilibre mental, leurs résultats scolaires et leur développement social », avertit-elle. Dans cette optique, le bureau de l’Ombudsperson for Children recommande des formations spécialisées pour les juges, avocats et autres professionnels concernés, afin de mieux appréhender les impacts de la violence conjugale sur les enfants.

La participation des parents est primordiale

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Jennifer et Olivier Constantin regrettent que peu de parents participent aux formations.

« Un climat de dialogue et de confiance entre parents et enfants est primordial », affirment Jennifer et Olivier Constantin, délégués épiscopaux du Service diocésain de la pastorale familiale. Selon eux, les parents ont tout à gagner à entrer en dialogue avec leurs enfants dès leur plus jeune âge : « Il est important que l’enfant comprenne qu’il n’existe pas de sujet tabou au sein de la cellule familiale et d’instaurer une relation basée sur la confiance, l’amour et le respect mutuel. »

Le couple souligne également le rôle crucial des enseignants, ces relais éducatifs de premier plan après les parents : « Les enseignants peuvent détecter les enfants qui manquent d’encadrement dans leur famille et leur offrir un soutien précieux. »

Cependant, Jennifer et Olivier Constantin constatent que, malgré certaines initiatives prises par des mouvements familiaux pour offrir des formations, telles que des parcours d’éducation parentale pour aider les parents à comprendre leur rôle et leurs responsabilités, très peu de parents font l’effort de participer à ces formations. Ils mentionnent également d’autres formations, comme l’Atelier Gordon Parents Efficaces, offert par Human Development Training & Services Ltd, qui pourraient grandement aider les parents à relever les défis auxquels les jeunes sont confrontés.

Enfin, le couple délégué épiscopal soulève une question cruciale : « Comment rencontrer ces personnes que ni l’Église ni la société civile ne touchent, et qui auraient pourtant tellement besoin d’être elles-mêmes accompagnées avant de pouvoir offrir à leurs enfants une éducation équilibrée ? »

Devenir un « parent efficace » : un enjeu fondamental pour l’avenir familial

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« Les tensions familiales et les tabous culturels sont parfois transmis de génération en génération », dit Marielle Requin.

Dans une société où la quête de réussite professionnelle et les pressions sociales dominent, il est crucial de revenir à l’essentiel : les relations humaines. C’est dans ce cadre que le programme « Parents efficaces » de l’entreprise à but non lucratif Human Development Training & Services, et Gordon Training Mauritius, se distingue, en offrant aux parents les outils nécessaires pour mieux comprendre leur rôle et gérer les dynamiques familiales.

La formation « Parents efficaces », issue de la méthode Gordon, repose sur l’idée fondamentale que chaque parent a déjà en lui les connaissances et les ressources nécessaires pour être un meilleur éducateur, explique Marielle Requin, de Human Development Training & Services. Il ne s’agit pas de remplir un vide théorique, mais de reconnecter les parents à leur propre vécu et de les accompagner dans un cheminement personnel pour devenir plus conscients de leurs actions et de leur impact au sein de la famille.

Ce programme, qui existe depuis une cinquantaine d’années et est utilisé dans plus de 100 pays, repose sur des principes simples : l’écoute active, la gestion des conflits, et la compréhension des valeurs familiales. Il permet aux parents de créer un environnement plus harmonieux où le dialogue remplace les conflits et l’empathie l’emporte sur la réactivité, souligne Marielle Requin.

La méthode se distingue par son approche pratique et réaliste. En apprenant à écouter leurs enfants et à comprendre les signaux non verbaux qu’ils émettent, les parents peuvent mieux répondre à leurs besoins émotionnels, sociaux et éducatifs. « Le programme est également conçu pour être accessible à tous, sans connotation religieuse, et est adapté aux réalités culturelles locales, même dans les régions plus reculées. »

Le programme ne s’arrête pas à une simple liste de techniques. Human Development Training & Services adopte une approche qui respecte l’histoire et les spécificités de chaque parent. Chaque individu arrive avec son vécu, ses frustrations, ses blessures personnelles, et c’est en partant de ce point que le programme agit. Les parents sont invités à réfléchir sur qui ils sont, non seulement en tant que parents, mais en tant qu’individus, avant d’agir dans leur rôle parental, précise Marielle Requin.

L’importance de l’écoute active

Un des outils centraux de la formation est l’écoute active. Les parents apprennent à écouter non seulement ce que leurs enfants disent, mais aussi ce qu’ils ne disent pas. Un enfant peut se cacher derrière des comportements perturbateurs, tels que la négligence ou la colère, qui sont souvent des signes de mal-être. « Malheureusement, les parents réagissent parfois de manière agressive avec des phrases comme : ‘Ki to gagne ?’ Ce type de réaction bloque toute possibilité de dialogue. Nous enseignons une approche différente, comme dire : ‘Je vois bien que quelque chose te tracasse. Je suis là si tu veux en parler.’ Cette formulation ouvre un espace de communication », fait-elle ressortir. 

Les familles qui participent à ce programme connaissent des changements concrets. Human Development Training & Services ne se concentre pas spécifiquement sur des problématiques comme la toxicomanie, précise Marielle Requin, mais constate que de nombreux participants ayant suivi le programme ont des expériences liées à ces défis. En offrant un espace où les parents peuvent parler de leurs préoccupations sans être jugés, l’association permet de rétablir une communication saine, et de restaurer la confiance au sein de la famille.

L’une des forces du programme « Parents efficaces » est son adaptation aux contextes de précarité ou marquées par la violence. Pour Marielle Requin, l’environnement socio-économique ne doit pas être un frein à l’épanouissement familial. Que ce soit dans un contexte de pauvreté, de violence ou de stress, chaque parent peut bénéficier de cet accompagnement personnalisé, qui met l’accent sur la compréhension de soi avant tout. « Les ateliers de Human Development Training & Services offrent un espace sécurisé où les parents peuvent parler de leurs difficultés, sans jugement, et trouver des solutions adaptées à leur réalité. La confidentialité et la bienveillance sont des principes clés qui assurent une participation active et une évolution positive. »

Les transformations observées sont graduelles, poursuit-elle. « Les participants entament un cheminement vers le changement, accompagné par des outils et des soutiens adaptés. Chaque famille qui évolue positivement peut influencer une génération entière », affirme Marielle Requin. Et cela, d’autant que « les tensions familiales et les tabous culturels sont parfois transmis de génération en génération. Cela nécessite un véritable changement de mentalité ». Elle évoque également la santé mentale, « un enjeu crucial souvent négligé ».

Les initiatives de Human Development Training & Services ne se limitent pas à des formations isolées. L’organisation collabore étroitement avec des institutions locales comme la Fondation Lagesse et le ministère de l’Égalité des genres, afin d’étendre l’impact de ses actions. Grâce à ces partenariats, des parents issus de divers horizons bénéficient de ces ateliers et témoignent de transformations significatives dans leur quotidien.

Ces collaborations permettent à l’association de toucher un plus large public et de renforcer la portée de son message. « Cependant, un des principaux défis reste la perception des parents, qui pensent souvent ne pas avoir besoin de formation. Nos ateliers visent à changer cette mentalité et à cultiver l’amour et la solidarité au sein des familles, avec des impacts positifs sur leur vie personnelle et professionnelle. »

 

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