Exilée à Maurice, la communauté chagossienne n’a pas pour autant oublié sa culture, encore moins sa gastronomie. Près de 50 ans après avoir été forcés de quitter leur terre natale, les Chagossiens célèbrent toujours leur cuisine.
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À l’heure où la lutte pour que les Chagossiens retournent sur leur terre natale se poursuit à l’échelle internationale, ces derniers revivent quotidiennement leur passé à travers les plats cuisinés. En effet, depuis leur arrivée à Maurice, la cuisine chagossienne a été omniprésente. Maudea Samiden a 67 ans. Chez elle à Baie-du-Tombeau, c’est la cuisine de sa terre natale qui prévaut : « Cuisiner les menus chagossiens, c’est comme revivre mon passé sur mon île. C’est comme un devoir de mémoire. »
Vu l’abondance des noix de cocos sur l’archipel, les Chagossiens en ont fait un ingrédient incontournable de leur cuisine : « Toutes nos recettes contiennent du coco ou du lait de coco. La raison est toute simple. C’est parce que là-bas on ne peut pas mettre un pied devant l’autre sans tomber nez à nez avec un cocotier. »
Le menu qui requiert le plus de coco, c’est bien le fameux ‘seraz’. « Pour le ‘seraz’, on utilise du poulet, du poisson ou encore des ‘sipaille’, un gros crabe. On met la chair dans une casserole, on ajoute de l’eau et c’est tout. On laisse mijoter, puis au moment où l’eau commence à sécher, on ajoute du lait de coco et beaucoup de piments. Pour épaissir la sauce on peut aussi y ajouter un morceau de giraumon. Le résultat est un vrai plaisir pour le palais. On le consomme dans les grandes occasions, où les dimanches. »
Menus végétariens
On pouvait également retrouver sur les Chagos, un rougaille qui ne ressemble en rien à sa cousine mauricienne. « Au Chagos, on préparait des rougailles avec des bilimbis longs. Un vrai délice », nous dit Maudea.
Et qui dit gastronomie, dit aussi desserts. Et là encore, les Chagossiens se montrent très inventifs. « Aucun Chagossien ne peut résister au ‘mouff’. Pour le réaliser, on fait tremper du riz pour le ramollir. Puis on l’écrase et on le fait sécher au soleil. Pour la cuisson on ajoute du lait de coco et on le fait cuire, enroulé dans des feuilles de coco », explique Lisby Elisée.
Les végétariens ne sont pas en reste non plus. « À vrai dire, aux Chagos on ne mangeait pas forcément de la viande pendant la semaine. On consommait aussi beaucoup de légumes qu’on cultivait nous-même. Et un des menus végétariens qu’on aimait bien c’est le brède ‘mouroum’ frit dans lequel on ajoutait du piment pour relever le goût », ajoute Maudea.
On ne peut pas non plus parler des Chagos sans parler de leurs deux boissons, le ‘baka’ et le ‘kalou’. « Le ‘baka’ est une boisson alcoolisée à base de grains secs. Pour son utilisation, on peut prendre des lentilles ou du dholl, mélangés à du sucre et de l’eau. On laisse le tout fermenter pendant plusieurs heures. Après quoi, le breuvage peut être consommé, à condition d’avoir l’estomac solide, parce que rien qu’un petit verre peut vous mettre K.-O. Cette boisson peut être conservée pendant plusieurs mois », fait ressortir Noëlla Gaspard.
La préparation du ‘kalou’ est encore plus simple, mais il faut vraiment supporter l’alcool pour en prendre. « Pour le ‘kalou’ on utilise, la partie du cocotier d’où émergent les noix de cocos. On le coupe et on laisse égoutter le liquide dans un récipient. Utilisé comme une boisson alcoolisée par la suite, sa consommation requiert, comme pour le ‘baka’, une forte constitution », prévient Noëlla avec le sourire.
Cependant une crainte anime ces trois dames : celle que ces traditions culinaires disparaissent avec le temps. « Malheureusement la jeune génération ne s’intéresse pas à notre cuisine.
Les jeunes aiment bien manger mais très peu prennent la peine d’apprendre à préparer les mets typiques. Nous craignons qu’après nous, notre cuisine ne sombre dans l’oubli », déplorent les trois Chagossiennes.
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